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Bruxelles hausse le ton, les marchés s’emballent et les agences de notation commencent à réagir : la presse s’inquiète de plus en plus des conséquences du budget italien, qui sort des clous européens. Pendant ce temps, les deux partis au gouvernement se disputent sur le contenu du projet.
Le gouvernement populiste italien avait décidé de tenter le tout pour le tout et de ne pas se laisser intimider par les marchés et les avertissements de Bruxelles : le 15 octobre, il a présenté à la Commission européenne un projet de budget prévoyant 2,4 % de déficit, soit trois fois plus que ce qu’elle attendait.
Les conséquences n’ont pas tardé. Le spread, indicateur de référence de la défiance des investisseurs, a frôlé les 340 points, le plus haut niveau depuis cinq ans. Jeudi 18 octobre, rapporte La Stampa, la lettre dans laquelle la Commission européenne dénonce “un projet qui dévie d’une façon inédite des règles du pacte de stabilité”, est arrivée à Rome. Et dès le lendemain, une première réaction des agences de notation : l’agence Moody’s a déclassé l’Italie de Baa2 à Baa3, ce qui signifie qu’elle n’est plus qu’à un cran de la catégorie spéculative (“Junk” ou “obligations pourries”), souligne le Corriere della Sera.
Dans la presse, et particulièrement dans les quotidiens libéraux ou financiers, la panique commence à monter. “Réveillez-vous ! Soit on change le budget, soit on retourne en 2011”, s’écrie Il Foglio en une ce 20 octobre, évoquant le souvenir de la crise. “Ils jouent au poker avec votre argent”, s’indigne Milano Finanza. “Les investisseurs s’enfuient”, ajoute Il Sole-24 Ore.
Batman, Robin et les “petites mains”
Mais parallèlement aux réactions européennes et financières, une autre affaire a éclaté, au sein même du gouvernement italien – composé de deux partis populistes, le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) et la Ligue (extrême droite). Le budget présenté à la Commission est un compromis entre leurs deux programmes : le Mouvement 5 étoiles y a notamment placé sa promesse-phare, la création d’un revenu citoyen pour les personnes les plus défavorisées, tandis que la Ligue a prévu d’assouplir les modalités de départ à la retraite et de baisser certains impôts.
Mais pour le M5S – fondé sur des promesses de transparence et de justice sociale – le plus dur à avaler était sans aucun doute l’amnistie fiscale promue par la Ligue.
Or, mercredi soir, coup de tonnerre. Invité de l’émission Porta a Porta sur Rai1, Luigi Di Maio, leader du M5S sonne l’alerte : d’après lui, le texte sur lequel s’était accordé le Conseil des ministres a été modifié, de façon à le rendre encore plus clément vis-à-vis des évadés fiscaux. Comme il l’écrit sur Facebook : “Je ne sais pas si c’est l’intervention d’une petite main politique ou d’une petite main technicienne”, mais “je vais porter plainte” et, en l’état, “le Mouvement 5 étoiles ne votera pas le texte au Parlement”.
Jeudi 18, la formule “petites mains” (“Manine”) a été l’objet de tellement de détournements et de railleries qu’elle figurait parmi les “trending topics” de Twitter. À Naples, des “petites mains” sont même apparues parmi les figurines vendues pour les crèches de Noël, a relevé l’émission Agorà sur Rai3.
Mais surtout, les déclarations de Di Maio ont été démenties avec sarcasme par son partenaire au gouvernement, Matteo Salvini, le secrétaire de la Ligue : “Nous étions tous là au Conseil des ministres, il n’y avait pas que moi. Nous sommes sur le point d’être attaqués par l’Europe. Si on commence à dire que le décret a été modifié au cours de la nuit par Batman ou Robin, il y a un problème.”
La coalition vacille
Le journal Il Dubbio résume le conflit entre Di Maio et Salvini à sa une : “Je ne suis pas idiot” ; “Et moi je ne suis pas un menteur”.
“Il est pratiquement impossible de savoir qui a raison, explique Il Post. Le communiqué de presse dans lequel le gouvernement a communiqué son entente lundi est tellement vague qu’il est impossible d’en déduire ce que les différents ministres se sont réellement dit.” La version définitive de l’accord a été rédigée par la suite.
Ce 20 octobre, le Premier ministre Giuseppe Conte réunit le Conseil des ministres pour ramener le calme et trouver un accord. De leur côté, les journaux décrivent la “tension”, la “dispute” au sein de la coalition, qui semble vaciller. Il Foglio rapporte que ces désaccords et l’agitation autour du budget conduisent les experts financiers à envisager de plus en plus sérieusement que le gouvernement tombe. Un accord sera forcément trouvé, assure de son côté La Stampa, “parce que Matteo Salvini comme Luigi Di Maio ont intérêt à ce que le gouvernement tienne le coup, au moins jusqu’aux élections européennes.”
Carole Lyon