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Assassinat de Patrice Lumumba – Opacités suspectes et mensonges par omission


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Par Soufiane Ben Farhat (La Presse.nt)

L’Afrique attend le verdict de l’histoire. Et les clés du Tribunal de l’Histoire sont en Europe, plus particulièrement en Belgique.

La vérité sur l’assassinat de Patrice Lumumba, premier chef du gouvernement du Congo indépendant, demeure entourée d’un halo de mystère. Pourtant, elle est bien là, quoique cadenassée. Et pas plus tard qu’avant-hier, plusieurs avocats belges ont demandé à la justice d’engager des poursuites pour crimes de guerre contre des responsables belges soupçonnés d’implication dans l’assassinat de Lumumba. Il avait été liquidé physiquement quelques mois après avoir accédé au pouvoir par voie d’élection en 1960.

L’initiative coïncide précisément avec la célébration, le 30 juin, du cinquantenaire de l’indépendance de la République démocratique du Congo. La demande émane d’éminents avocats, du doyen de l’école de droit de l’Université de Bruxelles, et d’un illustre historien. Luddo de Witte s’était déjà distingué par des travaux à l’origine d’une enquête parlementaire sur l’assassinat de Lumumba.

En fait, en 2002, une enquête parlementaire belge avait conclu que le gouvernement était “moralement responsable” de la mort de Patrice Lumumba. La Belgique avait alors officiellement présenté ses excuses pour son rôle dans la disparition de l’éminent leader indépendantiste africain. Aux termes de l’enquête parlementaire, Patrice Lumumba avait été emprisonné à Kinshasa, après avoir été renversé par le coup d’Etat de Mobutu le 4 septembre 1960. “Le 17 janvier 1961, des responsables belges ont fait disparaître Lumumba et deux de ses ministres, envoyés par avion vers la région du Katanga, où des officiers belges participaient à la formation des troupes sécessionnistes”, a fait valoir l’enquête.

Mais la vérité demeure en suspens. Là aussi, il n’est guère exclu que plusieurs doigts aient tiré sur la gâchette ou que plusieurs mains aient participé au meurtre. Des historiens ont bien démontré que les Belges n’étaient pas les seuls à vouloir éliminer Patrice Lumumba. En 1970, une commission du Sénat américain s’est prononcée sur la question. Elle avait révélé que la CIA avait envisagé de supprimer Patrice Lumumba. Plusieurs pistes avaient été envisagées, notamment le recours à du dentifrice empoisonné. Motif, aux yeux des Américains, Lumumba pouvait fort bien devenir un Fidel Castro africain.

Christophe Marchand, chef de l’équipe juridique belge, est optimiste. Il espère qu’un juge d’instruction entame une enquête d’ici le mois d’octobre : “Maintenant, il est temps que la justice soit rendue”, a-t-il dit.

Mais cela pourrait demeurer encore un voeu pieu. On connaît le peu d’empressement de certains pouvoirs à mettre à jour des faits et preuves. Une attitude de mise même bien au-delà des périodes de prescription légale. Les coups tordus ont la peau dure. Ils ne se livrent pas facilement au regard public. Il est même des faits graves dont le mystère ne sera probablement jamais percé.

Au-delà, on gagnerait à rafraîchir les mémoires, un peu partout dans le monde. Aujourd’hui, un certain discours liquidateur en vogue dans les contrées nord-atlantiques s’avise d’escamoter l’histoire. Des responsabilités avérées dans de grands crimes contre l’humanité, voire des génocides, sont tenues sous le boisseau. Ainsi en est-il du génocide rwandais où les faisceaux d’indices induisent la responsabilité fortement présumée de quelque pays européen. Pourtant, on s’en tient au bien navrant et louche cache-misère du “ni vu, ni entendu”.

Mais comme l’instruit le proverbe bien de chez nous : “Ne te lacèrent de douleur que tes ongles et ne pleurent que tes yeux”. Il appartient aux Africains en premier à prendre leur passé en charge. Scientifiquement, méthodiquement, via toutes les ressources légales plausibles. Autrement, ils continueront longtemps à faire les frais des opacités suspectes et des mensonges par omission.

Les généreuses initiatives venues d’ailleurs sont toujours les bienvenues. Elles peuvent s’avérer capitales. Mais à cette échelle précisément, on n’est jamais si bien servi que par soi-même.