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-Lors du premier sommet Etats-Unis / Afrique qui se déroule du 4 au 6 août à Washington, l’un des principaux sujets de débat sera l’AGOA. L’accord de libre-échange entre les Etats-Unis et l’Afrique arrive à échéance dans un an. Les pays d’Afrique demandent un renouvellement pour quinze ans. La décision appartient au Congrès. Plus généralement, les pays africains estiment que l’Amérique ne s’intéresse pas beaucoup au continent, sauf lors des crises. Interrogé par RFI, Herman Cohen, ancien secrétaire d’Etat américain chargé de l’Afrique, estime que la situation évolue lentement et que le climat des affaires sur le continent africain est responsable de cette frilosité.
Herman Cohen : Bien entendu, les grandes sociétés qui cherchent du pétrole, des gisements ou des minerais doivent aller en Afrique, parce qu’il faut aller là où cela existe, n’est-ce pas ? Par contre, pour ce qui est des autres investissements, les sociétés américaines s’y intéressent mais se sont découragées. En effet, l’ambiance n’est pas bonne pour le secteur privé.
RFI : Mais il y a cinquante-quatre pays en Afrique. L’Etat de droit n’existe peut-être pas dans tous les pays mais on fait face à des situations extrêmement différentes.
Vous avez tout à fait raison et si vous regardez où se trouvent les sociétés américaines – celles qui ne sont pas dans le pétrole, bien-sûr – qui investissent dans les usines ou encore dans la valeur ajoutée, elles se trouvent en Afrique du Sud, au Botswana, en Zambie, au Kenya et, maintenant, au Ghana. Par conséquent, on peut avoir confiance en ces pays-là mais pour d’autres, c’est toujours difficile.
Vous n’avez pas cité un seul pays d’Afrique francophone. Y a-t-il un problème particulier en Afrique francophone ?
Non. Je suis consultant pour une société à New York qui investit dans les centrales électriques et qui se trouve au Togo. Lors du sommet, nous allons signer un contrat avec le Sénégal pour l’installation d’une centrale électrique à Dakar. Aussi, l’Afrique francophone commence à être connue des Américains.
Concernant le Congo, vous avez publiquement pris position contre la modification des Constitutions en Afrique, comme d’ailleurs le secrétaire d’Etat américain, John Kerry. Est-ce que vous renouvelez ce conseil, cet appel aux dirigeants africains ?
Oui. Chez nous, lorsque nous changeons la Constitution, que ce soit pour les salaires, pour les mandats ou pour autre chose, c’est toujours en vue du prochain président et non pas du président en exercice, car il pourrait en bénéficier. Aussi, nous conseillons, pour avoir une vraie démocratie, de changer la Constitution pour l’avenir et non pas pour les gens qui sont au pouvoir maintenant.
Comment se fait-il que certains pays africains qui ont énormément de ressources soient toujours en voie de développement et, malgré une croissance très forte, n’arrivent pas à émerger ?
Le problème, c’est le manque d’investissements et, pour les investisseurs, le problème c’est l’ambiance, l’environnement. Et je ne parle pas des investisseurs étrangers, je parle des investisseurs africains. Que font les Africains avec leur argent ? Selon la Banque mondiale, il y a 900 milliards de dollars envoyés par les Africains de l’étranger laissés dans les banques. Je parle de l’argent légitime et non pas de l’argent volé. Cela veut donc dire que les Africains gagnent de l’argent et qu’ils l’envoient à l’extérieur, parce qu’ils ont peur d’investir dans leur propre pays. C’est cela le grand drame de l’Afrique.
Comment faire ? Est-ce qu’il y a une préconisation pour essayer de remédier à ce problème ?
Oui. Les gouvernements doivent faire en sorte que les investissements des Africains eux-mêmes sont les bienvenus. Regardez les entrepreneurs africains qui sont riches, ces derniers sont tous très liés au pouvoir politique. Les autres n’ont rien. S’ils investissent ou bien s’ils créent des entreprises, ils sont tout de suite harcelés par le fisc et tous les autres gens du gouvernement. J’ai l’impression que le pouvoir a peur de l’investissement africain indépendant, comme si c’était un danger pour le pouvoir. Il faut changer cette mentalité. En Asie, où ils ont avancé beaucoup plus rapidement que l’Afrique, l’homme d’affaires est le partenaire, en développement, de l’homme politique. En Afrique, l’homme d’affaires indépendant, c’est l’ennemi du pouvoir. Il faut changer cette mentalité.
rfi