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Avoir 45 ans et plus sur le marché de l’emploi: “C’est comme si j’avais la peste”


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Travail-Comparée à d’autres pays européens, la Belgique fait moins travailler ses 45 ans et plus. Pour inverser la tendance, un plan est désormais imposé aux entreprises d’une certaine taille. Il vise notamment à les inciter à engager des travailleurs âgés. Mais, selon Florence, demandeuse d’emploi, il aurait l’effet inverse.

Herstal, début 2013, en province de Liège. Florence cherche du travail, en vain. “J’en pousse des portes depuis quatre mois…”, écrit-elle via notre page Alertez-nous. Du boulot, cette mère de cinq enfants, mais qui en élève neuf en rajoutant la progéniture de son second mari, n’en a pas manqué à la maison au cours des deux dernières décennies. Mais en dehors de ses activités de maman d’une famille nombreuse, l’expérience professionnelle de cette femme, “sortie d’une école professionnelle avec un diplôme de couturière-repasseuse”, se limite à quelques semaines dans les titres-services en 2006 avant que son employeur la licencie et qu’elle ne souffre de problèmes de santé qui la rendront invalide à plus de 33% pendant deux ans, assure-t-elle.

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 45 ans: “Ouh la la la, ça va poser problème !”

Au chômage depuis plusieurs années, Florence a multiplié les visites dans les agences d’intérim et les sociétés de titres-services au cours des derniers mois. Son CV est maigre, c’est vrai. Mais faire les ménages, ça, elle sait faire. Le problème, regrette-t-elle, résiderait ailleurs et se résume dans cette réponse qu’on lui a encore livrée récemment lors d’un entretien d’embauche: “Ouh lalalaaaa, vous êtes née en 67, ça va poser problème !” Oui, Florence a 45 ans. Et sur le marché de l’emploi, ce n’est pas franchement un atout. “Je suis sortie de là en pleurant”, se rappelle-t-elle. Aujourd’hui, la quadragénaire angoisse: “Je ne vais plus trouver de travail, tout ça parce que je suis vieille”, craignant par ailleurs de finir par perdre ses droits au chômage. “Et en plus, je n’ai plus de voitures pour le moment”, ajoute-t-elle. Dès lors, sa conclusion est cinglante: “Donc, c’est comme si j’avais la peste”.

Avoir 45 ans et plus fait-il désormais de nous des pestiférés sur le marché de l’emploi ? Au plus on monte dans la pyramide des âges, au plus la proportion de gens qui ont un emploi diminue (voir les chiffres 2012 en encadré). Notre pays figure d’ailleurs parmi les mauvais élèves de l’Europe en ce qui concerne le degré d’activité des travailleurs âgés.

 Deux fois moins de chance d’être convoqué qu’un jeune

L’année passée, le Centre pour l’égalité des chances évoquait une discrimination à l’embauche en vertu de l’âge. Il ressortait de différents tests que les demandeurs d’emploi âgés de plus de 45 ans couraient un risque substantiel de discrimination lorsqu’ils étaient invités à répondre à un entretien d’embauche. Et ils risquaient deux fois plus qu’un jeune demandeur d’emploi de même niveau de ne pas être convoqués à cet entretien. Selon une enquête, la moitié des responsables des ressources humaines admettaient d’ailleurs que l’âge jouaient un rôle dans la décision relative à la sélection. Quinze pour cent d’entre eux estimaient que les plus âgés devaient faire plus d’efforts que les jeunes demandeurs d’emploi.  

Pour changer les choses, le gouvernement a pris plusieurs mesures: l’accès à la prépension a été restreint et l’âge de la pension anticipée a été repoussé.

 Un plan pour l’emploi pour travailleurs âgés de 45 ans et plus

Un plan a été imaginé et entériné par le biais de conventions collectives (la CCT 104) en 2012. Il est d’application cette année pour la première fois. Il s’agit d’un plan pour l’emploi des travailleurs âgés de 45 ans et plus. Toute entreprise privée (le secteur public n’est pas concerné) occupant plus de 20 travailleurs a pour obligation de le mettre en place en son sein. Ce plan doit être créé par l’entreprise elle-même. Il doit contenir toute une série de mesures qui visent à maintenir ou à accroître le nombre de travailleurs de 45 ans et plus. L’employeur doit conserver le plan pendant 5 ans (tous les détails sur le plan: cliquez ici). Ce plan vient s’ajouter à des mesures ou des faits qui protègent déjà les travailleurs plus âgés. Ainsi, depuis quelques années, un employeur qui licencie un salarié de 45 ans et plus doit déjà lui offrir un service d’outplacement (un reclassement professionnel – en savoir plus). Par ailleurs, le montant du préavis (qui augmente avec l’ancienneté) n’encourage pas l’employeur à virer ses travailleurs les plus âgés.

 Effet pervers du plan ? Les employeurs encore moins enclins à engager des travailleurs âgés

Pour Florence, le nouveau plan du gouvernement a toutefois un effet exactement inverse pour ce qui est d’engager de nouvelles personnes âgées de 45 ans et plus.

S’il est vrai que ce plan dissuade encore un peu plus l’employeur de virer un travailleur âgé, pour la même raison, il pourrait dissuader encore un peu plus l’employeur… d’engager travailleur âgé. “Je passe sous la nouvelle loi des plus de 45 ans et donc on n’a pas de travail pour moi”, prétend Florence, répercutant ce que des employeurs lui auraient fait savoir à plusieurs reprises. Une employée du bureau de l’Onem aurait confié à Florence qu’elle était loin d’être la seule personne en recherche d’emploi à qui on avait dispensé cet argument.

De nombreux spécialistes en recrutement et ressources humaines seraient eux-mêmes plutôt sceptiques sur l’efficacité de ce plan.

Du côté du SPF (Service Public Fédéral) Emploi à qui nous avons soumis l’opinion de Florence, on se montre prudent et réaliste: le nouveau plan est seulement en train d’être installé dans les entreprises, il est donc prématuré d’évoquer déjà des éventuels effets pervers. Par ailleurs, on ne peut repousser non plus l’hypothèse que des employeurs utilisent ce nouveau plan comme prétexte pour se débarrasser rapidement de certains candidats.

 Avant, tout le monde convergeait dans un même sens: on arrête de travailler plus tôt

Selon une spécialiste des Ressources Humaines, on se trouverait à la croisée des chemins. Auparavant, les travailleurs, employeurs et l’Etat étaient tous d’accord pour raccourcir les carrières. Mais aujourd’hui, la donne a changé et les trois acteurs ne convergent plus dans la même direction. Vu l’explosion du nombre de retraités à qui verser une pension, le gouvernement tente d’endiguer le flux et préfère que les gens restent au travail plus longtemps. Certains travailleurs eux aussi décident de ne plus anticiper leur départ à la retraite parce que des enfants encore à charge, parce qu’un emprunt hypothécaire à rembourser, etc. Bref, le marché de l’emploi cherche un peu un nouvel équilibre. D’autres aussi…

Source: RTBF