Source: Congoindependant
Deux bataillons de soldats rwandais sont arrivés lundi dans l’après-midi à Gemena, chef-lieu du district du Sud Ubangui. A Kinshasa, Joseph Kabila a annoncé sa détermination à «rétablir l’ordre public» à Dongo.
Kinshasa. Correspondance
«Inquiétude ce lundi à Gemena, chef- lieu du sud Ubangi», pouvait-on lire sur le site radiookapi.net lundi 7 décembre. Comment pourrait-il en être autrement ? La population de cette ville de la province de l’Equateur assiste, en effet, avec effroi à l’arrivée massive des troupes devant être déployées à Dongo. Après l’envoi d’un millier de policiers et de 500 éléments de l’armée (FARDC), un bataillon composé de 600 commandos – formés par des instructeurs belges – est arrivé sur le terrain dimanche 6 décembre.
Selon des témoins, deux bataillons de soldats rwandais sont arrivés dans l’après-midi de lundi à Gemena. «Les Rwandais ne passent pas inaperçus. En plus, quelques-uns ont été surpris entrain de parler en kinyarwanda», rapporte un des témoins. En décembre 2008, contre toute attente, Joseph Kabila signait un «accord secret» avec son homologue Paul Kagame. Jusqu’à ce jour, la teneur de cette convention n’est connue que de quelques membres de l’entourage présidentiel. Les opérations «Umoja Wetu», «Kimia» constituent sans doute des engagements pris dans le cadre de cet accord. Il en de même de l’incorporation précipitée des éléments du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple) au sein des Forces armées de la RD Congo ainsi que de la récente arrivée sur le sol congolais des «réfugiés congolais» en provenance du Rwanda.
Autosatisfaction
Dans son discours sur l’état de la nation, lundi 7 décembre, devant le Parlement réuni en Congrès, Kabila s’est souvenu de ce «deal» passé avec l’homme fort de Kigali. «Il fallait impérativement, urgemment, et quel qu’en soit le prix, changer la donne, a-t-il déclaré. C’est l’engagement que j’avais alors pris devant cette Auguste assemblée. Un engagement sous forme de pari fou, parce qu’il paraissait alors impossible à réaliser. Cet engagement a été tenu.» En guise de «preuves», le «raïs» de relever que «le drapeau congolais, symbole d’unité nationale, flotte à nouveau sur toute l’étendue du territoire national et tous les postes frontaliers des provinces du Nord Kivu et du Sud Kivu ont été replacés sous le contrôle des autorités légales et légitimes de notre pays». Sur un ton plein d’autosatisfaction, il ajoute : «On n’avait pas connu cela depuis pratiquement quinze ans.» Les rédacteurs du discours du «raïs» ont sans doute perdu de vue que, quinze années auparavant, la RD Congo s’appelait encore le Zaïre. Et que le commandant «Hyppo», alias Joseph Kabila, et les combattants de l’AFDL n’avaient pas encore foulé le sol du pays. Inutile de parler des groupes armés qui n’existaient pas encore.
Ce que Kabila ne dit pas c’est que la paix est loin d’être revenue dans les provinces du Kivu. Le déploiement des anciens combattants du CNDP, intégrés dans les FARDC et affectés dans les provinces du Sud Kivu et du Nord Kivu, a permis à cet ancien mouvement rebelle non seulement d’étendre mais aussi de consolider son emprise sur cette partie du Congo. Des observateurs estiment que ces deux régions présentent aujourd’hui le visage d’un «territoire occupé» par des éléments des FARDC à la loyauté douteuse. Le cas le plus flagrant est perceptible dans le Masisi où les éléments issus du CNDP imposeraient leur loi tout en narguant littéralement leurs “anciens” frères ennemis des FARDC.
Dans son allocution, «Joseph» n’a pas manqué d’évoquer la situation à Dongo en dénonçant «avec la plus grande fermeté les événements tragiques» survenus dans cette localité. Après avoir rappelé que les affrontements ont causé la mort de «plus d’une centaine de morts, dont des officiers de police», il a martelé : «Il est du devoir de tous les élus, de travailler à l’éradication de ce tribalisme d’un autre âge. Dans tous les cas, l’ordre public doit être, et sera rétabli.»
Madeleine Wassembinya
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