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Kakudji, la mort d’un Tonton


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COLETTE BRAECKMAN

G. Kakudji

G. Kakudji

Décédé à l’hôpital Saint Luc à Bruxelles où il avait été hospitalisé voici une semaine, Gaetan Kakudji emporte avec lui l’un des pans les moins connus de l’histoire du Congo, le souvenir des années de lutte durant lesquelles Laurent Désiré Kabila, père de l’actuel président, tentait de préserver le petit maquis qu’il avait créé à Fizi Barka, au bord du lac Tanganyika.

Après l’échec des rébellions lumumbistes dans les années 60, alors que le président Mobutu, appuyé par l’Occident, installait durablement son pouvoir, Laurent Désiré Kabila et une poignée de fidèles avaient créé une « zone rouge » aux confins du pays, une zone non contrôlée par Kinshasa où le PRP (parti de la révolution populaire) créé par Kabila tentait de mettre en application des idées inspirées du maoïsme.

Jusqu’à la fin des années 80, le maquis de Kabila défia le pouvoir mobutiste, qui allait même jusqu’à nier son existence. Il est vrai que les militants révolutionnaires vivaient dans des conditions de plus en plus précaires, minés par leurs propres dissensions et trahisons, poursuivis par les services de sécurité de Mobutu et affaiblis par des conditions matérielles extrêmement difficiles, leurs seules ressources étant l’agriculture de subsistance et le commerce de l’or, exploité artisanalement dans la région. Durant ces longues années de traversée du désert, Gaëtan Kakudji représenta le PRP en Europe et plus particulièrement en Belgique. Originaire du Nord Katanga, cousin direct de Laurent Désiré Kabila, Kakudji organisait les contacts de ce dernier lorsque le maquisard, dans la plus grande discrétion, se rendait en Europe. Il est vrai que Kakudji avait ses entrées en Belgique : habitant Liège, il y était devenu le représentant local du Centre national de coopération au développement et entretenait des liens avec tous les militants progressistes de la région. C’est grâce à lui que Laurent Désiré Kabila entra en contact avec Pierre Galand et Anne-Marie Lizin, qu’il fut invité au Tribunal Russel sur le Congo, organisé à Rotterdam en 1982… Et c’est Kakudji aussi qui, par tous les moyens, essayait de trouver des financements pour soutenir un maquis qui avait disparu de la carte géopolitique mondiale, ou pour épauler des militants qui avaient fini par être obligés de se replier en Tanzanie et en Ouganda.

Après de longues années d’exil militant, Kakudji connut son heure de gloire en octobre 1996 : alors qu’il habitait encore à Schaerbeek, il fut le premier à annoncer la naissance de l’AFDL (Alliance des forces pour la libération du Congo) ce mouvement composite qui allait, avec le soutien militaire du Rwanda et de l’Ouganda, réussir à chasser Mobutu en mai 1997. Ainsi que quelques autres compagnons de route de Kabila, Kakudji rejoignit bientôt l’Est du Congo et se retrouva à Kinshasa sept mois plus tard pour y devenir Ministre de l’Intérieur dans le premier gouvernement composé par Kabila. L’histoire méconnue que Kakudji a emportée avec lui, c’est celle des relations nouées durant les années de guerre froide et de maquis, c’est la version congolaise des dissensions qui opposèrent rapidement les opposants congolais à leurs alliés rwandais et ougandais qui les traitaient comme des supplétifs, ce sont les raisons pour lesquelles l’enquêteur des Nations Unies Garreton ne put jamais mener jusqu’au bout ses investigations sur le massacre des réfugiés hutus qui furent pourchassés dans les forêts congolaises après la chute de Mobutu. C’est lui aussi qui fit partie du « comité de crise » qui se réunit sitôt après l’assassinat de Laurent Désiré Kabila et finit par désigner son fils Joseph pour lui succéder.

Après la disparition de Laurent Désiré Kabila en 2001, Kakudji quitte officiellement le devant de la scène en même temps que les autres « tontons ». Mais s’il cède la place à une autre génération, ses liens familiaux lui permettent cependant de préserver une relation privilégiée avec Joseph Kabila. Ainsi, à la veille du mariage de ce dernier, c’est Gaëtan Kakudji qui négocie la dot, organise la cérémonie et accompagne la mère du président au nom de la famille paternelle.

Même si ses apparitions officielles se faisaient rares, Kakudji, qui s’était intéressé à des exploitations minières dans sa région d’origine le Katanga, était demeuré un homme d’influence, incarnant le souvenir des années de lutte et d’exil