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La Ligue 1 est-elle (si) nulle ?

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Chronique. Depuis le temps que l’on proclame le déclin du championnat de France, celui-ci devrait en être aujourd’hui au niveau d’Andorre ou de Saint-Marin. Le sujet a tout du marronnier, et il a de nouveau poussé sur le terreau de l’hebdomas horribilis des clubs français en Coupe d’Europe.

Zéro victoire face à des adversaires pour certains modestes, il n’en fallait pas plus pour que notre goût de l’autodénigrement entre en émulsion au contact des éternelles carences de notre football de clubs.

Elle a toujours été (un peu) nulle

La frustration est sans doute avivée par l’écart entre les performances de la sélection nationale et celles des clubs, au lendemain d’une victoire en Coupe du monde. Mais on peut observer l’Angleterre pour se convaincre qu’une telle corrélation n’existe ni dans un sens, ni dans l’autre.

Cette frustration repose aussi sur un malentendu historique, qui consiste à prendre pour référence d’exceptionnelles années 1990, durant lesquelles le football de clubs français a connu son apogée avec ses sept finales continentales et ses deux uniques Coupes d’Europe. Juste avant la révolution industrielle du football.

Depuis une quinzaine d’années, la Liga, la Premier League, la Bundesliga et la Serie A sont bien installées en tête du coefficient UEFA, tandis que la Ligue 1 oscille entre le quatrième et le sixième rang.

Elle est à sa place

A une époque où les résultats sportifs sont de plus en plus indexés aux moyens financiers, le football français apparaît, en réalité, à sa place : celle de la cinquième puissance européenne – grâce à son vaste marché de consommateurs et à ses droits de diffusion.

En termes de prestige et d’attention, l’Espagne, l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie restent loin devant – malgré l’intérêt international récent suscité par l’AS Monaco et surtout le Paris-Saint-Germain.

Mais le PSG joue dans une autre cour, celle de la Ligue des champions, et la locomotive espérée est plutôt un TGV qui file sur d’autres rails que les TER de L1. Dans le monde, notre championnat vaut ce que valent ses droits de diffusion à l’étranger : une paille.

Lire :   OM – PSG : Ligue 1 cherche concurrents à Paris pour un semblant de suspense

Elle pourrait faire mieux

Logique, mais savoir ne pas rester à sa place, c’est aussi le propre du sport de haut niveau. La finale et la demi-finale de Ligue Europa atteintes par l’OM et l’OL en 2018 et en 2017 masquent mal le mépris des clubs français pour cette compétition – pourtant à leur portée. C’est le problème quand on joue plus la qualification pour la Coupe d’Europe que la Coupe d’Europe elle-même.

La faiblesse des projets sportifs, le manque d’audace sont des maux récurrents, qui compromettent le spectacle proposé, alors que le championnat de France souffre de son tropisme défensif et de son manque d’éclat.

Or, ni la direction technique nationale ni les entraîneurs ne font du football français un laboratoire du jeu dans lequel s’élaborerait un modèle séduisant et gagnant… Et quand des techniciens reconnus (Ancelotti) ou prometteurs (Jardim, Emery, Favre) arrivent de l’étranger, ils sont raillés et leurs séjours écourtés.

Elle pourrait être mieux dirigée

La France du football ne brille pas non plus par sa gouvernance. Même le meilleur président de club de l’époque, Jean-Michel Aulas, semble perdre pied. A Nantes, Paris, Marseille ou Lille, les dirigeants arrivés avec les investisseurs étrangers ont commis de graves erreurs de stratégie et de communication.

Bien que les clubs les plus nantis soient désormais dotés de stades modernes, ils continuent à se plaindre de la fiscalité ou de réclamer un système (encore) moins égalitaire en se déchirant au sein des instances.

De quoi s’inquiéter quant à l’usage qui sera fait de la future manne des droits télé, en forte augmentation dès 2020. L’absence de vision caractérise aussi un football qui méprise et maltraite absurdement ses supporteurs.

On l’aime quand même

Cette « Farmers League » que l’on moque à l’étranger est, pourtant, ce championnat où l’on forme et fait émerger de futures stars qui iront briller ailleurs, exploitant un fantastique vivier de jeunes joueurs. Elle sent le terroir qu’incarnent bien ses bucoliques multiplex du samedi soir.

C’est surtout la compétition où évoluent les clubs qu’on aime le plus – d’un amour plus difficile et ingrat que celui voué aux top teams glamoureuses, bardées de stars. On ne s’excusera pas d’avoir, dimanche après-midi, préféré Rennes-Reims au « classico » Barça-Real.

La Ligue 1 est dénigrée rituellement, mais on la chérit encore jusque dans sa manière de résister aux injonctions du grand spectacle footballistique mondialisé. On aimerait juste qu’elle fasse un effort pour nous rendre cette affection.

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