Par Mouta Wakilou Maurice GLIGLI-AMORIN Gilchrist Olympio et la lutte de libération du Togo, tel est le titre du chef d’œuvre du professeur de sociologie du développement de l’Université de Lomé au Togo, Essè Amouzou. La publication de ce livre, aux Editions L’Harmattan, peu avant l’élection présidentielle de mars 2010 au Togo, témoigne de la volonté du professeur Amouzou, entre autres objectifs, de retracer le parcours personnel de Gilchrist Olympio (page 21), de saisir, à la lumière de ses actes politiques face au régime de la dictature du RPT et du clan des Gnassingbé sa véritable stature politique. Dépassons les hommes qui firent, pour nous intéresser aux hommes que l’histoire fait. (Page 8). Un second but de l’ouvrage était la revisitation de l’histoire-tronquée du Togo par les véreux propagandistes du régime décadent en place, c’est-à-dire celui de Faure Gnassingbé et les thuriféraires du Rpt. Par soucis de clarté de son livre, l’auteur l’a structuré en quatre grandes parties auxquelles s’ajoute une dizaine de pages de bibliographie à la fin de son ouvrage. D’une manière générale, il est question dans ce livre du Togo, cette bande de terre oblongue- qui- voit après son indépendance, l’assassinat du président Olympio. Acte incongrue qui fera école dans toute l’Afrique. (Page 20). En effet, une des plus interessante approche de l’auteur se trouve dans la première partie du livre composée d’un seul chapitre et qui aborde la naissance, l’enfance et les années de formations de Gilchrist Olympio dans le contexte de l’époque. On ne lui connaît aucune vie militante au cours de ses études. Même si l’activisme féconde des milieux estudiantins noirs ne pouvait échapper au jeune Olympio, il ne s’engagea véritablement pas dans une aucune tendance, conciliant son goût pour la philosophie à un pragmatisme perspicace qui l’éloigna des discours oniriques. Ses plus vivants souvenirs de cette période se portent plutôt sur le cadre académique. (Page 44) Du livre du sociologue, deux remarques essentielles s’imposent. Primo, la partie consacrée à l’histoire du Togo, riche en enseignements, peut-être conseillée et recommandée à toute bonne volonté curieuse et soucieuse de découvrir le Togo et sa lutte épique contre le colonisateur. Il va de soi que c’est une importante contribution dans la réécriture de l’histoire du Togo. Secundo, dans la tentative du professeur Amouzou de consacrer à tout prix, Gilchrist Olympio, « leader historique et charismatique », l’auteur l'insère au cœur de toutes les luttes menées depuis la nuit des temps par les patriotes et démocrates togolais pour mettre fin à la colonisation, et à son relais, la dictature. Alors que le jeune Gilchrist coulait une enfance paisible entre le Togo et le Ghana, la conscience du Togo s’aiguisait à l’aune du contexte historique international. (Page 35). Cette assertion est sujette à caution pour plusieurs raisons : avant Gilchrist Olympio, le peuple togolais du Nord au Sud s’est toujours mobilisé pour lutter contre l’occupant colonial à travers diverses manifestations jusqu’à l’arrachement de l’indépendance du Togo. Puisque dès la réunion de Lomé des 11 et 12 mai 1945, réplique de la Conférence de Brazzaville de 1944, les nationalistes togolais affichèrent leur volonté de se libérer définitivement de la tutelle française. (Page 35). Gilchrist n’avait que 9 ans. S'il est vrai qu’avec Gilchrist Olympio, les Togolais ont fait un bout de chemin de combat contre la dictature, aujourd’hui point n’est besoin de collaborer avec ce même régime, mais d’avoir un sursaut patriotique pour libérer ce pays du joug du régime RPT en complicité avec les puissances occidentales. Page( 273). Ce sont là un des propos recueillis en fin d’ouvrage d’un entretien de certains chefs traditionnels avec l’auteur. La preuve de notre critique trouve sa raison dans la précision du professeur Amouzou sur le fait qui saute aux yeux, même des aveugles que le soi-disant charismatique Gilchrist Olympio n’a rejoint le rang des combattants qu’après avoir quitté ses fonctions en 1970…..il se lance plutôt dans une carrière internationale au sein des multinationales, une situation lui permettant d’observer de près le drame politique de son pays...(Page 86). Seize années après l’assassinat du président Olympio, Gilchrist sorti de sa léthargie crée en janvier 1979, le MTD (Mouvement Togolais pour la Démocratie) avec son acolyte Elliot Ohin, aujourd’hui ministre du gouvernement scélérat qu’ils combattirent des années durant. Entre autres membres fondateurs du MTD, l’auteur cite également Yves Dogbé Emmanuel, Aurélien Ayité, Eric Amerding, gendre du défunt Sylvanus Olympio. Eric Amerding débuta à proprement parler de travailler en commun avec Gilchrist Olympio dès le 15 janvier 1963 à Agoué au Bénin lors des funérailles du Président Olympio. (Page 71). Dès lors, il apparaît, clairement que la cogérance du gouvernement Rpt-Ago est une imposture que les Togolais continueront de combattre jusqu'à l’arrachement de leur liberté de la main du clan des Gnassingbé à la solde de France. Par ailleurs, si aujourd’hui, les images du drame togolais demeurent gravées dans la mémoire de Gilchrist Olympio, autant que les cicatrices faites dans sa chair par des mains criminelles dont les traces lui rappellent une évidence terrible : le peuple togolais demeure encore la proie d’une meute politique que le pouvoir a depuis longtemps quittée mais qui se maintient par la violence (Page 124-125), l’ex- leader ne devait jamais accepter une « Kollaboration » avec ses ennemis. C’est là, la preuve de son imposture politique qui s’est faite jour peu de temps après la parution élogieuse de l’ouvrage du Prof, Essè Amouzou. Nous voyions de loin un géant arriver qui s’est révelé être un nais. Si le combat de Gilchrist pour la libération du peuple togolais ne se situait pas dans une ligne héréditaire directe de père en fils dans le sang du peuple togolais comme celle de Faure Gnassingbé, il va de soi que le premier en rejoignant le second, se confond avec lui. En définitive, légitimement on peut interpeller vivement Gilchrist Olympio sur sa réelle vision du Togo ; qu’il réponde d’innombrables Togolais qui se sont sacrifiés pour l’avènement d’un Togo libre et démocratique parfois autour de lui-même. En outre, dans la quatrième partie du livre, l’auteur donne la parole aux différentes catégories sociales de la société togolaise, tout âge confondu. Sur la lexicologie, il y a lieu de souligner que plusieurs noms cités dans le livre sont écornés. En guise de conclusion, reprenons ce passage du livre : Dépassons les hommes qui firent, pour nous intéresser aux hommes que l’histoire fait. (Page 8). A la lumière de l’actualité togolaise, il apparait que c’est l’histoire qui a fait Gilchrist et non le contraire tout comme Faure Gnassingbé : on n’a pas le mérite de sa naissance, on a le mérite de ses actions. Gilchrist, au lieu d’assumer jusqu’au bout avec dignité et honneur et fierté, le précieux héritage à lui légué par les nationalistes togolais dont son feu père Sylvanus Olympio, s’est contenté de le brader à Faure Gnassingbé, un autre héritier usurpateur arrivé au pouvoir sur les cadavres de centaines de Togolais. Et tout cela, l’histoire ne l’oublie pas et ne lui pardonne point ! Notes de lecture tirées du livre Gilchrist Olympio et la lutte de libération du Togo Esse Amouzou- Editons L’Harmattan 2010 Bruxelles, ce 21 novembre 2011 Mouta Wakilou Maurice GLIGLI-AMORIN http://gliglimouta.afrikblog.com/