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Par : Prof. YAV KATSHUNG JOSEPH*
I. Liminaires
Au moment où tous les regards sont tournés vers la célébration prochaine du jubilé en République Démocratique du Congo (RDC), 50 ans d’indépendance, l’on assiste dans certains coins et recoins de la république à l’amplification des démons de division et actes d’intolérance sans précédents. La situation devient criante quand ces actes – gravissimes- se déroulent « impunément » dans la province du Katanga, indexée par certains – à tort ou à raison- comme portant les tares de l’intolérance et de la division. Est-ce cela le vrai « Katanga Business », pourraient se demander d’aucuns ? La présente réflexion, essaie donc de poser le problème sans parti pris et d’en proposer les voies de sortie.
II. Tabassage des députés provinciaux ou la valorisation des « KULUNA » au Katanga ?
Tenez, l’on venait d’apprendre, le tabassage de quatre députés de l’assemblée provinciale du Katanga. Cela montre à suffisance comment la démocratie tant recherchée, vient de quitter le Parlement, symbole par excellence de la démocratie. Comment peut-il en être autrement ?
En effet, il nous revient que quatre députés provinciaux, en plein exercice de leur mandat, dont BANZA MONGA TUTU, Michel KAKUDJI MOMAT, Aimé KASONGO MANDE et KAYUMBA Wa KAYUMA furent tabassés, le 28 janvier 2010. Ils ont eu comme grief d’avoir déposé et soutenu trois motions de défiance contre le Questeur de l’Assemblée provinciale, les Ministres provinciaux des finances et celui des infrastructures. Il faut dire que l’examen de la recevabilité de leurs requêtes a suscité une vive controverse entre eux et le Président de l’Assemblée qui déclarait irrecevable la motion contre le questeur pour non respect de la procédure. L’incompréhension s’est surtout focalisée autour des articles 22 et 28 du Règlement Intérieur de l’Assemblée. Cette polémique a été si envenimée au point que les auteurs des motions ont décidé de quitter l’hémicycle pour protester contre ce qu’ils considéraient comme la mauvaise police des débats par le président de l’institution. En sortant de l’hémicycle, ces députés seront appréhendés puis molestés par des personnes étrangères à l’Assemblée Provinciale.[1]
Comme l’on peut bien le constater, après des années de « léthargie parlementaire » et subitement conscients de la sanction qui leur attend à la fin de la législature, timidement, une frange des députés provinciaux, à l’instar du courant rénovateur au Parlement National, sort du silence. Cela est d’autant vrai, l’on a beau dire que tout Parlement doit justifier son existence principalement par les deux attributions fondamentales qui fondent sa compétence : adopter la loi des hommes, et contrôler l’Administration chargée de l’appliquer. Cette double justification répond à la théorie de la séparation des pouvoirs de MONTESQUIEU. Pourtant, le Parlement provincial du Katanga jusqu’au jour de cet incident malheureux, a fait montre de l’amateurisme ou carrément ce qu’il convient d’appeler « l’analphabétisme parlementaire », « l’incultisme[2] démocratique », etc.
Il est certes vrai qu’avec les élections, nous avions dans une certaine mesure salué la victoire de la démocratie. Mais, une question demeure : Avons-nous choisi des bons acteurs ? La réponse est bien connue de tous. De plus en plus, nous déplorons amèrement la crise de légitimité que les Parlements provinciaux, institutions pivots de la démocratie – traversent. Au Katanga, le gouvernement provincial domine l’agenda; la cohabitation entre les deux institutions politiques provinciales basée sur les intérêts égoïstes et mesquins a engendré une gouvernance provinciale qui manque de transparence démocratique, et les citoyens se demandent à quand le bout du tunnel ?
De ce qui précède, l’on est en droit de se demander dans quelles mesures, l’Assemblée provinciale qui doit être le symbole de l’expression démocratique joue-t-elle encore un rôle dans le processus de décision politique de nos démocraties ? Ainsi, avec la fermeture temporaire du siège de l’assemblée provinciale du Katanga, par le ministre national de l’Intérieur, pour permettre à la justice de mener ses enquêtes sur le dossier, il faut que les députés réfléchissent sur leur rôle. Il est temps que le Parlement provincial cherche d’apparaître de plus en plus comme une institution à même de répondre à des attentes démocratiques profondes. Sans être le lieu unique des décisions importantes, le Parlement en est bien souvent la condition nécessaire. Il ne doit plus être « la chambre d’enregistrement » ou mieux « la caisse de résonance » que l’on dénonce, mais un acteur incontournable dans un système global de production de la norme : lieu de négociation de la décision finale, tribune d’affrontement des idées, meilleur moyen d’assurer un débat transparent et équilibré. Par ailleurs, le Parlement devra être de plus en plus, notamment dans sa fonction de contrôle, comme un acteur à même de répondre à l’exigence croissante de compte-rendu, constituant ainsi des garanties démocratiques : le Gouvernement provincial devra agir désormais sous le contrôle effectif des parlementaires.
Dans l’entre-temps et afin de rester dans la logique de la « tolérance zéro », ne faut-il pas penser à suspendre ou carrément remplacer tout le bureau de l’assemblée provinciale du Katanga car, une vielle sagesse africaine rappelle que le poisson commence à pourrir par la tête.
III. Résurgence des velléités ethnico – tribales au Katanga ?
Comme le malheur ne vient pas seul, il y a presque un mois que l’on a assisté à la résurgence des velléités tribalo – ethniques au Katanga. En effet, depuis un certain temps, le débat politique au Katanga a pris une tournure dangereuse en puisant son contenu dans la haine tribale et ethnique. Des jeunes de deux communautés de la province du Katanga, regroupées au sein des associations dites socio-culturelles – Balubakat et Sempya – Lwanzo sont entrées dans un antagonisme indescriptible en s’adressant des quolibets, lettres, pamphlets, appelant à la discrimination entre les ressortissants du nord et du sud Katanga, autour de la gestion des affaires publiques au Katanga et de la représentation au sein des institutions de la République selon des critères géopolitiques. De par et d’autre, il appert que l’appartenance à un groupe continue de définir le positionnement social, l’accès à des réseaux, des fonctions, des ressources. Ce qui est triste pour l’essor de la province cuprifère et le pays tout entier. Ayons présent à l’esprit, les méfaits de l’arme de l’épuration ethnique au Katanga, utilisée par certains compatriotes en 1992 -1993.
L’on se croirait au bon vieux temps où certains « politicailleurs » véreux faisaient usage de la carte ethnique pour diviser la population et affaiblir ainsi le mouvement pour la démocratie. Aprés des actes d’épuration ethnique, de slogan du type « Katanga utile et Katanga inutile », etc… Voilà que depuis un certain temps, l’on voit se ranger des semeurs de trouble et associations socio-culturelles dans la sphère socio-politique de la RDC et du Katanga en particulier.
Comme nous l’avons déjà relevé dans notre livre intitulé « La décentralisation en RDC : Une tour de Babel ? »[3], depuis l’annonce de la décentralisation avec son effet sur le « découpage territorial », l’on constate la levée des boucliers dans les états-majors de certaines associations ethnico-tribales, particulièrement du Katanga. Comme un fleuve irrigué par de nombreux affluents, l’on entend des voix s’élever pour ou contre le « découpage territorial », rappelant ainsi l’époque de la tour de Babel[4] avec son cortège de divisions et d’incompréhensions. Certains opérateurs socio-politiques soutiennent mordicus le processus compte tenu de leur attachement à de sentiments tribaux et/ou ethniques. Par contre ceux qui sont en défaveur de la décision craignent de perdre certains avantages. Chaque jour qui passe emmène avec lui un chapelet de scenarii.
Au-delà de tout, nous soutenons qu’il ne s’agit plus de décider si la « décentralisation » est une option, ou de ne pas la voir franchir l’étape du stade initial, mais plutôt de savoir comment la mettre en œuvre dans la pratique pour qu’elle puisse réaliser les objectifs qu’elle s’est fixés.
IV. En guise de conclusion : Appliquons aussi la « Tolérance 100% »
Ces actes décriés dans la présente réflexion sont au carrefour de l’intolérance et du déficit démocratique. Partout dans le monde, le manque de tolérance pose problème dans la vie socio-politique. Il se manifeste lorsque l’on refuse aux citoyens et autres opérateurs politiques de s’exprimer librement, lorsque les dirigeants, gouvernants et certains regroupements socio-politiques ne tolèrent pas les divergences de vues dans leurs rangs et, plus généralement, par un rejet pur et simple des autres points de vue.
Il est opportun de rappeler aux uns et aux autres que la jeunesse, l’avenir du pays est hétérogène et doit en principe faire la différence et se démarquer des autres « KULUNA ». Avec des tels actes d’intolérance alors que le pays est en quête d’une réelle démocratie et d’Etat de droit, l’on n’est pas sorti de l’ornière.
Que ce soit à l’assemblée provinciale ou dans les associations socio-culturelles ou ailleurs, la tolérance consiste à accepter et à respecter les droits fondamentaux et les libertés civiles des individus et des groupes dont on ne partage pas les points de vue. Tous les citoyens, y compris les acteurs politiques, ont pour obligation de pratiquer la tolérance dans leurs propos et dans leurs actes. Refus clair de l’axiome selon lequel « force fait loi », la tolérance est un principe fondamental de la démocratie. Bien plus, la démocratie est fondée sur l’acceptation et le respect d’autrui. La vie démocratique repose sur le droit d’être différent et l’acceptation, par tous, de cette différence, ce qui signifie qu’il faut respecter les différents points de vue et admettre l’utilité du dialogue pour régler les conflits.
L’intolérance en politique est l’expression d’une volonté de restreindre les droits d’une personne ou d’un groupe mal aimés parce qu’ils pensent différemment. Cette intolérance constitue une menace pour la démocratie en ce sens qu’elle fait une discrimination, voire vise à faire taire certaines personnes. Ainsi, le monde sera conquis par les idées, non par la force !
[1] Lire le communiqué de presse des ONG du Katanga
[2] Voulant tout simplement exprimer l’idée d’un manque de culture démocratique dans le chef de la population et de ses élus.
[3] Yav Katshung Joseph, La décentralisation en RDC : Une tour de Babel, Editions UniBook, Spuurs, Belgique, août 2009.
[4] La légende de la Tour de Babel est à la base un récit biblique qui raconte donc comment les descendants de Noé, qui parlent une seule langue, essaient de construire une tour assez haute pour toucher le ciel. En punition de leur vanité, les hommes perdent la possibilité de se comprendre et sont dispersés. Aucune cohésion n’étant possible entre eux, et la Tour de Babel resta inachevée. C’est donc là que se trouverait l’origine de la diversité des langues.
* Maître YAV KATSHUNG JOSEPH est Professeur à la Faculté de Droit de l’Université de Lubumbashi en RDC et Avocat au Barreau de Lubumbashi,propriet aire du Cabinet « YAV & ASSOCIATES » [ www.yavassociates. com ]. Il est en outre Chercheur et Consultant auprès de plusieurs institutions et organisations internationales, régionales et nationales. Il coordonne la Chaire UNESCO des Droits de l’Homme /Antenne de l’Université de Lubumbashi et Préside le CONTROLE CITOYEN. Il est auteur de plusieurs livres , articles scientifiques et avis en français et anglais.
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Dr. Joseph Yav
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