Warning: Trying to access array offset on value of type bool in /home/lavdcne1/public_html/wp-content/plugins/sitespeaker-widget/sitespeaker.php on line 13
-Les élections en République démocratique du Congo sont prévues le 28 novembre prochain. Si les délais sont tenus, il s’agira d’un tour de force en matière d’organisation. Le pays compte 400 partis politiques. 11 candidats à la présidentielle seront en lice et 18 000 pour les législatives. Le duel va principalement opposer le PPRD de Joseph Kabila et l’UDPS d’Etienne Tshisekedi. Les risques de débordements post-électoraux ne sont pas exclus.
1. DE GRANDES DIFFICULTÉS LOGISTIQUES
Le scepticisme reposait aussi sur les capacités opérationnelles de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), dirigée par le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, proche de Joseph Kabila. Depuis six mois, elle a été l’objet de nombreuses critiques. L’enrôlement des électeurs prévu pour le 28 Février dernier a été reporté au mois de juin. La publication tardive des annexes de la loi électorale, qui déterminent le nombre de sièges parlementaires par circonscription, a retardé la révision et la validation des électeurs inscrits sur le fichier électoral. Des centaines de milliers de doublons ont été trouvées dans le fichier électoral. Les partis d’opposition ont trouvé de nombreux motifs pour attaquer la CENI.
2. KABILA SEUL CONTRE TOUS
Joseph Kabila, au pouvoir depuis dix ans (nommé en 2001 à la mort de son père assassiné, puis élu en 2011 contre Jean-Pierre Bemba), est candidat à sa propre succession. Il se présente comme candidat indépendant, mais personne n’est dupe. Il bénéficie des relais de l’administration, son parti contrôlant les postes de gouverneurs dans les onze Province. Certes, il n’a pas de fief régional, et les provinces qui lui étaient favorables (Katanga, Maniema, Nord et Sud Kivu ne le sont probablement plus) mais il peut gagner avec la dispersion de l’opposition car le scrutin est à un seul tour.
En janvier 2011, le pouvoir est parvenu à faire voter en force, mais dans le respect de la légalité constitutionnelle, une réforme du scrutin présidentiel, le faisant passer de deux à un tour. L’opposition s’est brutalement trouvée contrainte d’adopter une stratégie d’union dès le premier tour, et donc d’empêcher l’expression des diverses sensibilités que ses partis et ses personnalités représentent. Les grandes manœuvres ont commencé très tôt. Au cœur du maelstrom quelques personnalités dominent le jeu électoral. Ils forment le “triangle nucléaire”. Etienne Tshisekedi, le “sphinx de Limete”, revendique le statut d’opposant historique et respecté, celui qui fut maintes fois embastillé sous Mobutu avant d’être brièvement son Premier ministre. Son audience est forte dans la capitale et sa base est dans le Kasaï. Deuxième opposant de taille, le jeune et bouillant Vital Kamerhe, originaire du Sud-Kivu, l’ancien fidèle de Joseph Kabila qui le fit président de l’Assemblée nationale avant de tomber en disgrâce en 2009, mais devenu pour cette raison encore plus ambitieux. Léon Kengo wa Dondo, plusieurs fois Premier ministre de Mobutu, président très respecté du Sénat, prudent à l’extrême, adopte une posture gaullienne, depuis qu’il s’est déclaré candidat, avançant que l’intérêt supérieur de la nation est en jeu. Kengo a la stature d’un homme d’Etat mais son assise partisane est modeste. Jean-Pierre Bemba, accusé en mai 2008 par la Cour pénale internationale de crimes contre l’humanité commis par ses troupes en Centrafrique, embourbé dans son procès au Tribunal de la Haye, est hors-jeu, mais, contrôlant le deuxième parti du pays, le MLC, il tente de peser dans le jeu des alliances.
3. UN SCRUTIN À HAUTS RISQUES
L’opposition acceptera-elle le verdict des urnes s’il lui est défavorable ? Rien n’est moins certain. Le lendemain du scrutin, la situation risque d’être très difficile. La victoire de Joseph Kabila pourrait laisser place à une vague de contestation qui sera difficile à contenir. Toutes les régions sont susceptibles de connaître des remous post-électoraux, tout particulièrement les provinces les plus sensibles : les deux Kivu en raison de la persistance du conflit, le Katanga la Province frondeuse, la Province orientale caractérisée par une forte insécurité et Kinshasa, la poudrière sociale. L’opposition congolaise a déjà fait montre de sa capacité mobilisatrice notamment à Kinshasa et Lubumbashi. Goma, Bukavu, Mbuji-Mayi et Kananga ne manqueront pas de soutenir une manifestation politique de l’opposition. Elle se préparerait déjà à contester les résultats. Sa stratégie est simple : dénoncer toutes les tentatives de tricheries et toutes les maladresses du pouvoir et de la CENI, multiplier les manifestations de rue et pousser le pouvoir à la faute en vue de le discréditer aux yeux de la population comme de l’étranger.
D’aucuns craignent que le Congo replonge dans la situation du début des années 1990 quand Mobutu au pouvoir, était placé dans l’incapacité de gouverner au point qu’il avait choisi d’aller vivre à Kawele loin des débordements politiques de l’opposition. Mobutu avait le contrôle de toute l’armée zaïroise. Ce qui n’est plus le cas avec le pouvoir actuel qui n’a pas le contrôle sur toutes les unités des forces de sécurité, dont certaines sont formées d’anciens groupes rebelles encore mal intégrés.
4. UN GOUVERNEMENT INTROUVABLE
Un Président sera élu, mal car avec probablement un score inférieur à 50%. Il devra alors hercher sa vraie légitimité dans une majorité parlementaire qui sera difficile à former. En effet, les législatives sont encore au scrutin proportionnel. Ce fut une victoire des députés contre le gouvernement qui tenta de réformer le code électoral en établissant un scrutin majoritaire et forcer ainsi le jeu politique à s’organiser autour de deux pôles. Le résultat des législatives se traduira certainement par l’émiettement du parlement dans divers courants, incapables de s’accorder sur un programme minimal de gouvernement. Il faudra au Président élu des semaines avant de former un gouvernement.
Les élections générales, provinciales, puis locales, qui devraient normalement, si les délais constitutionnels sont respectés, s’étaler de novembre 2011 à début 2013, peuvent-elles être l’occasion pour l’élite congolaise d’une prise de conscience des vrais défis politiques du pays et d’un engagement à “servir avant de se servir”, pour paraphraser Mobutu ? Pour la population, avec une dose de dépit, elles devraient être le moment de mesurer le fossé entre les promesses entendues lors des élections de 2006 et les réelles avancées enregistrées dans la reconstruction du pays.