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-La mort de l’opposant historique congolais Étienne Tshisekedi ouvre la voie à un combat pour le titre envié de chef de l’opposition qu’il incarnait et met à mal l’unité de son parti, l’UDPS, déjà fortement tiraillé de l’intérieur.
Tshisekedi est mort à 84 ans le 1er février à Bruxelles alors qu’une coalition d’opposition qu’il présidait, le “Rassemblement”, négociait avec le pouvoir un partage des postes dans un futur gouvernement d’union découlant d’un accord de cogestion de la République démocratique du Congo signé le 31 décembre.
Cet accord, censé sortir le pays de la crise liée au maintien au pouvoir du président Joseph Kabila, dont le mandat est échu depuis le 20 décembre, prévoit la mise en place d’une transition politique jusqu’à la tenue de la présidentielle “fin 2017”, perspective qui semble déjà très incertaine.
Tshisekedi devait prendre la tête du Conseil national de suivi de l’accord de la Saint-Sylvestre (CNSA) tandis que son fils Félix brique le poste de chef du gouvernement.
La mort du “Vieux” remet tout à plat. Les alliés de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) au sein du Rassemblement sont bien décidés à remettre en cause ce qu’ils percevaient comme une position hégémonique de ce parti. Plusieurs dirigeants d’opposition briguent déjà ouvertement la présidence du CNSA.
Le pouvoir, de son côté, affirme que le choix du titulaire de ce poste devra faire l’objet d’un nouveau consensus entre la majorité et l’opposition.
Entré en dissidence contre le régime de Mobutu en 1980, avant de s’opposer à ses successeurs, Laurent-Désiré Kabila (1997-2001), puis son fils Joseph, Tshisekedi, capitalisant sur son énorme popularité, a toujours dirigé de manière autoritaire.
Pour l’opposition, la mort du patriarche “est un événement à double tranchant”, dit à l’AFP Thierry Vircoulon, spécialiste de l’Afrique centrale, enseignant à Sciences-Po Paris.
Elle “est privée de sa figure la plus mobilisatrice, celle qui faisait peur au pouvoir”, juge M. Vircoulon, “mais à l’inverse, par son intransigeance, Étienne Tshisekedi contribuait à empêcher l’unification de l’opposition et reléguait les autres opposants à des seconds rôles”.
Pour l’universitaire, sa mort lève “un obstacle” à l’affirmation au premier plan d’autres personnalités plus jeunes, comme l’ancien gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi, aujourd’hui en exil, ou l’ancien président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe.
– ‘Les ambitions vont exploser’ –
Pour l’heure, estime un diplomate, “le grand vainqueur de l’accord de la Saint-Sylvestre, c’est Kabila, car il n’a plus d’opposition”, celle-ci ayant accepté dans son ensemble de s’asseoir à la table des négociations en vue de gouverner.
Dès lors, estime le professeur Justin Kankwenda, économiste et politologue, le Rassemblement, s’il veut survivre, “doit cesser d’être une plate-forme opportuniste […] pour se transformer en un regroupement porteur de l’alternance”.
Pour lui, la seule planche de salut de la coalition est “la cohésion autour d’un programme” et une vision stratégique pour permettre la pleine application de l’accord du 31 décembre et la tenue effective de la présidentielle à la fin de l’année.
Quand à l’UDPS, premier parti de l’opposition à l’issue des législatives et de la présidentielle de 2011, elle apparaît minée depuis lors par les querelles internes favorisées par l’affaiblissement d’un Tshisekedi malade qui aura multiplié jusqu’au bout les décisions contradictoires
Avec sa mort, “les ambitions vont exploser”, estime M. Kankwenda.
A ceux qui voudraient voir Félix Tshisekedi succéder à son père à la tête du parti, un haut-cadre de l’UDPS confie à l’AFP sous le couvert de l’anonymat que “dans un parti politique, l’héritage doit être idéologique, donc politique”: “Tout doit être décidé lors du [prochain] congrès”.
Mais parmi les tenants de “l’héritage politique”, on ne parle pas d’une seule voix. Tel autre cadre appelle à ne “pas négliger la ligne historique” : celle de ceux qui “ont enduré la souffrance de la lutte dans leur chair” (avant 1990) par opposition aux “nouveaux venus” arrivés après cette date.
Pour Jean-Pierre Mbwebwa, professeur de sciences politiques à l’Université de Kinshasa, “il faut que le nouveau leadership [de l’UDPS] soit issu des urnes” sous peine de priver son futur chef de toute légitimité auprès des militants et sympathisants, ce qui ne manquerait pas de conduire selon lui à la disparition du parti.
Avec AFP