Dimanche 4 novembre, trois personnalités de l’opposition chiite au Bahreïn, dont le chef du mouvement Al-Wefaq Cheikh Ali Salmane, ont été condamnées en appel à la prison à perpétuité pour avoir transmis des informations confidentielles au Qatar, pays boycotté par Manama et d’autres alliés de l’Arabie saoudite.
Ils avaient été acquittés en juin par la haute cour pénale de Bahreïn, pays dirigé par une monarchie sunnite. Le procureur général avait, néanmoins, interjeté appel.
Le jugement de dimanche peut encore faire l’objet d’un recours.
Une « parodie de justice »
Ali Salmane avait été inculpé il y a un an « d’intelligence avec l’Etat du Qatar en vue de commettre des actions hostiles dans le but de nuire à la position politique et économique du royaume de Bahreïn, de renverser son régime et de dévoiler ses secrets défense ».
Il avait été également accusé d’« avoir reçu d’un Etat étranger [le Qatar] des sommes d’argent en contrepartie de la transmission d’informations concernant des secrets militaires et la situation générale dans le pays ».
« Ce verdict est une parodie de justice qui illustre les efforts constants et illégaux des autorités bahreïnies pour réduire au silence toute forme de dissidence », a accusé Amnesty International.
« Le cheikh Ali Salmane est un prisonnier de conscience qui est détenu seulement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression », a ajouté l’ONG de défense des droits de l’homme.
Le Qatar sous embargo
Cette inculpation était intervenue après l’embargo décrété le 5 juin 2017 contre le Qatar par l’Arabie saoudite et ses alliés, l’Egypte, les Emirats et Bahreïn.
Les quatre pays accusent le Qatar de soutenir des mouvements « terroristes » (ce que Doha dément), de se rapprocher de l’Iran et de saper la stabilité de la région.
La seule frontière terrestre de la petite nation péninsulaire avait alors été fermée, sa compagnie aérienne publique interdite d’emprunter l’espace aérien des pays voisins, et ses citoyens expulsés de ces mêmes pays.
Depuis plusieurs mois, le régime saoudien entretient également le flou autour d’un projet de canal maritime, percé parallèlement à sa frontière avec le Qatar, qui transformerait de facto l’émirat en île.
Arrêté dès 2014, Cheikh Ali Salmane purge, par ailleurs, actuellement une peine de prison pour « incitation à la haine confessionnelle ».
Le royaume de Bahreïn, siège de la Ve Flotte des Etats-Unis et proche allié de Washington, avait alors écrasé dans le sang un mouvement de contestation chiite qui réclamait des réformes dans la foulée du « printemps arabe ».
Des centaines d’opposants ont été emprisonnés depuis et certains ont été déchus de leur nationalité.
Les campagnes contre George Soros, accusé d’incarner la finance mondialisée et d’encourager les flux d’immigration, alimentent de plus en plus de passages à l’acte antisémite.
Campagne d’affiches du gouvernement hongrois contre Soros en 2017
L’attaque du 27 octobre contre une synagogue de Pittsburgh est, avec 11 morts, l’attentat antisémite le plus meurtrier de l’histoire des Etats-Unis. De nombreuses voix se sont élevées depuis pour dénoncer le climat de haine entretenu par Donald Trump, surtout dans ses attaques obsessionnelles contre George Soros, un des plus solides soutiens financiers du parti démocrate. « Quand il dit Soros, c’est un code pour désigner les Juifs. Quand il dit ‘globalisme’ aussi. Par ses propos, il alimente les antisémites », affirme Joy Katz, écrivaine juive de Pittsburgh. Quant à Maurice Samuels, professeur à Yale, il accuse Trump de « répercuter (ou retweeter) de façon routinière les théories conspirationnistes d’extrême-droite, dont beaucoup concernent George Soros, qui offre un symbole bien pratique des Juifs contrôlant les marchés financiers, la politique et la presse. Une notion qui constitue le fond de commerce du discours antisémite depuis ‘Les Protocoles des Sages de Sion‘ ».
LA DENONCIATION OBSESSIONNELLE DE SOROS
Soros a de fait été le premier destinataire de colis piégés dans la vague qui a visé récemment aux Etats-Unis des personnalités identifiées au Parti démocrate. Il est la cible de violentes campagnes des médias acquis à Trump qui l’accusent d’encourager les flux de réfugiés vers les Etats-Unis. Le tueur de Pittsburgh associait d’ailleurs la communauté juive qu’il a visée et la menace des « envahisseurs »que seraient selon lui les réfugiés. Mais c’est pourtant dans le pays natal de Soros, la Hongrie, que les attaques les plus systématiques ont été lancées par le gouvernement du très populiste Viktor Orban, au pouvoir depuis 2010. A l’été 2017, des affiches géantes sont placardées dans tout le pays (voir ci-dessus), avec, à côté de la photo du milliardaire américain, ce slogan: « 99% des Hongrois sont contre les immigrants. Ne laissons pas Soros rire le dernier ».
L’ambassadeur d’Israël à Budapest proteste contre une campagne qui « évoque non seulement de tristes souvenirs, mais sème la haine et la peur ». Il en faudrait plus pour dissuader Orban: le 15 mars 2018, à l’occasion de la Fête nationale, il se déchaîne contre « le réseau des ONG financées par les spéculateurs internationaux, englobé et incarné dans la personne de George Soros ». Le Premier ministre hongrois dénonce ce « réseau international structuré en empire » qui oeuvrerait à remplacer par des immigrés la population de souche européenne. Il fustige « un adversaire qui est différent de nous. Il n’agit pas ouvertement, mais caché, il n’est pas droit, mais tortueux, il n’est pas national, mais international, il ne croit pas dans le travail, mais spécule avec l’argent, il n’a pas de patrie, parce qu’il croit que le monde entier est à lui ». En remportant les législatives du 8 avril avec 48,8% des voix pour son parti, Orban démontre qu’un discours aussi virulent est payant électoralement. Peu après, Open Society, la fondation animée par Soros, transfère à Berlin la gestion des programmes jusqu’alors assurée depuis Budapest.
L’HEURE DE VERITE POUR NETANYAHOU?
Nétanyahou se vante d’avoir été le premier dirigeant étranger à féliciter Orban de son récent triomphe électoral. Il avait auparavant désavoué les critiques de la campagne anti-Soros par son ambassadeur en Hongrie. Car le Premier ministre israélien accuse le philanthrope américain « de porter atteinte aux gouvernements israéliens démocratiquement élus en finançant des organisations qui diffament l’Etat juif ». Open society soutient en effet des organisations israéliennes de défense des droits de l’homme dont Nétanyahou veut brider l’action et la communication. Le chef du gouvernement israélien a également rendu Soros responsable, en avril dernier, de l’échec d’un accord de transfert des « infiltrés » africains en Israël vers le Rwanda (le terme « infiltrés » désigne officiellement en Israël les immigrants illégaux, majoritairement originaires d’Erythrée et du Soudan). Nétanyahou et Soros s’étaient de surcroît retrouvés, en politique américaine, dans des camps diamétralement opposés, celui-ci soutenant Obama contre McCain en 2008, puis Romney en 2012, celui-là savourant enfin sa revanche avec l’élection de Trump en 2016. Sur un plan anecdotique, Yair Netanyahou, le fils aîné du Premier ministre, avait suscité la polémique en Israël, en relayant en 2017, une caricature de Soros tenant le monde entier au bout d’une canne à pêche.
Le chef du gouvernement israélien a, à l’évidence, été choqué par la tuerie de Pittsburgh, perpétrée dans cette Pennsylvanie où il a lui-même passé une grande partie de son adolescence. Il a réagi avec émotion et sur-le-champ à ce drame, là où il avait mis trois longs jours à condamner, en août 2017, les débordements antisémites de Charlottesville. Il avait aussi invité en mai 2018, pour le transfert de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem, des prêcheurs américains aux nombreux dérapages antisémites. Ce geste s’inscrit dans une stratégie d’alliance de la droite dure en Israël avec un courant évangélique aux accents messianiques, courant dont l’ascension politique suscite pourtant le trouble au sein de la diaspora juive. La décision du président Bolsonaro, à peine élu, de transférer l’ambassade du Brésil à Jérusalem ne peut que conforter Nétanyahou dans cette stratégie. Il est dès lors peu probable, même après Pittsburgh, que le Premier ministre israélien cesse de poursuivre Soros de sa vindicte et de miser, sur le continent américain comme en Europe, sur des populismes agressifs.
La France « ne met rien sous le tapis » sur le sujet des droits de l’homme au Vietnam communiste.
En visite dans le pays, le premier ministre français, Edouard Philippe, a affirmé ce dimanche 4 novembre que le sujet était abordé « dans les forums qui vont bien, de la façon dont nous avons toujours procédé ».
Selon une source proche des discussions, la question des droits de l’homme a été abordée « dans le cadre des entretiens » entre Edouard Philippe et les dirigeants vietnamiens vendredi, au premier jour de sa visite. « L’attention des autorités vietnamiennes a été appelée sur une liste de cas individuels », a précisé cette source à l’AFP.
Une centaine de prisonniers politiques
Le Vietnam, qui ne compte aucun média indépendant et est dominé par les communistes conservateurs depuis 2016, s’est doté d’une nouvelle loi sur la cybersécurité qui limite encore davantage la liberté d’expression.
Le texte, qui entrera en vigueur en janvier 2019, oblige les plates-formes du Web à retirer tout commentaire considéré comme une « menace à la sécurité nationale » et à stocker les informations personnelles et les données des utilisateurs.
Une centaine de personnes ont été emprisonnées en 2017 pour des raisons politiques, d’après Amnesty International, et une cinquantaine de militants et blogueurs ont déjà été condamnés cette année, selon un décompte de l’AFP.
Les groupes de défense des droits de l’homme craignent que la répression s’accélère avec l’arrivée à la présidence du pays du secrétaire du Parti communiste, Nguyen Phu Trong.
Visite à Dien Bien Phu
Edouard Philippe devait quitter le Vietnam dimanche soir au terme d’une visite qui l’a vu décrocher pour dix milliards d’euros de contrats et accords commerciaux, dont 5,7 milliards pour l’avionneur européen Airbus.
Samedi, il s’était rendu sur le site de Dien Bien Phu pour honorer la mémoire des soldats français et vietnamiens de la guerre d’Indochine. « Il me semblait qu’il était utile de regarder notre passé commun de façon apaisée », a-t-il alors dit.
C’est la deuxième fois seulement depuis la terrible bataille de 1954 qu’un haut responsable français se rend sur le site de Dien Bien Phu.
Il y a eu Donald Trump et Rodrigo Duterte en 2016, l’Autrichien Sebastian Kurz et son allié du FPÖ Heinz-Christian Strache en 2017, enfin le duo italien Matteo Salvini-Luigi Di Maio et le Brésilien Jair Bolsonaro en 2018. Tous sont qualifiés de populistes, à la fois par leurs adversaires et par la presse – et parfois revendiquent eux-mêmes le qualificatif. De quoi parle-t-on ? Le « populisme » est qualifié d’« attitude politique consistant à se réclamer du peuple », selon la définition du dictionnaire Larousse.
Tous ces dirigeants sont arrivés au pouvoir en remportant une élection à l’issue d’une campagne où ils ont opposé le peuple contre les élites politiques ou économiques. Pourtant, ces traits communs masquent d’énormes disparités entre leurs idéologies. « Le mot “populisme” mis à toutes les sauces perd toute signification et empêche tout diagnostic pertinent », disait à juste titre le sociologue Edgar Morin en avril 2013.
On trouvera par exemple des interventionnistes libéraux, des climatosceptiques religieux, des xénophobes adeptes du libre-échange et de l’interventionnisme économique ou même un ancien militaire antisystème soutenu à la fois par les églises, les milieux économiques et l’armée. Et pourtant, ces personnalités politiques font bien œuvre de populisme, « c’est-à-dire suscitent et activent les passions les plus négatives, et même les plus perverses pour étendre leur audience et entretenir leurs troupes », écrit le philosophe et professeur à l’université Paris Descartes Yves Charles Zarka. L’auteur décrit la liste des éléments que l’on retrouve dans tous ces discours, pour que « la justice, la prospérité et le bonheur soient restaurés » :
la fabrication de boucs émissaires ;
des « promesses d’autant plus exorbitantes que les moyens élaborés pour les satisfaire sont indigents » ;
la désignation d’un « ennemi à attaquer ou à détruire ».
Des points communs qui ne définissent en rien la politique qu’ils mènent ou comptent mener. Pour y voir plus clair, dans l’infographie suivante, nous avons sélectionné huit thèmes politiques majeurs et nous avons tenté de les placer sur un axe les uns par rapport aux autres :
l’exercice du pouvoir : concentré ou partagé avec les autres institutions ;
l’environnement : plus ou moins d’écologie ;
les sujets de société liés à la famille ou aux minorités : conservatisme ou libéralisme ;
l’économie : de libéral comme Bolsonaro à interventionniste comme Orban ;
la protection sociale : avec plus ou moins d’aides ;
l’immigration : favorable ou défavorable à l’accueil ;
le rôle de la religion dans la définition de la politique : important chez Erdogan ou faible chez Duterte ;
le commerce international : de protectionniste à favorable au libre-échange.
Cette infographie présente le positionnement politique de onze personnalités qualifiées de populistes dont plusieurs gouvernent ensemble : en l’occurrence en Autriche et en Italie. Chaque cercle est placé sur une réglette qui compare les dirigeants entre eux, sur huit thématiques.
Passez votre sourisTapez du doigt sur les bulles pour afficher le détail.
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MÉTHODOLOGIE
Comparer les populismes : comment nous avons travaillé
Pour mettre sur pied cette infographie, nous avons essayé de comparer entre eux des dirigeants politiques élus régulièrement qualifiés de « populistes ». Nous avons ensuite repris leurs déclarations, leurs programmes ou les mesures qu’ils ont prises pour les placer sur un axe qui va d’une position extrême à son opposé.
Nous avons choisi ces dirigeants selon deux critères : le fait qu’ils sont emblématiques et qu’ils ont accédé au pouvoir suprême dans les années 2010. Ainsi par exemple, même si Recep Tayyip Erdogan a occupé d’autres postes, il n’est président de la République de Turquie que depuis 2014. Sept sur onze sont arrivés au pouvoir depuis 2017, dont un – le Brésilien Jair Bolsonaro – n’accédera au pouvoir qu’en janvier 2019.
C’est une tentative dont la teneur est potentiellement subjective : c’est le fruit d’un travail collectif pour lequel nous avons pris le soin d’expliquer pour chaque position pourquoi tel ou tel homme politique se retrouvait à cette place et pas à une autre.
Un militaire américain a été tué, samedi 3 novembre à Kaboul, dans une attaque semble-t-il commise par un soldat afghan qui a été aussitôt abattu, a indiqué l’OTAN dans un communiqué.
« Selon les premières informations, l’assaillant était un membre des forces afghanes de défense et de sécurité », indique un communiqué de la mission Resolute Support de l’Alliance atlantique. Il a été abattu par « d’autres militaires afghans », selon le texte.
Un autre militaire américain, blessé, a été transféré à la base militaire de Bagram pour y être soigné. Son état est jugé « stable ». Une enquête a été ouverte sur l’épisode, le troisième de ce type en moins de trois semaines dans le pays.
Plus de 2 000 soldats américains tués
Les talibans avaient revendiqué deux autres attaques similaires survenues en octobre dans les provinces de Hérat et Kandahar. Lors de cette dernière, le chef de la police de Kandahar et le chef provincial du renseignement afghan avaient été tués, tandis que le général américain Jeffrey Smiley avait été blessé par balles. Le chef de l’armée américaine et de l’OTAN en Afghanistan, le général Scott Miller, présent sur les lieux, avait réchappé aux tirs.
Plus de 2 000 soldats américains ont perdu la vie en Afghanistan depuis le début de la guerre en 2001. Avec 14 000 militaires, les Américains composent encore aujourd’hui la plus grande partie de la mission Resolute Support qui vise à soutenir et former l’armée afghane.
Dans un communiqué publié par le ministère russe des affaires étrangères, on apprenait samedi que le gouvernement afghan et le mouvement des talibans seraient tous deux représentés lors d’une rencontre internationale sur l’Afghanistan qui se tiendra en Russie le 9 novembre.
Les établissements à dimension internationale craignent les difficultés à recruter des enseignants étrangers et les refus de visas pour leurs élèves.
Par Adeline FargePublié aujourd’hui à 16h00, mis à jour à 16h00
Lecture 5 min.
Bordée par la Tamise, Oxford, écrin de la plus prestigieuse université britannique, émerveille depuis des siècles les meilleurs élèves. Même un dimanche, le tumulte des bars et les groupes d’étudiants s’apostrophant dans toutes les langues à travers les ruelles pavées confirment que la ville aux clochers rêveurs est la cité universitaire internationale par excellence. Ses collèges à l’architecture néogothique accueillent près de 32 000 étudiants du monde entier.
« Bouillonnement culturel »
C’est dans cette ambiance cosmopolite, à 90 kilomètres de Londres, que Margot a choisi de booster son CV à l’EM Normandie, seule école française à disposer d’un campus sur place. « J’ai été attirée par le bouillonnement culturel de cette ville à taille humaine. En dehors des cours, nous pouvons assister aux conférences organisées par les collèges réputés d’Oxford et nous impliquer dans des projets académiques ou associatifs. Ces évènements sont l’occasion de se créer un réseau professionnel à l’étranger », explique l’étudiante, qui souhaite créer sa startup après son M2 en banque, finance et FinTech.
« Faute de recevoir son visa dans les délais, une candidate a renoncé à son projet d’étudier au Royaume-Uni. » Jean-Guy Bernard, directeur général de l’EM Normandie
Pourtant, depuis le référendum du 23 juin 2016, une épée de Damoclès plane au-dessus de la communauté universitaire, qui a rejeté d’un bloc le Brexit. Si les modalités de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne restent floues, les restrictions migratoires risquent de freiner la venue des étudiants et de leurs enseignants. Jusqu’ici, avec la libre circulation, une carte d’identité suffit aux Européens pour étudier et travailler Outre-Manche. Mais il n’est pas exclu que des permis de séjour et des visas soient exigés à l’avenir.
« Pour l’instant, ce qui nous inquiète, ce sont les difficultés subies par les étudiants internationaux, raconte Jean-Guy Bernard, directeur général de l’EM Normandie. Les procédures d’octroi des visas sont devenues plus compliquées. Faute de recevoir ce document dans les délais, une candidate a renoncé à son projet d’étudier au Royaume-Uni. »
Implantée près du quartier historique d’Oxford sur un campus moderne de 600 m2, l’école a aussi rencontré des déboires pour recruter à la rentrée un professeur indien spécialisé en logistique. « Etant considérés comme une association française, nous ne pouvons embaucher que des Français et des Anglais. Finalement, nous n’avons pas reçu les autorisations nécessaires », détaille Hendrik Lohse, directeur des campus d’Oxford et de Dublin de l’EM Normandie.
« Plutôt que de voir nos locaux londoniens se vider, nous avons préféré ouvrir un campus à Berlin. » Jean-François Fiorina, directeur adjoint
Pour continuer d’accueillir ses 200 étudiants du programme grande école et diversifier ses recrutements, la business school française a décidé de créer une société à statut juridique anglais. Cette démarche lui permettra d’ici à deux ans de décrocher auprès du ministère de l’intérieur les licences Tier II et IV, accréditations facilitant l’obtention des visas et les embauches des enseignants étrangers.
En se transformant en filiale britannique, l’EMN Oxford aura les mêmes droits qu’une université locale. « Jusqu’à présent, nous pouvions opérer nos activités d’enseignement depuis la France. Mais il devient nécessaire, avec la sortie du marché commun, de faire reconnaître notre existence en Grande-Bretagne. Notre responsabilité est de prendre des précautions juridiques pour sécuriser nos activités », justifie Hendrik Lohse.
Fermetures de campus
Si l’EM Normandie envisage de s’installer durablement dans le paysage universitaire britannique, d’autres ont préféré, face aux incertitudes, plier bagage. Ainsi de Grenoble Ecole de management, qui a fermé en 2017 son établissement de Londres : « Le Brexit a détourné de cette destination les étudiants, indique Jean-François Fiorina, directeur adjoint. Plutôt que de voir nos locaux londoniens se vider, nous avons préféré limiter notre présence en Angleterre et ouvrir un campus à Berlin. Avec sa dimension internationale et son esprit startup, cette ville “matchait” avec nos critères. »
L’ESCP Europe, qui accueille un millier d’étudiants sur son campus londonien, n’envisage pas pour sa part de cesser ses programmes d’enseignement Outre-Manche. « Même en cas de Brexit dur, le Royaume-Uni continuera à entretenir des relations avec le reste de l’Europe. Il sera donc toujours nécessaire de comprendre le fonctionnement de ses entreprises et de son marché financier. En étant sur place, nous allons devenir un pont entre le Royaume-Uni et l’Union européenne », analyse Frank Bournois, directeur général de l’école parisienne.
Les barrières administratives ne sont pas la seule cause du désamour possible. Certains craignent aussi qu’après 2020 les institutions universitaires alignent leurs frais de scolarité sur ceux acquittés par les étudiants étrangers, ce qui reviendrait à doubler leurs droits. « La Grande-Bretagne a perdu de son attractivité. Nos élèves redoutent que, sur place, les débuts de carrière soient moins évidents et les opportunités moins intéressantes. Ils préfèrent désormais vivre une expérience internationale dans d’autres destinations anglophones », remarque Anne-Catherine Guitard, directrice des opérations et des relations internationales de Kedge Business School.
Partenariats innovants
Pour proposer des séjours d’échanges académiques et des doubles diplômes ailleurs sur le Vieux Continent, des partenariats ont été noués avec des écoles de commerce en Suède et aux Pays-Bas. Toujours pour éviter à ses ouailles de traverser la Manche, Kedge prévoit de co-construire et de dispenser sur son campus parisien des formations avec la Britannique Aston Business School, de Birmingham, en parallèle des activités de recherche communes menées en France.
Le Brexit est ainsi l’occasion d’inventer de nouvelles coopérations avec des institutions académiques soucieuses de sortir de leur isolement et d’accéder aux financements européens. En 2017, la communauté d’universités et d’établissements Paris-Seine, incluant l’Essec, a invité ses homologues britanniques à s’installer sur le futur campus international de Cergy-Pontoise. « Avoir ces partenaires reconnus sur notre territoire nous permettra de collaborer en échappant aux contraintes du Brexit, espère Vincenzo Vinzi, directeur général de l’Essec. Nous souhaitons nous enrichir de leurs compétences académiques, scientifiques et technologiques. »
Les écoles de commerce françaises ont tout intérêt à faire valoir leurs atouts si elles veulent profiter des retombées du Brexit. C’est notamment l’opportunité de puiser dans le vivier d’étudiants internationaux et d’enseignants-chercheurs qui fuient le Royaume-Uni. « Chaque semaine, nous recevons deux ou trois candidatures de Grande-Bretagne. Ce sont des profils intégrés dans le milieu universitaire qui n’auraient pas postulé chez nous auparavant, souligne Jean-François Fiorina. Mais désormais, ils s’inquiètent pour leur avenir professionnel et ils cherchent à assurer leurs arrières. Attirer ces talents améliorera la qualité et la notoriété de nos formations. »
« Le Monde » organise son Salon des grandes écoles les 10 et 11 novembre
La 13e édition du Salon des grandes écoles (SaGE) aura lieu samedi 10 et dimanche 11 novembre à Paris, aux Docks, Cité de la mode et du design (13e arrondissement), de 10 heures à 18 heures.
Plus de cent cinquante écoles de commerce, d’ingénieurs, IAE, IEP, écoles spécialisées et prépas y seront représentées, permettant d’échanger sur les différents programmes et leur accessibilité (post-bac, post-prépa ou après un bac + 2, + 3 ou + 4). Lycéens, étudiants et parents pourront également assister à des conférences thématiques animées par des journalistes du Monde Campus. Une équipe de vingt « coachs » pourra également conseiller lycéens, étudiants et parents pour définir leur projet d’orientation, préparer les concours ou rédiger leur CV.
L’entrée en sera gratuite, la est conseillée pour accéder plus rapidement au Salon. Liste des exposants et informations pratiques sont à retrouver sur le site Internet du SaGE.
Le Bureau du recensement américain ainsi que les principaux centres de recherche annoncent régulièrement « la fin de l’Amérique blanche », nourrissant depuis quelques années une anxiété de fond dans le pays. Aux Etats-Unis, les Blancs non hispaniques deviendront minoritaires dans la population en 2045, et dans la population en âge de voter en 2052. Cette « fin » s’explique par l’essor des minorités, surtout hispanique et asiatique. Cette angoisse identitaire n’est pas sans effets. Le vote pour Trump a été en partie motivé par la volonté d’enrayer cette tendance lourde de la démographie américaine. Le rêve d’un projet de restauration d’une grandeur passée, réelle ou supposée, a encore de beaux jours devant lui.
Baisse du poids démographique des Blancs
Population américaine, selon la communauté ou selon l’origine
Une perception « faussée » d’un déclin économique
Crise sociale et pessimisme pour l’avenir
des Américains de la classe ouvrière blanche estiment que leur culture et leur mode de vie se sont détériorés depuis 1950.
7 Américains sur 10
de la classe ouvrière blanche (68 %) – 55 % pour l’ensemble des Américains – estiment que les Etats-Unis risquent de perdre leur culture et leur identité.
des Américains de la classe ouvrière blanche pensent que les meilleurs jours de l’Amérique appartiennent au passé.
Un sentiment de déclin des Blancs qui se traduit dans un vote pro-Trump
Le sentiment de déclin dont s’est emparé Donald Trump ne semble pas près de disparaître. Des pans entiers de l’industrie ont été démantelés, les institutions traditionnelles se sont affaiblies, tandis que l’intérêt de l’opinion s’est focalisé sur la célébrité et la richesse, deux valeurs aujourd’hui idolâtrées, écrit le journaliste et écrivain George Packer.
Etat où Trump a renforcé la part du vote républicain, lors de l’élection présidentielle de 2016, en %
Rust Belt (« ceinture de Rouille »)
Repli identitaire et remise en cause du récit national
Nombre de « groupes de haine » aux Etats-Unis
Protégés par le premier amendement de la Constitution et plus que tolérés par Donald Trump, les groupes de nationalistes et de suprémacistes blancs prolifèrent. Selon le SPLC, une association de surveillance de l’extrême droite, 954 groupes de haine – « dont les croyances ou les pratiques attaquent des catégories d’individus en raison de caractéristiques immuables » – sont actifs sur le territoire. Ils étaient 457 en 1999.
Des monuments confédérés de plus en plus contestés
● Symbole public en mémoire de la Confédération
Symbole supprimé
● avant 2015 ● après 2015
En 2015, après le massacre de Charleston, au cours duquel Dylann Roof avait assassiné neuf personnes dans une église méthodiste africaine, des photos de ce suprémaciste blanc arborant le drapeau confédéré avaient créé de vives polémiques. Depuis, le mouvement pour débaptiser ou supprimer les monuments confédérés s’est accéléré. Ils sont aujourd’hui emblématiques des batailles mémorielles.
Démocrates versus républicains : des divergences sur les thèmes de société
Plusieurs études réalisées depuis 2017 ont mesuré les clivages de la société américaine. Deux blocs se dessinent, les individus proches du Parti républicain et ceux proches du Parti démocrate, dominés tous deux par deux élites américaines, les Core Conservatives et les Solid Liberals. Outre le fait que ces deux groupes sont les plus opposés politiquement, tout les sépare en matière de caractéristiques sociodémographiques, de systèmes d’attitudes et de valeurs, de modes de vie. Par exemple, les Core Conservatives refusent de prendre en considération les questions de discrimination raciale, des inégalités entre hommes et femmes ou de la pauvreté. Selon eux, les pauvres profitent des prestations sociales pour ne rien faire, tandis que les libéraux estiment au contraire qu’il faut augmenter ces allocations.
% de votants, selon leur appartenance politique, sur les thématiques de société, considérées comme très importantes dans leur vote en septembre 2018
● Républicains
● Ensemble des électeurs
●Démocrates
● Ensemble
●Démocrates
● Républicains
Une méfiance forte vis-à-vis des institutions et des médias
La méfiance envers les médias traditionnels, perçus comme partiaux, s’est durablement installée. Sur les 200 médias américains, 194 avaient soutenu la candidate démocrate Hillary Clinton. De quoi nourrir les fantasmes d’une presse « d’opposition » et qui « ne comprend pas le pays », selon les termes de Steve Bannon, ancien conseiller stratégique de Donald Trump.
Confiance dans les institutions américaines, en % de réponses positives
Cette courbe représente la confiance moyenne dans sept institutions : l’Eglise ou autre organisation religieuse, l’école publique, la Cour suprême, le Congrès, la presse écrite, les syndicats et les grandes entreprises.
Confiance dans l’impartialité des médias (presse écrite, télévisuelle et radio) pour rapporter les informations.
En % de personnes ayant répondu avoir grande ou très confiance
Sources : PEW Research Center, Census Bureau, Gallup, Bureau of Labor Statistics ; Southern Poverty Law Center, Henry J. Kaiser Family Foundation, Public Religion Research Institute, BBC, Huffingtonpost.com
Textes : Nicolas Bourcier
Infographie-cartographie : Véronique Malécot, Charlotte Recoquillon
Madagascar, un nouveau départ ? (1). Le chef de l’Etat sortant, candidat à sa succession, n’est pas favori face aux « revenants » Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana.
L’heure de la revanche a sonné. Interdits de candidature à l’élection présidentielle de 2013, Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana attendent depuis cinq ans de pouvoir se mesurer l’un à l’autre tout en écartant du chemin celui qui n’aurait dû être qu’un concurrent de substitution, par définition dénué d’ambitions. Mais Hery Rajaonarimampianina n’entend pas retourner sur le banc de touche. Après avoir achevé son mandat en respectant la Constitution, ce qui est assez rare dans l’histoire politique mouvementée de Madagascar, l’expert-comptable discret, voire effacé, a choisi de solliciter à nouveau les suffrages. Le premier tour du scrutin présidentiel aura lieu le 7 novembre. Au lendemain de son soixantième anniversaire. Aux côtés de ces trois ex-présidents, trente-trois autres candidats, pour la plupart inconnus, seront en lice.
Chacun promet comme il se doit des jours meilleurs. Mais sous les lumineux jacarandas en fleurs qui donnent à Antananarivo un air presque léger, les ombres du passé n’ont pas fini de rôder. Personne n’a oublié les émeutes sanglantes de 2009 qui avaient conduit au départ de Marc Ravalomanana et à la prise de pouvoir, avec le soutien de l’armée, du jeune maire de la capitale, Andry Rajoelina, pour une période sombre dite « de la transition » qui dura finalement quatre ans.
Onction du gendarme de Washington
Boycottée par les institutions financières internationales et autres bailleurs de fonds, la Grande Ile de l’océan Indien plongea une nouvelle fois dans la crise. Sa réintégration eut un coût : l’exclusion des deux fauteurs de troubles du processus électoral de 2013.Et c’est « Hery », comme il est d’usage de l’appeler pour contourner les dix-neuf lettres de son patronyme, qui en sortit vainqueur grâce à l’appui d’Andry Rajoelina, dont il était depuis plusieurs années le ministre des finances. Mais au lieu de se plier au scénario Poutine-Medvedev écrit pour lui, l’ancien professeur à l’Institut national en sciences comptables et administration d’entreprise (Iscae) s’affranchit du « DJ » qu’il n’avait jamais beaucoup estimé. Pari risqué.
Au moment de quitter son poste, en août, le représentant du Fonds monétaire international (FMI) Patrick Imam avait accordé une longue interview à L’Express de Madagascar, dans laquelle il saluait le chemin parcouru : « Partis d’où nous étions et considérant où nous sommes en train d’aller, il y a quand même un changement de cap significatif », soulignait le banquier – décoré de l’ordre national avec le grade de commandeur. Son institution prévoit une croissance de 5 % pour le pays cette année, soit « la plus forte depuis dix ans ». Fort de cette onction du gendarme de Washington, Hery est convaincu que son bilan peut lui permettre de faire la différence face à ses adversaires. N’a-t-il pas obtenu des créanciers étrangers des promesses de soutien à hauteur de 6,4 milliards de dollars (5,6 milliards d’euros) pour financer ses priorités ?
C’est sur cette ligne qu’il s’est lancé dans la campagne en mettant en avant le retour aux grands équilibres, l’augmentation des dépenses dans les secteurs sociaux, le lancement de programmes d’infrastructures… Quitte à faire quelques entorses à la réalité en affirmant par exemple que le taux de pauvreté a reculé de « 92 % » à « un peu plus de 70 % ». Ce taux, qui était de 78 % en 2012, est resté quasiment inchangé, selon les données les plus récentes de la Banque mondiale. Si Madagascar a renoué avec une petite prospérité, celle-ci a surtout profité à une minorité urbaine et aux milieux d’affaires, creusant un peu plus le gouffre qui les sépare d’une masse miséreuse encore appauvrie par la hausse des prix, à commencer par celui du riz.
Quoi qu’il en soit, il en faudra bien davantage pour tenir le cap du plan de transformation de l’île qu’il propose aux Malgaches. Baptisé Fisandratana 2030, ce programme prévoit de multiplier par trois le PIB du pays, par deux le revenu par habitant, de faire baisser la proportion de pauvres à un quart de la population… Ce qui supposerait d’atteindre très vite une croissance à deux chiffres. Pendant sa campagne de 2013, Hery avait promis de régler le problème des délestages de la Jirama, la compagnie nationale d’électricité, en trois mois. Les Malgaches ne l’ont pas oublié. Cinq ans après, la situation commence à peine à s’améliorer.
« Les rats quittent le navire »
Sans base politique, avec un parti – le Hery Vaovan’i Madagasikara (HVM) – créé à la va-vite quelques mois avant l’élection de 2013 et qui s’avéra incapable de faire entrer ses hommes à l’Assemblée, Hery a dû composer tout au long de son mandat des coalitions fragiles en allant piocher dans des petits partis pour ne pas avoir à négocier avec celui d’Andry Rajoelina. Selon la Constitution, c’est en effet au Mapar, majoritaire à l’Assemblée, qu’il revenait d’occuper le poste de premier ministre. Résultat : en cinq ans, quatre chefs du gouvernement se sont succédé avant que la Haute Cour constitutionnelle n’impose au président, pour sortir de la crise provoquée en avril par la réforme des lois électorales, de constituer un gouvernement de consensus et de convoquer un scrutin anticipé.
« Les défections qui se multiplient au sein du HVM montrent que les ralliements n’étaient que de circonstance. Maintenant que Rajoelina et Ravalomanana sont de retour, les rats quittent le navire », observe un politologue qui préfère préserver son anonymat. Le fait que plusieurs des premiers ministres et ministres du chef de l’Etat sortant se présentent contre lui est un autre signe de cette désaffection.
L’ex-ministre des finances de la transition est également critiqué pour le peu de volonté dont il a fait preuve dans la lutte contre la grande corruption que pratiquent les élites politiques et économiques pour piller les ressources naturelles ou détourner les deniers publics. « Hery est intelligent, rationnel, mais il ne sait pas prendre de décisions et il a du mal à dire non. » Cette version donnée par un diplomate qui a beaucoup eu affaire à lui sur les dossiers sensibles, comme celui du trafic du bois de rose à destination de la Chine, est la moins sévère pour le président sortant. D’autres s’interrogent sur les relations qui le lient à certains « opérateurs » du bois de rose lui ayant accordé leur soutien en 2013, comme Jean-Pierre Laisoa ou Bekasy John Fringe. Dans un rapport accablant présenté le 18 octobre à Antananarivo, Amnesty International résumait ce que chacun sait ici : seuls les pauvres peuplent les prisons.
Pour franchir le premier tour de l’élection, le chef de l’Etat sortant espère faire le plein de voix dans les campagnes, traditionnellement fidèles au pouvoir en place, et où continue de vivre la majorité de la population. Pour autant, face aux revenants écartés de 2013, il est loin de partir favori.
« Le Monde Afrique » propose une radiographie de la Grande Ile à l’occasion de la présidentielle malgache, dont le premier tour doit avoir lieu le 7 novembre.
Près de 10 millions de Malgaches sont appelés aux urnes, mercredi 7 novembre, pour le premier tour de l’élection présidentielle. Trente-cinq candidats se présentent contre Hery Rajaonarimpianina, le président sortant élu en 2013. La plupart d’entre eux sont inconnus de la population dont l’attention a été captée par le retour de Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, tous deux interdits de se présenter il y a cinq ans. Dans un pays où le plafonnement des dépenses de campagne n’existe pas, les trois ex-présidents se sont livrés à une surenchère de moyens, la palme revenant à M. Rajoelina dont les tee-shirts orange et les goodies ont inondé la Grande Ile de l’océan Indien.
Cette disproportion a été vivement critiquée par les représentants de la société civile qui ne sont pas parvenus à faireadopter par tous les candidats une charte de bonne conduite. Un observatoire indépendant des élections a été mis sur pied et il déploiera 6 050 observateurs pour près de 25 000 bureaux de vote. De leur côté, l’Union européenne et la Communauté de développement de l’Afrique australe, assureront également une mission d’observation. Car les risques de fraude existent. Cette crainte a d’ailleurs motivé jusqu’au dernier moment la demande de réouverture de la liste électorale portée par une vingtaine de candidats.
Hery Rajaonarimpianina fait campagne sur son bilan en mettant en avant le soutien des bailleurs de fonds et le retour à une croissance de 5 % en 2018, la plus élevée depuis dix ans, selon les prévisions du Fonds monétaire international (FMI). Mais la population dont la grande majorité continue de se débattre dans les difficultés du quotidien n’a pas vu ses conditions de vie s’améliorer. La hausse du prix du riz qui constitue la base de l’alimentation est durement ressentie. Les scandales de corruption ont continué d’alimenter la défiance à l’égard des politiciens. Si bien que, mercredi, beaucoup devraient se détourner des urnes.
Le Monde Afrique propose une série de reportages pour raconter les enjeux de ce scrutin et le quotidien des Malgaches désillusionnés, mais dont certains ont néanmoins décidé de se dresser contre la faillite de leur pays.
Vingt-cinq ans après le président François Mitterrand, le premier ministre français, Edouard Philippe, s’est rendu, samedi 3 novembre, sur le site de la bataille de Dien Bien Phu, au Vietnam. « Il me semblait qu’il était utile de regarder notre passé commun de façon apaisée », a-t-il dit, après s’être rendu sur les petites collines aux noms féminins (Gabrielle, Eliane, Béatrice…) tenues en 1954 par l’armée française dans la cuvette du nord-ouest du Vietnam.
Il a fleuri les deux mémoriaux, français comme vietnamien, bâtis en souvenir des quelque 13 000 morts et disparus de la bataille et visité le bunker du général Christian de Castries, qui dirigea les troupes françaises jusqu’à sa capture et la défaite, afin de rendre« hommage aux soldats français qui sont morts, qui se sont battus, qui ont parfois été faits prisonniers à la fin des combats ».
Deuxième visite d’un haut responsable français
Le premier ministre français, qui avait salué la veille la mémoire du père de l’indépendance Ho Chi Minh dans le livre d’or signé à Hanoï, a aussi salué celle des « soldats vietnamiens qui se sont battus pour l’indépendance » d’un pays qui était alors une colonie française. Aucun responsable vietnamien n’avait cependant fait le déplacement au mémorial français, ne rejoignant Edouard Philippe que pour la visite du mémorial vietnamien.
La veille à Hanoï, Edouard Philippe avait présidé à la signature de nouveaux contrats commerciaux. Le montant total des accords signés, dont certains ne sont pas définitifs, avoisine les 10 milliards d’euros, dont 5,7 milliards pour l’avionneur européen Airbus.
Après François Mitterrand en 1993, c’est la deuxième fois seulement depuis la terrible bataille de 1954 qu’un haut responsable français se rend sur le site de Dien Bien Phu. « Je ne suis pas sûr d’avoir très envie de répondre à ceux qui ne comprennent pas pourquoi un premier ministre français vient » à Dien Bien Phu, « ce qui peut me paraître surprenant c’est que finalement assez peu de gens l’aient fait avant moi », a déclaré Edouard Philippe, interrogé sur les critiques suscitées par sa venue sur le site d’une défaite française.