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Professeur Nzongola : «Obama est un président américain. Je ne crois pas que les Africains doivent se faire des illusions»


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Par Freddy mulumba kabuayi

Obama Churches Eminent politologue, Georges Nzongola Ntalaja s’entretient avec Le Potentiel sur les effets de l’arrivée au pouvoir de Barack Obama et de la politique américaine au Congo. Il invite finalement les Congolais à constituer des lobbies en vue d’influencer l’administration Obama pour s’intéresser à la situation de la RDC.

Les Africains pensent qu’avec l’arrivée de Barack Obama au pouvoir, tous leurs malheurs vont prendre fin. Qu’en pensez-vous ?

L’élection de M. Obama est une grande victoire pour le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis. Ce mouvement a pu, plus ou moins, convaincre les gens qu’un dirigeant noir peut aussi bien qu’un dirigeant blanc diriger le pays. Et que la différence des races ne constitue pas un obstacle à l’égalité ou bien à la gestion d’un Etat comme les Etats-Unis. J’ai vu dans l’Etat de Caroline du Nord que cet Etat a voté pour Obama.

C’était quand même très surprenant. Mais c’était une indication de l’évolution du pays parce que quand je suis allé dans ce pays en 1962, j’étais d’ailleurs étudiant dans cet Etat du Caroline du Nord dans une université presbytérienne. J’étais le deuxième noir d’intégrer cette université. En ce moment-là, le Noir ne pouvait même pas aller au cinéma, manger dans des restaurants réservés aux Blancs, être reçu dans les hôtels réservés aux Blancs. Aujourd’hui, ces mêmes Blancs élisent un Noir comme président. C’est quand même un pas en avant.

Que peuvent attendre les Africains de cette élection ?

Je crois que le fait que Obama imprime une nouvelle vision du monde, un monde où il n’y a pas trop de divisions religieuses, ethniques, des races … un monde où tout le monde a la chance de pouvoir réaliser sa vision, son rêve, de pouvoir collaborer pour qu’il y ait une meilleure répartition de la richesse et pour qu’il y ait la paix. Mais je ne crois pas que les Africains doivent se faire d’illusions. Obama est un président américain. Son projet de société est pour les Etats-Unis d’Amérique. C’est certainement en tant que l’homme le plus fort du monde, il a aussi des soucis au niveau global, notamment la paix dans le monde, les problèmes de changement climatique, du contrôle des armes nucléaires. On voit, par exemple, ce qui se passe aujourd’hui avec l’Iran et la Corée du Nord constitue là ses préoccupations. Sans oublier le Moyen-Orient avec le conflit israélo-palestinien, le problème de l’Irak et de l’Afghanistan. Donc, l’Afrique ne peut pas vraiment figurer très haut dans son agenda.

Qu’est-ce qui justifie le choix du Ghana pour sa visite en Afrique ?

Le Ghana est le premier pays noir africain qui a obtenu son indépendance en 1957. c’est un pays qui a fait beaucoup de progrès dans le domaine de la gouvernance démocratique. On voit qu’il a maintenant un troisième président élu depuis que la démocratie a été entamée dans ce pays. Donc, il y a eu une succession paisible, bien réussie avec le changement des partis politiques au pouvoir. Il y a donc eu une véritable alternance au Ghana. Sur le plan économique, c’est un pays qui a fait beaucoup de progrès de sorte que la vie des Ghanéens s’améliore. il y a des projets de développement qui se réalisent dans le pays, les infrastructures se sont créées. Accra, par exemple, est une très belle ville, bien maintenue où il y a de très bonnes routes. Il y a la propreté au centre-ville. Ce n’est pas comme ici avec des poubelles un peu partout. Donc, c’est quand même un pays qui est un modèle pour l’Afrique.

L’administration Clinton a été responsable de ce qui arrive aux Congolais. Elle a soutenu Kigali et Kampala contre eux. Peut-on espérer qu’avec Obama, qui est démocrate comme Clinton, les Américains abandonnent leur soutien au Rwanda et à l’Ouganda ?

Le plus grand tort que M. Clinton ait commis contre le Congo, c’était le fait de n’avoir rien fait contre le génocide au Rwanda. C’est parce que ce refus d’intervenir et d’empêcher la communauté internationale de prendre des mesures nécessaires pour arrêter le génocide, a fait que nous avons reçu deux millions de réfugiés hutu au Congo. C’était là le début de tous nos malheurs. Quand ces réfugiés hutu avaient dans les camps des réfugiés, les Interahamwe et l’ancienne armée de Habyarimana qui a continué sa lutte contre le nouveau régime de Kagamé à Kigali. Certainement, avec Mme Hillary Clinton, femme de l’ancien président et actuelle secrétaire d’Etat, on ne peut pas vraiment espérer un grand changement par rapport à la politique de M. Clinton et celle d’Hillary. Je crois qu’il incombe aux Congolais d’essayer d’influencer la politique américaine, de convaincre M. Obama pour qu’il fasse tout le nécessaire afin que le Rwanda arrête son agression sur le Congo.

Comment le faire lorsque Kagamé finance des lobbies en Europe comme en Amérique pour que le Rwanda pille le pays ?

Nous devons faire autant. Cet argent vient de notre pays. Nous aussi, nous pouvons créer des lobbies avec des ressources dont nous disposons !

Maintenant que les Etats-Unis sont contre nous, avec Kagamé ou Museveni. Que peuvent faire les Congolais si les Américains refusaient de soutenir la paix en Afrique centrale, d’abandonner le soutien à Kagamé ?

Je ne dirais pas que les Américains sont contre nous. Quelques-uns, peut-être, même au niveau du gouvernement. Parce que celui-ci n’a pas une politique claire pour le Congo, pour le moment. C’est pour cela que nous qui sommes aux Etats-Unis, nous sommes en train de développer donc des positions que nous voudrions présenter au gouvernement Obama pour que sa politique se clarifie. Pour qu’il y ait réellement une politique qui soutienne l’unité territoriale et l’indépendance du Congo. Une politique qui mette en exergue le fait que chacun des pays doit respecter les frontières et ne doit pas aller piller dans l’autre. Je crois que nous avons quand la même chance avec les appuis que nous avons au Congrès, avec les contacts que nous avons de pour donc faire valoir ces points de vues.

N’est-ce pas une illusion parce que l’Amérique est en crise. Maintenant, pour refaire son économie, il faut qu’il y ait des pilleurs en Afrique parce qu’on est Noir ?

Le Congo ne compte pas beaucoup dans l’économie américaine. Certainement, il y a quelques entreprises minières. Je crois que les Canadiens, les Britanniques et les Sud-africains ont beaucoup plus comme enjeux au Congo que les Américains. L’Amérique s’y intéresse moins principalement du fait, peut-être, qu’elle est une superpuissance ou du fait qu’elle est impliquée dans ce qui se passe ici. Mais du point de vue économique, leur rôle n’est pas aussi prépondérant.

Cela devient un peu contradictoire. Nous avons à peu près quatre-vingts pour cent des réserves mondiales de niobium……

Oui, il y a des entreprises finlandaises thaïlandaises, japonaises qui vont extraire le niobium. Ce ne sont pas les entreprises américaines.

Comment voyez-vous les relations entre l’Afrique, en particulier le Congo, et la Chine ?

La Chine est la nouvelle puissance en Afrique. Elle comporte aujourd’hui pas comme les Européens se sont comportés au XIXème siècle. Depuis qu’ils sont entrés dans nos pays, on ne voit pas une politique qui ne favorise pas le développement. Il y a beaucoup de places où des Chinois viennent avec leur propre main d’œuvre, au lieu d’utiliser la main d’œuvre locale. Ce qui est contraire à tout principe de collaboration au développement, parce qu’on ne doit pas nécessairement favoriser son propre pays. La coopération ethnique est une relation qui est gagnant-gagnant. Donc, qui donne la chance à tout le monde de pouvoir réaliser des bénéfices. C’est là où nous devons faire quelque chose d’entendre que la Chine est meilleure que l’Europe. Avec la Chine, il n’y a pas de conditionnalité politique. Je crois que le manque de conditionnalité politique ne peut pas être en soi la seule chose sur laquelle on doit s’attarder.

Faudrait-il que les Congolais prennent leur destin en mains ?

Absolument. C’est la thèse que je défends tout le temps. Tant que nous ne prendrons nos responsabilité s, notre destin en mains, nous serons toujours dominés.

ENCADRE

Georges Nzongola Ntalaja est né à Kasha (RDC) en 1944. Il a un Ph.D. en sciences politiques (University of Wisconsin-Madison, 1975). Spécialiste en politique africaine et en théorie politique, il est actuellement professeur au département d’études africaines à l’université de Caroline du Nord. Professeur émérite au département des études africaines de l’université Howard (Washington DC). Il a enseigné respectivement à l’université de Kisangani (1970-1971) ; à l’université de Lubumbashi (1971-1975) etc. il a servi au programme des nations-unies pour le développement (PNUD) comme Directeur du Centre de la Gouvernance du PNUD à Oslo (Finlande) et à la Banque mondiale. Ancien président de l’Association africaine de science politique (AASP) et de l’Association des études africaines des Etats-Unis (ASA), ses publications dont la majorité sont en anglais portent sur : «Revolution and Counter-Revolution in Africa, Nation-Building and State Building in Africa, and revolutions in Zaïre, 1956-1996»; «The Crisis in Zaire: Myths and Realities and of Conflict in the Horn of Africa», et co-éditeur de « the State and Democracy in Africa and of The Oxford Companion to Politics of the World (première et deuxième édition). Le dernier ouvrage est intutilé «The Congo from Leopold to Kabila: A People’s History».