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Kabila dans la tourmente


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Par Le Pays

-Serait-ce du bout des lèvres que Yoweri Museveni de l’Ouganda et Paul Kagamé du Rwanda ont demandé aux rebelles de mettre fin à leur aventure ? En tout cas, il y a beaucoup de contradictions dans les propos et les gestes des deux chefs d’Etat.
Et, selon toute vraisemblance, la tenue du récent sommet tripartite de Kampala n’a pas empêché les rebelles de poursuivre leur avancée vers le sud. Reste à savoir s’ils tiendront le pari de débarquer prochainement dans la capitale congolaise comme nous le pressentions dans nos précédents écrits. Certes, Museveni et Kagamé ont fait l’effort d’échanger avec le président congolais qui, il y a peu, les vouait aux gémonies. En effet, jusqu’à la tenue du sommet, le chef de l’Etat congolais soutenait que les rebelles bénéficiaient de l’appui des régimes ougandais et rwandais, celui de Kigali en particulier.

Aurait-il donc fait amende honorable durant la rencontre pour ne pas subir le courroux des accusés ? Qu’aurait donc offert Kabila pour pouvoir bénéficier aussi promptement de leur compassion ? Etant donné les antécédents fâcheux, les présidents Museveni et Kagamé oseront-ils vraiment entreprendre des actions punitives sur le terrain ? Des doutes subsistent d’autant que leur injonction ne semble point avoir impressionné les rebelles. Il est prévu de tenir une conférence internationale des Grands Lacs sur la question. Mais que pourra-t-elle donner, le M 23 ayant opté de libérer définitivement le pays des griffes du clan Kabila ? Si par extraordinaire, pour sauver les apparences, les chefs d’Etat ougandais et rwandais s’étaient cru dans l’obligation morale d’interpeller la rébellion, il est par contre peu sûr qu’ils interviendront de manière ouverte sur le terrain pour stopper l’avancée des insurgés.

D’autant qu’à Kinshasa, en dépit de ses appels, Joseph Kabila a toujours du mal à faire l’unanimité autour de sa personne. Là-bas, des voix s’élèvent même pour réclamer sa démission. Visiblement, la classe politique congolaise demeure toujours aussi divisée. La rébellion, elle, progresse d’autant que les soldats de l’armée nationale se rendent ou s’enfuient. Les leaders du M23 entendent poursuivre les hostilités tant que des négociations sérieuses ne seraient pas ouvertes.

Le mouvement prend en compte les revendications sociales des populations et de la société civile, ajoutant que les problèmes de la démocratie et du respect des droits humains restent posés en RD Congo. A travers le pays, les Congolais manifestent de plus en plus leur colère suite à la chute de Goma. Ils s’en prennent aux autorités qu’ils trouvent incapables de stabiliser la région. Le M23, lui, en tire des dividendes. Face aux critiques, la majorité présidentielle crie au loup et sonne la mobilisation autour du chef de l’Etat. Elle compte sur l’union sacrée pour mettre fin à ce que ses membres appellent « l’agression du Rwanda ». Par contre, dans l’opposition, on se garde bien d’abonder dans ce sens. Deux thèses sont avancées : pour les uns, la déroute de l’armée nationale s’explique par le manque de légitimité du président Kabila.

Pour les autres, la solution réside dans la démission du chef de l’Etat congolais qu’on réclame à cor et à cri. Kabila apparaît donc aujourd’hui comme un homme seul, seul contre tous. C’est le propre de tous ceux qui arrivent au pouvoir par des voies détournées. Ils ont toujours de la peine à convaincre le peuple et à rassembler autour d’eux. Cette fois, le pouvoir de Kabila est réellement dans le désarroi. A preuve, son appel à la mobilisation de tous les Congolais pour protéger les acquis. C’est oublier que, de plus en plus en Afrique, le citoyen lambda ne tient plus à se laisser faire, encore moins à « mourir cadeau », c’est-à-dire pour un régime inique.

En RDC, des acteurs politiques ont toujours dénoncé les liens de condescendance entre le défunt père Laurent Kabila et les régimes ougandais et rwandais. Maintenant que l’héritier, Joseph Kabila, a des problèmes avec ceux qui ont toujours été considérés comme ses tuteurs, il paraît de moins en moins évident de voir toute la classe politique congolaise voler au secours de celui dont le régime semble vraiment aux abois. Comme quoi, le peuple congolais a besoin d’un président démocratiquement élu et affranchi de toute tutelle étrangère. A l’heure actuelle, la RD Congo est loin de constituer une référence. Bien au contraire ! Dans cette région des Grands Lacs, elle se présente comme la risée de tous. Une véritable plaie béante dont l’odeur pestilentielle dérange. Même si parmi ceux qui accourent à son chevet on en trouve qui ne se privent pas d’aider le régime à sucer le sang du peuple congolais.

Le régime Kabila et ses thuriféraires baignent dans l’opulence, pendant que la plupart des Congolais végètent dans une misère effroyable. Scandaleusement riche, la RDC ne parvient toujours pas à répondre à la demande sociale. Les droits humains ? Ils y sont une illusion. Depuis longtemps déjà, le président Joseph Kabila a convaincu les Africains que, réellement, il flotte à la tête d’un pays qui paraît trop grand pour lui. L’Etat semble réduit à sa propre personne et à son clan. Sinon, pourquoi une telle déconfiture ? La RD Congo aujourd’hui, c’est pratiquement un Etat à rebâtir, une nation à construire. Cela passe nécessairement par l’organisation d’une élection présidentielle vraie cette fois, dans laquelle respect des normes et transparence absolue seront effectifs.

En attendant, face aux problèmes qui perdurent, le mini sommet de Kampala n’aura pas apporté les solutions espérées. Tout au plus, aura-t-il révélé une solidarité de façade entre les chefs d’Etat ougandais et rwandais d’une part, et l’actuel chef de l’Etat congolais d’autre part. Mais, on l’aura compris : s’ils ne sont pas ouvertement et officiellement soutenus dans leur marche, les rebelles congolais n’en sont pas moins fondés à poursuivre l’assaut en direction de la capitale Kinshasa. En effet, pour Yoweri Museveni et Paul Kagamé, leurs revendications sont bien « légitimes ». Des attitudes pleines de contradictions qui en rajouteront sûrement aux tourments de Joseph Kabila.