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-Le passage de 11 à 26 provinces, avec une autonomie administrative renforcée, doit être discuté devant le Parlement en début d’année. Une réforme imposée par la Constitution de 2006, mais jamais appliquée.
Véritable serpent de mer de la politique congolaise, la régionalisation de la République démocratique du Congo (RDC) se retrouve au programme de la session extraordinaire du parlement, qui vient de s’ouvrir pour un mois à Kinshasa. Prévue par la Constitution de 2006, la décentralisation n’est toujours pas appliquée… huit ans après. Le redécoupage territorial, avec un passage de 11 à 26 provinces, revient donc sur la table des deux chambres et devrait permettre de doter ces territoires d’une certaine autonomie. L’Assemblée nationale et le Sénat auront donc à « fixer les nouvelles limites des provinces, déterminer les modalités d’installation ainsi que leur organisation ».
Répartition des richesses
Dans l’idéal, ce projet de régionalisation ne possède que des vertus. Dans un pays-continent grand comme l’Europe occidentale, avec des provinces de la taille de la France ou de l’Italie, le législateur avait pour objectif de rapprocher les citoyens des administrations et d’accorder à ces régions une autonomie dans la gestion de ses ressources. Dans la pratique, cette décentralisation prévoit également une juste répartition des richesses. L’article 175 indique que « la part des recettes à caractère national allouée aux provinces est établie à 40% (…) et est retenue à la source » afin d’éviter de trop grandes disparités entre les provinces riches (Katanga, Kinshasa ou Bas-Congo) et les provinces pauvres comme le Maniema ou le Bandundu.
Provinces « utiles » et « inutiles »
En 2014, alors que la décentralisation n’est pas encore appliquée, le gouvernement central reverse au compte-goutte, des sommes bien inférieures aux 40% prévus par la Constitution. Par ailleurs, un fond de péréquation, censé compenser les disparités entre provinces riches et provinces pauvres, aurait déjà dû voir le jour, ce qui n’est pas le cas. Mais le principal obstacle à la réussite d’une telle réforme, tient dans la crainte de certaines provinces de se voir « amputer » de territoires riches en ressources naturelles. C’est le cas de la province minière du Katanga, véritable « coffre-fort » de la RDC, avec ses 10% des réserves mondiales en cuivre. Cette province risque d’être redécoupée en deux provinces agricoles et deux provinces minières. Il y aura désormais un Katanga « utile » minier et riche et un Katanga « inutile » agricole et plus pauvre. Un autre « charcutage » risque de poser problème dans l’actuel Bandundu, une province modeste adossée à Kinshasa. En redécoupant cette province en trois, certaines nouvelles entités sont jugées « non viables » (voir la carte).
Etat faible
Le futur texte sur la régionalisation qui doit être (normalement) débattu en janvier risque de se heurter à un réalisme cruel, qui fait de la République démocratique du Congo, en conflit permanent depuis 20 ans, une sorte de « Far-West » africain, qui peine déjà à asseoir un semblant d’autorité sur son territoire. Les maigres recettes de l’Etat arrivent difficilement à boucler un budget microscopique de 9 milliards de dollars (pour environ 70 millions d’habitants). Un rapport du FMI pointe l’incapacité des autorités congolaises à faire rentrer l’argent dans les caisses, alors que le taux de croissance frôle les 9% – voir notre article. Un expert international note que pour faire fonctionner la décentralisation, il faudrait dans les provinces des infrastructures pouvant accueillir les administrations provinciales : Assemblée, Gouvernement, tribunaux, parquets, douanes, services publics… ce qui n’est évidemment pas le cas et loin de l’être.
Carte électorale
Le dernier point de friction dans la mise en place de la décentralisation est politique. Certaines provinces refusent d’être rattachées à d’autres, pour des raisons financières essentiellement, mais aussi pour des raisons électorales. Le redécoupage du territoire, avec de nouveaux chefs-lieux, créé de nouveaux rapports de force politiques. Des barons locaux sont vent debout contre la réforme. Le président Joseph Kabila, en perte de vitesse dans l’Est et le Katanga, pourrait ainsi créer de nouvelles zones d’influences. Les deux Kasaï et l’Equateur, qui sont des provinces réputée proches de l’opposition (pro-Tshisekedi et pro-Bemba) se retrouveraient morcelés en 9 nouvelles provinces. La carte électorale s’en trouverait ainsi modifiée. La réforme territoriale constitue donc un dossier miné pour les parlementaires, qui pourraient une nouvelle fois botter en touche.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia