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Par Mbelu Babanya Kabudi
« La tâche d’un intellectuel est d’armer et non de séduire »
-L’histoire écrite par certains cercles de pouvoir capitalistes serait-elle la reconduction de la même stratégie de la guerre dans des pays où les habitants sont majoritairement peu instruits, où les élites compradores musèlent une expertise responsable et patriote, où les patriotes oublient de s’informer et de former en puisant à de bonnes sources ? Relire cette histoire édifie. La relire dans sa version falsifiée au profit des oligarchies d’argent peut être un pas important dans les efforts à déployer pour sa réécriture citoyenne. Celle-ci, telle qu’en témoigne J. Pauwels dans Le mythe de la bonne guerre, est indispensable à l’émancipation des peuples tenus dans l’obscurité et dans l’obscurantisme du chaos capitaliste. J. Pauwels nous inspire dans notre relecture de la traque des FDLR à partir de « la guerre dite froide ».
Il est curieux qu’après le coup d’Etat administratif de novembre et décembre 2011, quand Kigali et Kinshasa-aile « Joseph Kabila » reconduisent la question de la traque des FDLR (à travers leur communiqué conjoint du 19 mai 2012), il n’y ait aucune réaction de la part de différents services de l’ONU ayant, à plusieurs reprises, dressé des rapports suffisamment détaillés sur notre pays et ses voisins. Vouloir nous convaincre qu’il y a pour toutes forces négatives dans la sous-région des Grands-Lacs que les FDLR (qui sont à la fois vrais et faux ( ?)), c’est mettre entre parenthèses, entre autres, le Rapport Mapping établissant la responsabilité des armées du Rwanda, de l’Ouganda et des milices soutenues par ces deux pays et ayant infiltré les institutions de notre pays. Depuis le rapport de Robert Gersony de 1994 jusqu’au Rapport Mapping de 2010, lire notre histoire collective dans les Grands-Lacs à partir que ce qu’en pensent Paul Kagame et ses alliés étrangers et Congolais est contreproductif pour notre devenir commun. Paul Kagame et ses alliés (dont « le raïs ») participent de la falsification de notre histoire et de la partition de notre pays.
Falsifier l’histoire de la sous-région des Grands-Lacs, c’est participer de la remise aux calendes grecques de l’avènement d’une justice juste dans cette partie de l’Afrique.
A qui cela profite-t-il ? Aux prédateurs de tout bord. Surtout de ceux qui sont habitués à sortir des crises économiques et financières artificielles qu’ils créent en organisant des guerres.
Surtout de ceux qui, ayant provoqué le dérèglement déshumanisant du monde en élevant « Mammon » au niveau d’un « dieu » à qui tous les sacrifices sanglants doivent être faits !
De toutes les façons, nous refiler le refrain de la traque des FDLR au moment où les USA s’activent pour le marché de l’Est, c’est quand même interpellant !
En effet, « le gouvernement des États-Unis examine le meilleur moyen d’approfondir ses relations commerciales avec le Kenya et avec d’autres pays d’Afrique de l’Est, et de renforcer l’investissement dans la région. Le secrétaire adjoint au Commerce des États-Unis, Michael Camune, en visite au Kenya, a déclaré vendredi (18 mai 2012) à Nairobi, capitale de ce pays, que des plans étaient à l’étude pour explorer le Kenya et la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) afin de mettre en place un accord commercial régional qui comprendra un traité sur l’investissement régional, un accord de facilitation des échanges et l’établissement d’un dialogue commercial. » (Xinhuanet 19/05/2012))
Rappelons que la région de l’Afrique de l’Est est une partie des plus instables de notre continent ; une partie de l’Afrique que des guerres à répétition ont transformée en enfer. (La présentation du livre de Michel Collon et Grégoire Lalieu intitulé « La stratégie du chaos » est très éclairante sur cette question. En voici deux extraits : « Somalie : Bien plus qu’une affaire de pirates La Somalie avait tout pour réussir ! Une situation géographique avantageuse, du pétrole, des minerais… Et, ce qui est plutôt rare en Afrique, une seule religion et une seule langue pour tout le territoire. Elle aurait donc pu être une grande puissance de la région. Mais la réalité est toute différente : famines, guerres, pillages, piraterie, attentats… Comment ce pays a-t-il sombré ? Pourquoi n’y a-t-il pas de gouvernement somalien depuis presque vingt ans ? Quels scandales se cachent derrière ces pirates qui détournent les navires ? La famine est-elle une fatalité ? Erythrée : A-t-on le droit de suivre une autre voie ? C’est un pays dont les médias ne parlent presque pas. Pourtant, il y aurait de quoi… Le plus long combat pour l’indépendance mené sur le continent africain. Gagné de haute lutte, seul contre tous : USA, Europe et URSS. Un petit pays de cinq millions d’habitants, moitié chrétiens, moitié musulmans et aucun problème avec ça. Des résultats exceptionnels pour la lutte contre la faim, l’éducation et la santé. Le « Cuba africain », disent certains. Et comment ce bon élève est-il récompensé ? Par une longue guerre d’agression venant du voisin éthiopien, mais en réalité « made in USA ». Par des sanctions internationales votées à l’ONU sur la base d’accusations « made in USA » également et que Wikileaks a révélées fausses de A à Z. Comment expliquer que le bon élève soit puni ? Ah oui, l’Erythrée refuse de s’endetter auprès du FMI, elle refuse les « aides » internationales et entend choisir une voie de développement non soumise aux multinationales. Un exemple dangereux pour qui ? » Rappelons aussi que la guerre à l’Est de notre pays a poursuivi comme objectifs, entre autres, l’écartement de la France et de la Belgique comme partenaires privilégiés du Congo-Kinshasa au profit des USA. (Même si la France de Sarkozy est redevenue, par après, le valet des USA dans cette aventure déstabilisatrice de la « gâchette de l’Afrique ».)
Perdre de vue un seul instant ces enjeux platement cupides et de prédation peut rendre difficile la sage quête d’issues justes et intelligentes à la crise anthropologique que connaît notre pays.
Une chose est de dire qu’entre les Etats il n’y a pas d’amitié il n’y a que des intérêts ; une autre est de savoir comment et avec qui se fait la gestion de ces intérêts pour savoir sur quel pied danser.
Par le passé, pour sortir de la Grande Dépression de 1929, les USA ont entretenu la guerre entre l’Allemagne, la Grande-Bretagne , la France , l’URSS, etc. La deuxième guerre mondiale a servi au renflouement des caisses des entreprises américaines telles que Coca-Cola, IBM, Ford, General Motors, etc. Au plus fort du nazisme, un bon nombre d’ élites économiques et politiques des USA a composé à la fois avec Hitler et ses ennemis. La guerre idéologique du capitalisme made in USA contre le communisme (comme contre-modèle du capitalisme) n’a pas été une guerre contre les affaires avec « les parties ennemies ». Les USA ont soutenu à la fois l’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’URSS leur vendant des armes ; même à crédit.
Ce rappel historique est lié à une peur : qu’il soit en train de se jouer en Afrique en général et en Afrique Orientale en particulier le même scenario que celui de la guerre dite froide. (En plus du livre de Michel Collon et Grégoire Lalieu, il est recommandable de lire la seconde édition revue et augmentée du livre de Jacques R. Pauwels intitulé Le mythe de la bonne guerre. Les Etats-Unis et la deuxième guerre mondiale).
Il est quand même curieux que l’une des entre prises impliquées dans la deuxième guerre mondiale, General Motors, ait été parmi les lieux visités par le Ministre au Commerce des USA au Kenya le vendredi 18 mai 2012. Il est aussi curieux que les USA dont dépend l’armée rwandaise soutenant les milices du CNDP et du M23 soient disposés, à travers Africom, à travailler avec l’armée congolaise à la traque des forces négatives !
Comme pour sortir de la Grande Dépression , entretenir la guerre (et la traque permanente des FDLR), pour les économies fondées sur la vente des armes, la haute technologie des NTIC, les véhicules, etc., permet de faire des affaires. Les cercles de pouvoir tenant ces économies affaiblissent ou lobotomisent les Etats ou les élites politiques compradores qu’ils veulent mettre à leur service. Ils recourent à tous les moyens puissants possibles et imaginables pour réduire les peuples de ces pays à l’état des esclaves volontaires épris de beaucoup de mépris et de haine pour eux-mêmes. Cela leur permet de maintenir leur domination.
Hélas ! Ils ont, ces centres de pouvoir, essuyé, de temps en temps, des échecs cuisants tout au long de l’histoire. En Chine, au Cuba, au Vietnam, dans plusieurs pays de l’Amérique Latine, etc. ils ne sont pas restés les éternels maîtres incontestés et incontestables. Le retour de Poutine à la présidence en Russie témoigne de l’échec de leur politique de domination universelle après la chute du mur de Berlin.
L’histoire des pays s’étant émancipés du chaos créé par la montée du capitalisme du désastre est une victoire sur les freins imposés à « la politique de la contagion » de « mauvais exemples ». Elle témoigne de la fragilité des cercles de pouvoir susmentionnés. Malgré leur cynisme et leur nocivité toujours inégalables et intacts ! Elle peut largement inspirer nos luttes présentes et futures. A ce point nommé, lire, s’instruire à de bonnes sources, à temps et à contretemps, c’est une arme dont les minorités organisées et agissantes congolaises doivent s’emparer à tout moment pour éviter la reconduction de certaines graves erreurs du passé. Cela peut aider dans le renversement des rapports de force.