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L’Eglise de Rome vit à l’heure de l’Afrique


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Cathedrale-L’heure de l’Afrique va-t-elle sonner à Rome ? Non seulement 18 cardinaux africains vont participer au conclave mais surtout, l’Afrique est le continent où le nombre de catholiques connaît la plus forte croissance. Jean-Paul II ne s’y était pas trompé, consacrant à l’Afrique noire 40 voyages sur 110. Alors qu’au début de son pontificat, en 1978, l’Afrique comptait 50 millions de baptisés, ils sont aujourd’hui 155 millions soit 17,1% du total de la population africaine. En 2050, sur les 1,8 milliards d’habitants que comptera l’Afrique, 322 millions seront catholiques.
Si elle a explosé au cours des dernières décennies, la christianisation du continent est presque aussi ancienne que l’Eglise elle-même : dès le 1er siècle, l’évangéliste Marc fonde des communautés chrétiennes en Egypte, qui s’étendront jusqu’en Nubie et en Ethiopie. Après dix siècles de veille, les Portugais planteront la croix sur les côtes du Mozambique et de l’Angola. Mais il faudra attendre le 19eme siècle pour que le christianisme pénètre dans l’intérieur du continent, car les puissances coloniales, France et Belgique, confient aux ordres missionnaires (Spiritains, Pallotins, Pères blancs, Scheutistes) le soin d’encadrer moralement les populations, de lutter contre les cultes indigènes et de contrer la progression de l’Islam, amené par les caravanes esclavagistes. Précieux auxiliaires de la colonisation, les missionnaires créent des écoles, des centres de santé et les missions deviennent des îlots où se formeront les premières élites, des hommes comme Joseph Kasa-Vubu au Congo Kinshasa ou Fulbert Yulu sur la rive d’en face.
Alors que les missionnaires ont depuis longtemps dépassé l’âge de la retraite, l’Eglise catholique a pris racine en Afrique: en 2008, elle comptait 32.370 prêtres et 23.580 séminaristes, 632 évèques et 18 cardinaux. En Afrique, l’Eglise pratique l’ « inculturation ». C’est le Zaïre du président Mobutu qui donna le là : l’un des premiers universitaires congolais, le cardinal Malula, réussit à faire accepter par Rome l’adaptation de la liturgie catholique aux rites africains. Grâce à l’inculturation, les messes, au Congo et ailleurs, sont des évènements conviviaux et joyeux, les chants se succèdent, les pas de danse sont fréquents, les longues cérémonies représentent aussi un acte social, communautaire. En République démocratique du Congo, les religieuses sont autorisées à porter le pagne. Cette adaptation de l’Eglise à la culture locale, s’ajoutant à l’urbanisation galopante du continent, explique la croissance du nombre de fidèles. Le mouvement même de la christianisation se trouve inversé : désormais c’est l’Afrique qui « exporte » des prêtres vers les paroisses déchristianisées d’Europe…
Dans un continent toujours miné par la corruption, où les barrières morales de l’Eglise n’empêchent pas génocide et violences, l’Eglise catholique fait face à deux concurrents de taille : l’Islam et les mouvances évangéliques et pentecôtistes.
Un Africain sur trois se définit comme musulman et la cohabitation pacifique, la tolérance qui ont toujours inspiré les rapports avec les chrétiens sont battus en brèche par des mouvements radicaux. Au Nigeria par exemple, si évèques et imams se parlent au plus haut niveau, la secte Boko Haram, clairement anti-occidentale, considère les catholiques comme les courroies de transmission d’influences étrangères ; dans les Etats de Jos et de Bauchi, des églises ont été incendiées, des chrétiens massacrés…
Au Congo Kinshasa, l’urbanisation accélérée, l’affaiblissement des valeurs traditionnelles, la crise économique, mais aussi l’engagement politique des « communautés chrétiennes de base » ont favorisé l’émergence des « « églises de réveil », introduites du temps de Mobutu dans le but d’affaiblir une Eglise catholique jugée trop militante. Leurs prédicateurs mobilisent des foules immenses et leurs collectes recueillent des sommes importantes. Au sein de la diaspora les églises de réveil sont également très actives.
Le succès de l’Eglise catholique en Afrique est souvent attribué à son ancrage social (les écoles, les soins de santé, le tissu associatif), au fait que dans les jungles urbaines les paroisses demeurent des lieux de rencontre et de solidarité.
Le message pastoral est cependant beaucoup plus conformiste qu’en Amérique latine. Non seulement la théologie de la libération est inconnue mais ce que le cardinal Tuckson du Ghana appelle les « modes de vie alternatifs » (dont les droits des homosexuels, hommes et femmes) sont jugés contraires à la tradition tandis que l’avortement est rigoureusement interdit, y compris dans des cas de viols et de tortures sexuelles comme au Congo. Il n’y a pas si longtemps que, dans des pays ravagés par le Sida comme l’Ouganda, des dispensaires catholiques refusaient de distribuer des préservatifs…
Les deux « papabile » les plus fréquemment cités, le cardinal Peter Tuckson du Ghana et le cardinal Robert Sarah de Guinée sont considérés comme étant à la fois très conservateurs sur le plan de la doctrine et des mœurs et très ancrés dans la réalité sociale, étant, l’un président de la Commission pontificale Justice et Paix et l’autre à la tête de Caritas International…

Par Colette Braeckman