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Forum de coopération Chine-Afrique: Pékin veut redorer son image sur le continent


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Par Stephane Lagarde (RFI)
Le Vème Forum de coopération Afrique-Chine s’est ouvert ce jeudi 19 juillet à Pékin.
RFI/Stéphane Lagarde

-Et si la locomotive économique chinoise entraînait la croissance en Afrique ? C’est l’une des idées mise en avant par Pékin à l’occasion de cette 5e conférence ministérielle du Forum de coopération Chine-Afrique (FOCAC) qui s’ouvre ce jeudi 19 juillet 2012 à Pékin. Le FOCAC a été créé en 2000 et a lieu tous les trois ans. Cette année, le rendez-vous a attiré les dirigeants de 50 pays du continent. Depuis 2009 la Chine est devenue le premier partenaire commercial de l’Afrique avec plus de 166 milliards de dollars d’échanges en 2011. En ouverture des discussions, le président Hu Jintao a annoncé le doublement du montant des prêts à l’Afrique, à 20 milliards de dollars, pour les trois années à venir.

 De notre correspondant à Pékin,

L’hymne du Niger puis celui de l’Afrique du Sud avant l’hyme ivoirien : la fanfare de l’Armée du peuple n’a pas le temps de chômer, six chefs d’Etat ayant fait le déplacement pour ce nouveau Forum de la coopération Chine-Afrique. Un rendez-vous précédé par des rencontres bilatérales. En fin de journée le Sud-Africain Jacob Zuma a succédé à Mahamadou Issoufou accueilli le matin même par son homologue Chinois Hu Jintao sous les ors du Palais du Peuple.

Visite de la cité interdite

Les Chinois sont déjà présents au Niger dans l’uranium et le pétrole. Le président Issoufou a rappelé dimanche 15 juillet à l’agence Chine nouvelle que son pays attendait l’aide de la Chine pour accroître sa production agricole. Il avait également rendez-vous ce mercredi avec le patron de la China National Petroleum Corporation juste après la cérémonie d’accueil au Palais du peuple et avant une visite de la Cité interdite.

C’est en effet sur le terrain du développement qu’est attendu Pékin. Les investissements dans les matières premières rapportent des bénéfices rapides aux Etats mais créent peu d’emplois (lire l’entretien avec Shi Zhan en encadré). Les investissements chinois dans le cuivre en Zambie notamment ont ainsi fini par exaspérer la population zambienne. Aussi la diplomatie chinoise met en avant l’initiative privée plutôt que les chantiers des grandes entreprises publiques.

« Plus de 2 000 sociétés chinoises ont investi en Afrique, affirmait mardi 17 juillet Shen Danyang, le porte-parole du ministère chinois du Commerce. Elles ont aidé à promouvoir la diversification économique et à créer des emplois. » Rien ne sert d’aligner les kilomètres de routes, si les grands maîtres d’œuvre public chinois n’emploient pas les populations locales. Un nombre de plus en plus élevé de petites entreprises privées chinoises se tournent ainsi vers ce grand marché prometteur pour vendre des biens de consommation ou des services qui, notamment dans les télécoms, constituent l’un des principaux moteurs de la croissance africaine.

Aide chinoise

«Bienvenue aux amis africains !» Les banderoles sur le 4ème périphérique de la capitale chinoise, sont désormais familières aux habitués de ce forum. Le terme « amitié » est d’ailleurs beaucoup revenu dans les discours qui ont précédé l’évènement : « 1000 kilomètres de distance n’empêchent pas les amis d’honorer leurs rendez-vous a ainsi affirmé Yang Jieshi. Le ministre chinois des Affaires étrangères allant même jusqu’à utiliser le style ternaire pour renforcer la proximité : « La Chine et les pays africains sont bons amis, bons partenaires et bons frères ».
 
« Bons amis » ce sont les banderoles qui le disent. « Bons partenaires », il suffit de regarder les chiffres : selon les données officielles, le commerce bilatéral entre la Chine et l’Afrique a enregistré un taux de croissance ces dernières années de 28 %. Mais là encore, Pékin veut contrer les critiques sur l’échange inégal. « La Chine va continuer à ouvrir son marché aux produits africains » a expliqué aux journalistes Lu Shaye ce mercredi après-midi. En dix ans, les exportations africaines vers la Chine ont été multipliées par 16, passant de 5,6 milliards de dollars à 93,2 milliards de dollars. « Au total, 60 % des produits importés du continent sont aujourd’hui détaxés » poursuit le chef du département Afrique au ministère chinois des Affaires étrangères, faisant référence notamment aux vins sud-africains. « Cette proportion devrait atteindre 95 % après ce Forum » selon lui.

Enfin, « bons frères » : l’aide chinoise a bondi de 60 % entre 2009 et 2011 rappellent les responsables chinois. Le président Hu Jintao devrait aussi annoncer dans son discours d’ouverture une nouvelle série de prêts pour le continent. Lors du précédent rendez-vous il y a trois ans, la Chine avait promis 10 milliards de dollars.

Intégration africaine

Autre objectif claironné par la diplomatie chinoise : le rôle de la Chine dans l’intégration du continent. Des projets bilatéraux seront signés pendant ces trois jours, à l’image des engagements pris entre la Côte d’Ivoire et le Shaanxi. Alassane Ouattara s’est en effet rendu mardi à Xian, chef-lieu de cette province du centre du pays. Le président ivoirien a profité de ce prélude au sommet avant de rejoindre Pékin pour faire un peu de tourisme et découvrir la célèbre armée de terre cuite dans le mausolée de l’empereur Qin.

On évoquera aussi les grands chantiers transrégions tels que le train entre la Tanzanie et la Zambie. Ce mercredi matin, au Palais du peuple, les confrères nigériens qui suivent la délégation présidentielle nous ont ainsi parlé de la « route du pétrole » entre Diffa et la frontière tchadienne. A terme, si tout va comme prévu, cette même route réalisée par les Chinois devrait relier Niamey à Ndjamena. Aidée du carnet de chèques de la deuxième économie du monde, la diplomatie chinoise a déjà réussi à faire bouger l’image de la Chine en Afrique « Il y a 20 ans on parlait des stades construits par les Chinois, aujourd’hui on parle du nouveau siège de l’Union africaine » confie une source diplomatique. Et c’est justement de ce nouvel hémicycle de bois clair au toit de verre à Addis-Abeba où se tenait un sommet de l’UA, que sont arrivés directement de nombreux participants au forum de Pékin.

Décryptage des relations Chine-Afrique avec SHI Zhan professeur à l’Université des Affaires étrangères de Chine

Quels sont les enjeux de ce cinquième rendez-vous de la coopération sino-africaine?

Les discussions devraient tourner autour de quatre grands thèmes. Il s’agira d’abord, d’évaluer les résultats de la rencontre précédente, ce qui a été fait et ce qui ne l’a pas été. Il faut en tirer les enseignements et voir comment approfondir ces accords de coopération et la relation stratégique sino-africaine. Troisièmement, il faudra fixer les principaux domaines de coopération et le cap à tenir dans les trois ans qui viennent. Enfin, ce cinquième forum est l’occasion d’échanger les points de vue sur les problèmes régionaux importants, afin de garantir nos intérêts communs.

Depuis le sommet de Pékin en 2006, les liens entre la Chine et l’Afrique ont-ils évolué et dans quels domaines ?

On a évidemment eu une accélération des projets de coopération dans de nombreux domaines. Sur le plan politique, les échanges et les discussions entre les dirigeants chinois et africains se sont approfondis. La Chine pousse le processus d’intégration africaine et les Chinois ont aidé à construire par exemple le nouveau siège de l’Union africaine à Addis-Abeba. Pékin souhaite aussi que la voix de l’Afrique soit d’avantage entendue dans le concert des nations : c’est pour cela qu’il y a désormais un s à Brics ; la Chine a invité l’Afrique du Sud à rejoindre le groupe des pays émergents l’année dernière. Pour ce qui est des échanges, comme vous le savez, depuis trois ans la Chine est le premier partenaire commercial du continent africain. Le volume du commerce bilatéral entre la Chine et l’Afrique s’est élevé à 166,3 milliards de dollars en 2011 ; c’est une croissance de 83 % par rapport à 2009. Parallèlement à cela, l’aide chinoise a augmenté. Pékin propose d’avantage de prêts pour aider les PME et la construction d’écoles et d’hôpitaux. Une partie de la dette a été allégée et les droits de douanes abaissés pour les produits africains en Chine. Enfin sur plan culturel, la Chine a construit 29 Instituts Confucius dans une vingtaine de pays africains et accorde chaque année 5 000 bourses pour les étudiants du continent qui désirent suivre une formation en Chine. Et cela sans compter, les formations dans tous les domaines proposés à 6 000 africains tous les ans.

Comme on a pu le voir au Soudan ou en Libye, les ressortissants chinois ne sont plus épargnés par la menace des groupes armés. Est-ce que cela contribue à modifier la politique africaine de la Chine ?

La menace des groupes armés vise en réalité tout le monde : Les Européens, les Américains comme les Chinois, mais les premiers visés restent surtout les populations locales. Si l’on prend d’avantage conscience de cette menace aujourd’hui c’est tout simplement qu’il y a beaucoup plus de Chinois en Afrique qu’avant. La situation ne s’est pas aggravée mais elle est devenue plus voyante. Il faut donc s’attaquer à la racine du problème. Ces menaces sont apparues souvent en raison de structures politiques et économiques spécifiques à certaines régions à un moment donné. De nombreux pays africains sont riches en ressources naturelles et du coup ils deviennent très dépendants aux exportations de matières premières. Or ce modèle économique a le défaut de procurer des profits très importants et rapides mais sans créer beaucoup d’emploi. Pour que ce modèle fonctionne, il faut des institutions et une Constitution qui permettent la répartition des richesses. Si c’est le cas, les groupes armés disparaissent, comme on a peut le constater par exemple au Botswana.

La Chine a aussi été accusée par certains pays de ne pas suffisamment créer d’emplois, comment réagissez-vous ?

C’est exact mais ce serait réducteur de penser que les Chinois sont uniquement attachés aux matières premières. Le monde doit aider l’Afrique à développer ses infrastructures et c’est ce que fait la Chine. Il n’y a pas longtemps, j’étais en Ethiopie où j’ai vu un grand barrage construit par le groupe China Hydro. Cette centrale hydroélectrique fournit l’essentiel de l’électricité pour le sud-ouest du pays. En 5 ans, le PIB de l’Ethiopie a augmenté de 10 %. Cela m’a fortement impressionné : peu de pays atteignent une telle croissance surtout aujourd’hui en période de crise. C’est parce que l’Ethiopie a fait le choix de développer massivement ses infrastructures que cela a permis de créer des emplois.