Source : Xinhuanet
— Parmi les priorités assignées au gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) au cours de son mandat, figure la question de paix et de la sécurité dans l’est du pays.
La question de la paix est et reste à ce jour un des problèmes auxquels est confronté le gouvernement congolais depuis son arrivée à la tête du pays. Au début de l’année 2010, le président congolais Joseph Kabila a, dans son discours à la nation, réaffirmé sa volonté à œuvrer pour la restauration de la paix dans l’est de la RDC.
Cette politique passe par le renforcement des capacités des Forces Armées de la RDC (FARDC) dans la lutte contre les forces négatives, les Interahamwés, les Nalu, les Maï Maï, et les rebelles de l’Armée de la résistance du Seigneur (LRA), dans la province Orientale.
Dans leur offensive contre les forces négatives, les FARDC sont appuyées par la Mission de l’ONU pour la stabilisation au Congo (MONUSCO). Une année après, la situation dans l’est de la RDC reste encore pour le moins précaire. Les forces négatives sont encore omniprésentes dans l’est du pays. Elles continuent à semer la terreur c’est-à-dire, à violer, à tuer et à piller les ressources naturelles de la RDC.
Dans les régions du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, les opérations conjointes entre les FARDC et les éléments de l’Armée patriotique rwandaise (APR) pour neutraliser les rebelles de Forces démocratique des Libérations du Rwanda (FDLR) n’ont pas réussi à éradiquer totalement les actions de terreur des rebelles hutus rwandais.
Bien au contraire, les FDLR continuent encore à violer, à piller et même à percevoir des impôts dans les zones qu’ils contrôlent. “Ces groupes armés contrôlent des sites miniers où ils exploitent des minerais en échange des armes. Le commerce illégal de minerais par ces groupes armés est aussi à la base de l’insécurité chronique dans l’Est du pays et, partant de la prolifération du trafic d’armes et de munitions dans cette partie de la RDC”, a expliqué Jean-Richard Hamisi, politologue et membre de la Société civile du Nord-Kivu.
Il note que les FDLR se livrent sans ménagement aux attaques contre des villages dans l’est de la RDC. “Les attaques des groupes rebelles FDLR contre des villages déstabilisent plusieurs foyers. On observe depuis quelques temps des vagues de déplacements dans plusieurs localités du Nord Kivu et du Sud Kivu suite aux attaques régulières des rebelles de FDLR et des autre forces négatives”.
Il a souligné qu’au Nord- Kivu et au Sud-Kivu, la situation sécuritaire n’est guère rassurante à cause des affrontements réguliers entre les Forces gouvernementales et les Maï Maï. Dans le territoire de Rusthuru, à Walikale des cas de viols des femmes par les FDLR et autres forces négatives ont atteint de proportions inquiétantes, ont souligné des sources religieuses à Bukavu.
Dans la Province Orientale, la situation reste relativement calme mais précaire depuis l’offensive menée depuis le début de l’année par les FARDC contre les rebelles de LRA. Selon le commandant de la 9ème région militaire, le général Jean-Claude Kifwa, les FARDC ont réussi à démanteler les bases des rebelles de la LRA dans la Province Orientale. “Ils se sont repliés vers la République centrafricaine où se trouvent leurs bases arrières”, a affirmé le Générale Kifwa.
Dans son message adressé à la population congolaise et à la communauté internationale dimanche dernier, au stade des Martyrs de Kinshasa, le nouveau Cardinal catholique de Kinshasa, Monseigneur Laurent Monsengwo a lancé un appel à la paix et à l’arrêt de la guerre et des violences sexuelles dans l’Est de la RDC.
LA SUSPENSION DE L’EXPLOITATION MINIERE
Au mois de septembre dernier, le président Joseph Kabila a signé une ordonnance loi interdisant toute exploitation de minerais dans les zones et territoires du Nord-Kivu et du Sud Kivu jusqu’à nouvel ordre.
L’objectif visé était de couper l’herbe sous les pieds des groupes armés en leur privant des moyens de s’approvisionner en minerais qu’ils revendent ensuite pour obtenir des armes.
Quatre mois après cette décision du Chef de l’Etat congolais, force est de constater que l’exploitation des minerais dans l’est de la RDC se poursuit sans ambages. Les rebelles FDLR, Nalu, les Maï Maï et autres forces négatives continuent encore à exploiter ces “minerais du sang”. En outre, il y a des officiers des FARDC, de surcroît des gradés de l’Armée congolaise, qui sont également impliqués dans l’exploitation illégale des minerais dans l’Est de la RDC. Par le fait même, cela rend la tâche du président de la République très difficile et compliquée. “Nous croyons que le Chef de l’Etat prendra des mesures sévères pour sanctionner toutes ces personnalités civiles et militaires qui sont impliquées dans l’exploitation illégale des ressources”, a affirmé un député national originaire du Nord Kivu sous le couvert de l’anonymat.
L’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC a été au centre des discussions d’une réunion de la société civile des pays de la région des Grands Lacs qui a eu lieu le jeudi 11 novembre 2010 à Kinshasa.
Selon le directeur régional de l’Observatoire des ressources naturelles en Afrique Australe (SARW), Claude Kabemba, la question de l’exploitation illégale des ressources naturelles est à la base de nombreux conflits dans la région des Grands Lacs. “Les crises sociopolitiques de la région ont été notamment exacerbées par les guerres des ressources qui ont développé des mécanismes, des instruments et réseaux de pillage et d’exploitation illégale des ressources naturelles surtout de la région des Grands Lacs”, a-t-il indiqué.
“Il s’agissait là de la première fois que la société civile de la région des Grands Lacs se réunisse pour montrer son implication directe à la lutte contre l’exploitation et le commerce illégal des ressources naturelles notamment dans l’est de la RDC. Les participants se sont engagés à promouvoir la transparence dans la gestion de ces ressources afin que ces dernières ne soient plus une source de guerre et d’instabilité, mais plutôt un facteur de développement économique des pays de la région des Grands Lacs en générale, de la RDC en particulier”, a conclu le directeur général de SARW.
Pour un grand nombre d’observateur, la paix en RDC passe inéluctablement par la neutralisation de tous les groupes armés qui sèment la terreur dans l’est de la RDC et qui se livrent aux pillages des ressources minières du pays.
“Pour réussir une telle entreprise, il faut une forte implication du gouvernement congolais qui doit renforcer les capacités des FARDC. A cela il faut ajouter une forte implication de la communauté internationale, notamment la MONUSCO ainsi les pays voisins de la RDC où ces force négatives trouvent leurs bases arrières. Ce n’est qu’à ce prix que la paix peut vraiment devenir une réalité dans l’est de la RDC”, a conclu le professeur Philippe Biyoya, spécialiste en Sciences politique et Relations Internationales à l’Université de Lubumbashi.
En outre, le gouvernement congolais doit élaborer un certain nombre de projets de développement en faveur de la population locale, en l’occurrence des jeunes, pour les détourner de la tentation de s’enrôler dans des groupes armés à la base de l’insécurité omniprésente dans l’est du pays, a-t-il souligné.
Par Luc Roger Mbala et Shu Shi
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