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Par J.-P. Mbelu
Si nous prenons le 30 juin 1960 comme une date symbolique dans la lutte pour notre émancipation des pouvoirs impérialistes, le 17 janvier 1961, date de la mort de notre héros national, Patrice Emery Lumumba, notre lutte ardente et idéaliste et ardente passe, petite à petit, dans la clandestinité. Les nègres au service de la troïka (USA, France et Belgique) en casse l’élan. Les maquis lumumbistes la porteront encore pendant quelques temps sans que son élément moteur soit entretenu ; sans que la politisation des masses se fasse de manière acharnée. Disons qu’elle va se faire à l’envers avec la naissance du Mouvement Populaire de la Révolution (MPR). Mobutiser nos masses en les rendant esclaves d’un dictateur et des pouvoirs impérialistes a contribué à la dévitalisation de nos populations ; elles ont sombré dans la danse accompagnant leur perte d’âme, de dignité, de liberté, de fierté, de ce qui fait que l’humain demeure debout. Quand les 13 parlementaires, en 1980, prennent distance vis-à-vis de ce pouvoir et essaient de remettre le système auquel ils ont participé, le Congo-Zaïre semble revenir d’un long et profond sommeil avilissant.
De 1960 à 1980, 20 bonnes années se sont écoulées avant que les élans de la lutte ardente et idéaliste entreprise par Lumumba reviennent sur le devant de la scène. La remise en question de la dictature de la mort sous Mobutu a bénéficié d’un apport de taille de l’un des dignes fils de notre peuple, le Cardinal Albert Malula.
Après 1980, un parti politique, l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) va mobiliser les énergies de nos populations et apporté une grande contribution à l’organisation de la Conférence Nationale Souveraine dans les années 1990. Le foisonnement des organisations de la société civile et la complicité entre elles et certains partis politiques de l’opposition seront des facteurs déterminants pour la suite des évènements. Et le 16 février 1992, quand la CNS est bloquée par le système de Mobutu, cette complicité va jouer dans son déblocage.
De 1980 à 1992, 12 bonnes années se sont écoulées, avant que nos populations et leurs leaders politiques et de la société civile ne se mettent debout comme un seul homme pour le combat de la liberté, de l’égalité et de la dignité.
C’est sur ce terrain fertile de la lutte que l’AFDL va récolter « sa victoire » momentanée (en 1997) sans y avoir semé. Elle est accueillie en libératrice avant que les dignes filles et fils de notre peuple ne remarque que « ce conglomérat d’aventuriers » n’était qu’un cheval de Troie pour les mêmes impérialistes qui, en 1961, avaient tué Lumumba. Il sera tard quand Laurent-Désiré Kabila se rappellera le sens de la lutte de sa jeunesse.
De 1997 à 2010, 13 bonnes années de lutte se sont écoulées sans que nos masses populaires soient associées à la gestion de la chose commune. Et pendant ce temps, plusieurs fronts de résistance se sont créés et les partis alimentaires aussi. Ceux-ci ont choisi la mangeoire de « nouveaux prédateurs » pour être à la soupe.
Quelques leçons peuvent être tirées de ce parcours de la lutte initiée par Patrice Lumumba avant et quelques temps après l’accession de notre pays à la souveraineté nationale :
1. ce sont les masses populaires politisées qui donnent le pouvoir ; Lumumba l’a expérimenté en gagnant aux élections organisées par les pouvoirs qui lui étaient hostiles ; voilà la leçon que ne pourront jamais assimiler les partis alimentaires et électoralistes n’ayant que Kinshasa pour fief ;
2. chaque fois que les Congolais (Zaïrois) ont eu des leaders auxquels ils se sont identifiés pour la lutte de leur émancipation intégrale, ils se sont mis debout, au risque même de leurs vies ;
3. chaque fois que ces leaders ont réussi à travailler ensemble en dépassant leurs clivages philosophiques, religieux, politiques, ethniques, etc., ils ont été forts et capables de soulever les montagnes.
4. les pouvoirs impérialistes se sont servis de certains de ces leaders et des IFI pour assurer leur présence permanente chez nous.
A travers cette relecture assez schématisé de notre histoire, il y a là comme une interpellation à la re-création et à la consolidation d’un leadership collectif (vertébré) capable de lutter en une synergie privilégiant l’intérêt supérieur de la mère-patrie.Au jour d’aujourd’hui, il est possible de dire que beaucoup d’efforts sont conjugués pour la refondation de notre pays sur des valeurs de solidarité, de courage, de patience et de persévérance. Plusieurs fronts de résistance font montre de beaucoup d’engagement et de bonne volonté. Mais, des peurs subsistent. La multiplication des partis politiques et des candidatures à la présidentielle à l’approche de 2011 (considérée à tort ou à raison comme année électorale) suscitent quelques inquiétudes. C’est comme si nous n’étions pas plusieurs à relire par nous-mêmes notre histoire. Le fait que plusieurs d’entre nous estiment qu’ils peuvent devenir président du Congo donne à penser. Rares sont ceux qui, parmi nous, pensent à la politisation de nos masses à partir de nos villages et villes de l’arrière-pays. Ceux qui ont vécu longtemps en exil et quelques têtes brûlées du pays continuent de croire que c’est l’Occident qui donne le pouvoir au Congo. Ils appellent cela « réalisme politique » !
Et pourtant, en aparté, l’un ou l’autre confident avoue que « les maîtres du monde » demandent à ceux qu’ils parrainent de prouver qu’ils ont une base au pays. Pourquoi ? Cette base pourra servir de caution populaire lors des élections. Et l’acharnement du pouvoir actuel soutenu par l’Occident à réaliser les cinq chantiers est un signal qui ne trompe pas : ils savent que malgré le soutien dont ils bénéficient, ils auront du mal à être reconduits si leurs promesses électorales ne sont pas tenues ; cela même imaginairement. On comprend que tout ce qui se construit au pays aujourd’hui soit mis au compte de cinq chantiers…
Hugo Chavez, Evo Morales et Rafael Correa (et en quelque sorte Lula) ont compris cela. Eux ont choisi de bâtir leur pouvoir politique sur leurs masses populaires et ont scellé avec elles une alliance que les pouvoirs impérialistes chercher à détruire à travers les services des ONG payées pour cette sale besogne.
(Dieu merci ! Ils n’y arrivent pas encore.)
Saurons-nous, dans notre immense majorité, renoncer à nos démons (divisions et prétentions démesurées) pour recréer ces fronts communs ayant contribué à nos victoires historiques ? Saurons-nous le faire autour d’un leadership collectif averti, digne et humble ? Et pourtant, il me semble qu’il n’y ait pas plusieurs voies de sortie de notre misère anthropologique en cette union réfléchie qui fait la force ! C’est vrai le temps du changement est moléculaire. Il faudrait peut-être apprendre à sauter sur le temps favorable, le kairos. Ou plutôt à provoquer le kairos en nous laissant instruire par notre histoire d’une cinquantaine d’années de lutte pour l’égalité et la liberté. La journée du 16 février 2010 pourra-t-il être un signal fort lancé dans le sens de la synergie des fronts pour une même lutte ? Attendons voir !