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LE RECIT D’UN ENFANT SOLDAT MEMBRE DES KATA KATANGA


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kata katangaLe jeune Paul,  14 ans, faisait partie des Maï-Maï «Kata-Katanga» qui ont tenté de prendre  Lubumbashi le 23 mars dernier. Lui et 39 de ses compagnons n’ont pas été  acheminés à Kinshasa pour être jugés, parce qu’âgés de moins de 18 ans. Du  centre de transit de Tshamilemba à Lubumbashi où il se trouve, Paul raconte son  aventure au sein du groupe Maï-maï qu’il a intégré en 2012.
Syfia Grands  Lacs : Comment te retrouves-tu ici à Lubumbashi ? Paul : Je suis arrivé ici  avec l’intention d’entrer à l’école comme nous le disait notre chef, Ferdinand  Ntanda Imena. Il nous a dit que nous venions continuer la formation ici. C’est  lui qui nous formait au centre d’internement de Kasenga (territoire du nord  Katanga). Quand il voyageait pour nous chercher à manger, il nous laissait  d’autres formateurs. Mais j’ai été surpris de voir que les militaires nous ont  attaqués. Ils ont même tué certains d’entre nous.
SGM : Mais  pourquoi les armes, les flèches, les machettes…lors de votre entrée à Lubumbashi  ? Paul : On nous avait dit que tout ce qui concernait notre  formation était déjà ici. Mais s’il arrivait que les militaires s’en prennent à  nous, nous les achèverons avec ces armes. Nos chefs nous avaient aussi dit que  nous venions pour gouverner la province du Katanga. Les bandelettes à la  tête, les cornes attachées aux hanches, aux cous, aux bras, ce sont nos  amulettes qui nous identifient et nous protègent. Quand je les porte sur moi,  les balles des militaires ne peuvent pas m’atteindre, elles glissent sur mon  corps comme de l’eau. C’est pour cela qu’on nous appelle  Maï-Maï.
SGL: Combien êtes-vous ? Paul: Je ne peux  pas connaître notre nombre. Mais nous sommes nombreux. C’est juste une petite  équipe qui est entrée à Lubumbashi (un peu plus de 200 personnes dont des  enfants, Ndlr). Il y en a qui sont restés dans la brousse non loin de la ville,  d’autres à Kasenga. Nos chefs nous disaient qu’il y a d’autres équipes à  Mitwaba, Pweto, Manono, Malemba Nkulu (des territoires du nord  Katanga).
SGL : Comment as-tu intégré le groupe armé  ? Paul : Je ne faisais rien avant, j’accompagnais mes parents aux  champs. Il y a des gens qui sont venus dans mon village chercher des jeunes non  scolarisés. Ils disaient qu’ils allaient leur donner la formation des  libérateurs des fils et filles du Katanga. Comme je n’étais pas à l’école faute  de moyens, j’y suis allé. Mon grand souci était d’étudier. Mes parents  étaient contents parce que c’était l’occasion pour moi d’avoir une formation.  Mais depuis que je suis parti en mars 2012, je ne suis pas encore rentré dans ma  famille. Je sais qu’ils se demandent où je suis. J’ai été dans d’autres  villages, territoires…mais pas chez moi. Nos encadreurs nous disaient que nous  avons déjà une autre famille et que quiconque met la main à la charrue ne  regarde pas en arrière.
SGL : Qu’as-tu fait depuis que tu es dans  ce groupe ? Paul: Lorsque vous entrez, vous devez suivre la première  formation pendant un mois pour savoir manipuler les armes. Après cette formation  vous passez au baptême, c’est-à-dire qu’on vous asperge le corps entier d’une  potion magique pour vous rendre invulnérables à toutes sortes d’armes. Après,  vous commencez les missions. On vous envoie dans des contrées autres que chez  vous pour déloger l’Etat, ses services, ses préposés et instaurer notre  administration. Tous ceux qui nous résistent, nous les tuons. Quand nous  sommes en mission, nous avons chacun le sentiment que rien ne peut nous arriver.  Nous ne craignons rien…On nous a appris que pour libérer un peuple, l’âge ne  compte pas. A chaque attaque que nous effectuons nous avions de récompenses, des  billets de cinq et dix mille francs…
SGL : Que dis-tu à tes  collègues qui sont restés et aux autres enfants qui sont tentés par l’aventure  ? Paul: Une fois recruté comme Maï-Maï, nos chefs nous ont promis  des études, à d’autres des postes dans l’armée et dans la police. Mais rien de  tout cela n’a été réalisé. C’est quand je suis arrivé ici que j’ai réalisé que  tout ce que nos chefs nous disaient n’était que mensonge. C’est la mort qui nous  attendait. Je glorifie Dieu d’être resté en vie. Ceux qui entrent dans un  groupe comme celui-ci sont maudits. Moi, je n’irai plus jamais dans un groupe  armé. Tout ce que je demande, c’est qu’on me fasse rentrer dans ma famille et  qu’on me fasse étudier.
Maurice  Mulamba
Par DC