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Par Marie-France Cros
-Le passage de deux à un tour est vu comme un désir d’accaparer le pouvoir.
L’adoption le 15 janvier d’un amendement constitutionnel transformant l’élection présidentielle à deux tours en un scrutin à un seul tour, suscite un mécontentement important au sein de l’opposition congolaise.
Celle-ci se sent en effet directement visée par cette révision constitutionnelle puisqu’elle diminue considérablement ses possibilités de remporter l’élection. Traditionnellement divisée, en effet, elle a beaucoup moins de chance de gagner lors d’une consultation à plusieurs candidats qu’à seulement deux rivaux, qui se transforme, de facto, en plébiscite pour ou contre le chef d’Etat sortant.
La décision de procéder à ce changement est intervenue très rapidement, en janvier – alors qu’en décembre se sont déclarés successivement deux grands rivaux de Joseph Kabila à la présidentielle de novembre.
Etienne Tshisekedi est en effet rentré de trois ans d’exil et s’est déclaré candidat; il est un sérieux concurrent pour le chef d’Etat sortant dans l’ouest du Congo, où Joseph Kabila n’avait déjà recueilli qu’un tiers des voix en 2006.
Et Vital Kamerhe, ex-président de l’assemblée nationale éjecté par les siens à la suite d’un désaccord avec le chef de l’Etat, a, lui, démissionné du parti présidentiel PPRD, du poste de député qui y était lié, et a annoncé la formation de son propre parti, l’Union pour la nation congolaise (UNC) et sa candidature à la présidence. Or, originaire du Sud-Kivu, Kamerhe “chasse” sur les mêmes terres orientales que Kabila, qui avait recueilli en 2006 jusqu’à 98 % des voix à l’est du pays; et c’était Kamerhe, précisément, qui avait fait campagne pour lui avec ce succès énorme. Or, aujourd’hui, Joseph Kabila est bien moins populaire à l’est du pays parce que les promesses faites alors (la paix) n’ont pas été tenues. Celles d’août 2010 (déplacer des officiers de son armée qui participent à la mise en coupe réglée du Kivu; déplacer les unités les plus notoirement impliquées dans les violations des droits de l’homme) ne l’ont pas été non plus.
La révision constitutionnelle votée, Vital Kamerhe a lancé un appel à tous les dirigeants politiques d’opposition pour que chacun lance une pétition destinée à demander une révision de la Constitution qui annule les récents amendements. Les 100 000 signatures requises doivent – depuis la récente révision (voir ci-dessus) – désormais recueillir en outre l’approbation du chef de l’Etat pour donner lieu à un référendum; l’affaire est donc loin d’être gagnée. Mais si un nombre important de signatures était recueilli, cela représenterait, à l’évidence, un poids politique important.
A la présidentialisation du régime (voir article ci-dessus) s’ajoute un autre problème : celui de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Prévue par la Constitution, elle ne fonctionne toujours pas, à dix mois du scrutin présidentiel. Elle est remplacée, dans les préparatifs électoraux, par l’ancienne CEI, dont la légitimité de la prolongation fait l’objet d’une controverse. Si la CENI endossait rapidement le travail de la CEI, ce ne serait qu’un demi-mal, mais elle n’est toujours pas en état de marche.
Ses membres (4 désignés par la majorité présidentielle au parlement, 3 par l’opposition parlementaire), choisis en septembre, viennent seulement d’être confirmés au parlement, la majorité présidentielle ayant tenté, durant quatre mois mais en vain, de changer les 3 de l’opposition. Reste maintenant à désigner les postes qu’ils occuperont, en particulier qui sera le président de l’organe.
La majorité présidentielle propose trois noms : le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, Flavien Misoni et Elisée Nkoy. Le second serait le meilleur choix : juriste issu de la CEI, M. Misoni jouit de l’expérience requise et ses choix politiques sont peu marqués. Il n’en va pas de même du premier, qui aurait les préférences du pouvoir : inexpérimenté, le pasteur a pour mérite essentiel d’être parent de Joseph Kabila et proche de lui S’il devait être choisi pour présider la CENI, ce qui s’ajouterait au “bouclage” de la présidentielle grâce au scrutin à un seul tour, on peut se demander si l’Union européenne et ses Etats membres – dont la Belgique – financeraient les élections congolaises comme ils l’avaient annoncé lorsqu’étaient en vigueur des règles assurant une compétition ouverte.
Les Européens sont en effet inquiets de la restriction des libertés au Congo alors que, de facto, la campagne électorale a commencé. Vital Kamerhe s’est ainsi vu interdire de tenir meeting à Goma (Nord-Kivu) et à Bukavu (Sud-Kivu). Eugène Diomi vient d’être arrêté et condamné à 5 mois de prison au Bas-Congo pour s’être débattu contre des hommes qui voulaient lui arracher son passeport – et qui étaient des agents de renseignement. Le siège du parti-secte Bundu dia Mayala, très populaire au Bas-Congo, a été saccagé fin 2010. Et le directeur des programmes de Canal Congo Television à Matadi (Bas-Congo), Patrick Palata, a été arrêté le 6 janvier pour avoir organisé un débat télévisé sur le bilan de quatre ans de gestion du pays par la majorité présidentielle.