Source: L’Expansion
25 ans après la dernière visite d’un souverain belge à Kinshasa, le roi des Belges Albert II y est depuis lundi pour assister mercredi 30 juin aux cérémonies du 50e anniversaire de l’indépendance de la République démocratique du Congo. Chercheur associé à l’Institut français des relations internationales et professeur de géopolitique des conflits à l’université catholique de Paris, Cyril Musila, revient pour Afrique Eco sur l’histoire chaotique de ce pays.
Le mercredi 30 juin, la République démocratique du Congo, ex-Congo belge, ex-Zaïre, fête le cinquantenaire de son indépendance, quel bilan en tirez-vous ?
Le bilan est très mitigé. Le pays est dés son indépendance marqué par des émeutes, suite à une mutinerie de l’armée. Après ce démarrage très tôt dans la violence, le pays est confronté à la tentative de sécession du Katanga et du Sud-Kasaï, les poumons économiques du pays. Cela dure 5 ans, avec entretemps l’assassinat de Patrice Lumumba. Cinq ans sans aucune construction, ni aucun investissement sur le plan économique. Il faut le rappeler, on ne prend pas la mesure du contexte dans lequel le pays s’engage dans l’indépendance. Au bout de quelques mois, le pays accueillent ses premiers soldats de l’Onu.
La RD Congo fête avec faste son demi-siècle d’indépendance
La République démocratique du Congo, ex-colonie belge, va fêter avec faste mercredi 30 juin, son demi-siècle d’indépendance, avec en point d’orgue un défilé militaire à Kinshasa auquel ont été invités quatre rois, dont celui de Belgique, 18 chefs d’Etats africains et le patron de l’ONU Ban Ki-moon. Depuis plusieurs semaines, la réfection de plusieurs grandes artères a paralysé le centre de la capitale et des opérations nettoyage ont été menées dans certains quartiers, surtout là où les invités de marque passeront à tout allure dans des voitures aux vitres fumées, escortées par des policiers et militaires, toutes sirènes hurlantes, très loin des quartiers populaires.
Le Zaïre a toutefois connu une période relativement faste ?
A partir de 1965, et le coup d’Etat, une nouvelle dynamique se met en place. On peut qu’à cette date la vraie indépendance commence. Le pays est dirigé par des Congolais, est aidé par Haïti qui fournit la main d’oeuvre intellectuelle, dont le pays a besoin. Dans les années 70, l’économie connaît un fort développement, avec une certaine stabilité politique, même si doucement la dictature se met en place avec notamment le parti unique. Jusqu’au coup de folie : la zaïrisation de l’économie. Toutes les entreprises détenues par des étrangers sont transférées à des congolais, qui n’ont pas les compétences. Cette mesure rompt la dynamique impulsée. En à peine deux ans, c’est la faillite générale. C’est le premier coup fatal à l’économie du pays.
Le pays s’écroule-t-il pour autant ?
Non. Pas tout de suite. L’économie étant largement minière, elle résiste au choc. Le pays produit aussi du café, du cacao, du bois, de l’huile de palme. Mais le choc pétrolier, la baisse des prix des matières premières entraîne le pays dans une dynamique d’endettement, puis d’ajustement structurel. En parallèle, la dictature s’est durcie et le pays vit au rythme des grèves, des révoltes d’étudiants. Un cocktail explosif qui va accompagner le pays jusqu’aux années 90. Le génocide rwandais et la guerre qui s’en suit à l’est du pays finissent de faire tomber le fragile édifice, déjà bien branlant.
Grande comme quatre fois la France, la République démocratique du Congo est-elle une nation ?
Quand on parle de la République démocratique du Congo, on a tendance à oublier la dimension culturelle. Au plus fort de la guerre civile, l’Est était coupée de l’Ouest. Tout était réuni pour une sécession d’une partie du pays. Mais cela n’a pas eu lieu. Les rebelles qui auront pu se bâtir des empires, avec les richesses minières qui vont avec, ont toujours cette tentation d’aller prendre Kinshasa. Mobutu a réussi à créer un sentiment d’unité national, que rien n’a réussi à rompre.
Propos recueillis par Benjamin Neumann