Tag: Politique

  • Lambert Mende, la geste et la parole

    Lambert Mende, la geste et la parole

    -Avec son singulier rapport aux faits, Lambert Mende, le porte-parole du gouvernement congolais amuse et fascine autant qu’il irrite. Au point d’avoir été sanctionné par l’Union européenne.

    C’est un mercredi ordinaire au ministère de la Communication et des Médias, avenue Tabu-Ley (ex-Tombalbaye), à Kinshasa. Le maître des lieux, Lambert Mende Omalanga, tient son show hebdomadaire, le « point de presse », repris en direct sur la Radio-Télévision nationale congolaise (RTNC). Avec emphase, il livre son regard sur l’actualité. S’ensuit un jeu de questions-réponses avec les journalistes présents. Le ministre est rompu à l’exercice : cela va faire bientôt dix ans qu’il officie comme porte-parole du gouvernement.

    Toujours avec le même panache et cette verve déconcertante, au service du régime. « Au service de l’image de la RD Congo », reprend-il lorsqu’il nous reçoit, après sa conférence, dans le hall d’un hôtel de La Gombe. Avec sa démarche lente et la tête légèrement inclinée, il a serré quelques mains et reçu son quota d’« Excellence », avant de prendre place.

    Mende ne manque jamais une occasion de jouer sur la fibre patriotique. Quitte, parfois, à s’arranger avec la vérité. Sous prétexte de « combattre les fake news » – le ministre se réjouit que Donald Trump l’ait « suivi » dans cette démarche –, il lance des démentis en cascade. Parfois avant même d’avoir pris le temps de vérifier les faits rapportés.

    En février, il a d’emblée qualifié de « montage grotesque » une vidéo, largement relayée sur les réseaux sociaux, montrant des soldats congolais en train de perpétrer un massacre au Kasaï, dans le centre du pays. Le film était pourtant authentique, comme les autorités l’ont confirmé plus tard. « J’ai des sentiments, je peux me tromper, reconnaît-il aujourd’hui du bout des lèvres. J’ai eu du mal à croire qu’un Congolais, fût-il militaire, puisse se permettre une telle cruauté. »

    Un «  bon client » pour les médias

    Au sein même de la Majorité présidentielle, cette « méthode Mende » ne fait plus l’unanimité. « Une parole publique doit porter les valeurs de sécurité, de vérité. Lorsqu’elle cesse d’être crédible, elle conduit nos audiences vers des médias étrangers considérés comme fiables », tacle Tryphon Kin-Kiey Mulumba, dernier porte-parole du gouvernement de l’ère Mobutu, aujourd’hui kabiliste convaincu. Mais aux yeux de Mende, l’essentiel est ailleurs. « Chaque fois que l’image de la RD Congo est mise à mal, c’est mon devoir de chercher l’angle d’explication la plus valorisante pour le pays », estime-t-il.

    Malgré ces travers, le ministre continue d’être invité par la presse internationale. « Bon client » pour les médias, il est l’un des rares membres de l’entourage du président à décrocher systématiquement son téléphone, quel que soit le sujet. « Quand il s’agit d’interviews, mon chef est toujours disponible », confirme l’un de ses collaborateurs. Cet homme affable est pourtant, aussi, le censeur des journalistes.

    Aux yeux de l’Union européenne, son rôle est central : il fait d’ailleurs partie, depuis le 29 mai, des seize responsables du pays qu’elle a sanctionnés (gel des avoirs et interdiction de voyager). Bien que, contrairement aux autres, le porte-parole du gouvernement n’ait pas été accusé d’être lié à des violences contre les Congolais. « Ce type de sanction est prise à l’unanimité des pays membres. Donc, quand quelqu’un irrite tout le monde autour de la table, cela lui tombe plus facilement dessus », explique une source diplomatique européenne.

    En public, il feint de ne pas être affecté par cette décision. Mais, au cours de notre entretien, le voici qui se défait, pour une fois, de sa posture. La voix enrouée, les traits tirés, il encaisse : « Ma mère souffre d’une maladie grave en Belgique. Mon seul regret aujourd’hui, c’est de ne pas pouvoir aller la voir. » Touché ? Il l’est.

    Mais l’homme est surtout en colère contre cette « petite Belgique », épicentre, selon lui, de tous ces « milieux de puissants intérêts qui en veulent à la RD Congo ». « Certains néolibéraux tentent de reproduire le schéma du roi Léopold II. Très intelligent, il avait su vendre aux puissances de l’époque l’idée d’une colonie internationale dans laquelle tout le monde aurait accès à cet immense coffre-fort naturel qu’est le Congo. Aujourd’hui, nous ne l’acceptons pas ! » ressasse cet homme, qui se dit lumumbiste.

    Premiers pas en politique

    Le ministre est né dans la même région que ce héros de l’indépendance, en février 1953. Il ne quittera le Sankuru qu’après avoir obtenu son diplôme d’État (l’équivalent du baccalauréat). « Fils de paysan », troisième enfant d’une fratrie de onze, le jeune Tetela s’essaie alors au droit à Kinshasa. Ces années d’étudiant marquent aussi ses premiers pas en politique.

    D’abord au sein de la Jeunesse du Mouvement populaire de la révolution (MPR), alors parti-État. « Ce n’était pas par conviction, se justifie-t-il. À l’époque, même un enfant à naître en était, constitutionnellement, membre. » Il n’est alors qu’« un petit animateur à la RTNC », jure-t-il. Il réfute, en tout cas, l’étiquette d’ancien mobutiste.

    À la même période, il est approché et « recruté » par le Mouvement national congolais-Lumumba (MNC-L), qui œuvre alors dans la clandestinité. À 27 ans, il s’envole pour la Belgique, bourse d’études en poche. Celle-ci lui sera retirée deux ans plus tard, lors de son premier retour au pays, en 1982. Fiché et suivi par le Service national d’intelligence et de protection (SNIP), l’étudiant est arrêté. Mais il parvient à s’évader. « N’eût été la générosité de Koli Elombe, alors secrétaire d’État à l’Enseignement, je ne serais peut-être plus en vie. C’est lui qui m’a permis de quitter le territoire », confie Mende.

    Sans viatique cette fois-ci. Désormais exilé politique, il se rapproche du Centre national de coopération au développement (CNCD-11.11.11), une structure très engagée en faveur de l’instauration de la démocratie au Zaïre. Pris en charge, il peut terminer sa licence en criminologie et voyage beaucoup, notamment en Libye. Voilà qui renforce les suspicions de Kinshasa sur la nature de son militantisme.

    Le retour au pays

    En mars 1984, lorsque la capitale est secouée par l’explosion de deux bombes, Mende est soupçonné. Selon une source sécuritaire de l’ancien régime, son nom est même signalé à Interpol comme étant celui du « terroriste » à l’origine de ce double attentat. L’intéressé a toujours démenti tout rôle dans cette affaire. Mais son frère Laurent est traqué, arrêté, puis condamné. Il passera sept ans en prison.

    Depuis la Belgique, Mende mène des « campagnes médiatiques » pour « affaiblir le régime de Mobutu ». Puis, au début des années 1990, ce dernier commence à lâcher du lest, ce qui permet à Mende de rentrer au pays. Sous pression, le président zaïrois instaure le multipartisme et organise une Conférence nationale souveraine (CNS). Mende lance alors le « MNC-Originel », nouvelle aile d’un mouvement lumumbiste plus que jamais morcelé. À l’issue des travaux de la CNS, Mende entre au nouveau gouvernement, alors dirigé par l’opposant Étienne Tshisekedi.

    Tshisekedi n’en pouvait plus d’entendre Mende défendre l’indéfendable

    De ce dernier, décédé le 1er février 2017, il garde le souvenir d’un « grand homme » dont il admirait « la force des convictions, qui, nuance-t-il aussitôt, confinaient parfois à l’entêtement ». À l’égard de son ancien ministre, Tshisekedi n’a pas toujours été tendre : les derniers temps, il le surnommait le « Tshaku national » (« perroquet », en lingala). « Le vieux n’en pouvait plus d’entendre Mende défendre l’indéfendable », traduit un proche de Tshisekedi.

    Terrain glissant

    Car entre-temps Mende a opéré un rapprochement avec la kabilie qui n’allait pas de soi. Un mois avant la chute de celui-ci, il était encore le vice-Premier ministre de Mobutu. Mais lorsque les troupes de Laurent-Désiré Kabila entrent à Kinshasa, il se tait, espérant déjà pactiser avec les nouveaux maîtres du pays. En vain. Les compagnons du Mzee ne lui font pas confiance. « Certains » tenteront même de l’éliminer, soutient-il.

    Je ne me vois pas dans la peau d’un dauphin

    Quinze mois plus tard, il rejoint le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), une rébellion anti-Kabila soutenue par le Rwanda et l’Ouganda. Un épisode en treillis militaire qu’il ne regrette pas. « Je n’avais pas d’autre choix que de gagner l’Est », assure-il. Une dissidence et un accord politique plus tard, il refait le chemin inverse et se rapproche enfin de la kabilie pendant la période de transition dite « 1 + 4 ».

    Aujourd’hui, sa formation, rebaptisée Convention des Congolais unis (CCU), figure parmi les « 14 partis significatifs de la majorité », avec six députés nationaux, un sénateur et quatre élus provinciaux. De quoi faire de lui un possible successeur de Kabila ? « Non ! Non ! Non ! Je ne me vois pas dans la peau d’un dauphin », clame-t-il. Ce terrain-là est décidément trop glissant. Même pour Mende.

    Le premier censeur

    Parmi les journalistes, l’audace des saillies de Lambert Mende Omalanga prête souvent à sourire.

    Mais le rôle répressif du porte-parole du gouvernement est loin de les amuser. C’est lui, en effet, qui signe les accréditations aux journalistes étrangers et délivre les autorisations d’émettre.

    RFI en a notamment fait les frais : la radio française est coupée depuis novembre 2016 et, en juin 2017, l’accréditation de sa correspondante Sonia Rolley n’a pas été renouvelée.

    Les chaînes de télévision proches des opposants Moïse Katumbi et Jean-Claude Muyambo sont, elles aussi, toujours fermées, contrairement à ce que prévoyaient les accords du 31 décembre 2016 entre pouvoir et opposition.

    Enfin, le 12 juillet 2017, Mende a pris un « arrêté » durcissant les règles applicables aux correspondants étrangers à Kinshasa. Désormais, tous « leurs déplacements en dehors de la ville » seront soumis à une « autorisation préalable » du ministre.

    Avec J.A

  • jean Marc Kabund sceptique quant au rapatriement du corps de Tshisekedi

    jean Marc Kabund sceptique quant au rapatriement du corps de Tshisekedi

    -Le secrétaire général du principal parti d’opposition congolais, l’UDPS, Jean-Marc Kabund-a-Kabund, a affiché son scepticisme quant au rapatriement début septembre à Kinshasa de la dépouille du défunt président du parti, Etienne Tshisekedi wa Mulumba, décédé le 1er février dernier à Bruxelles.

    Document signé

    Un accord a été signé le 6 juin en vue de l’organisation des obsèques de M. Tshisekedi par trois parties: le gouvernement congolais, en la personne du ministre de l’Intérieur, Emmanuel Ramazani Shadary, la famille du défunt, réprésentée par son frère, Mgr Gérard Mulumba Kalemba, et M. Kabund, au nom de l’UDPS.

    Le gouvernement, qui a signé en dernier (lieu), devait le (ce document) mettre à notre disposition dès sa signature. Malheureusement, il ne l’a pas fait“, a affirmé mardi le responsable de l’UDPS à l’agence Belga.

    L’existence de ce document de deux pages n’a toutefois été révélée que le 11 août, date à laquelle il a été publié sur les réseaux sociaux.

    Il prévoit notamment qu’un “avion spécial” soit dépêché à Bruxelles pour “ramener à Kinshasa la dépouille et les membres de la famille s’y trouvant“.

    Comment cela va-t-il se passer?

    Selon M. Kabund, arrivé lundi à Bruxelles notamment pour rencontrer la veuve de M. Tshisekedi, Marthe, ce document n’a jamais été remis à l’UDPS après signature.

    Quid de la suite? “, s’est-il interrogé en rappelant qu’une équipe conjointe de dix personnes (quatre pour le gouvernement, trois pour la “famille biologique” et autant pour le parti) devait être mise sur pied. Mais elle ne l’a pas encore été, a assuré le responsable de l’UDPS.

    Je me pose la question s’ils (le gouvernement) vont affréter l’avion pour rapatrier le corps et dans quel cadre. Comment cela va-t-il se passer concrètement? “, s’est-il encore demandé.

    Avec RTBF

  • Les élections des gouverneurs se préparent dans sept provinces

    Les élections des gouverneurs se préparent dans sept provinces

    -En RDC, des nouvelles élections -indirectes- des gouverneurs sont programmées à la fin de ce mois, le 26 août, par la Ceni. Elles concernent sept des 26 provinces que compte le pays. La Ceni, la Commission électorale nationale indépendante, a publié la liste définitive des candidats à la Radio télévision nationale samedi, mais il y a quelques couacs notamment dans le Haut-Katanga.

    En clair, il faut remplacer les anciennes autorités par de nouvelles figures, et là se posent quelques problèmes… La procédure de déchéance de certains gouverneurs a été viciée, selon le constat établi par la Cour constitutionnelle.

    Ainsi, le cas de Jean-Claude Kazembe, le gouverneur de la province du Haut-Katanga qui a été réhabilité après son recours devant cette haute juridiction. Mais cette démarche auprès de la plus haute instance judiciaire du pays ne semble pas avoir été prise en compte par la Céni puisque le Haut-Katanga figure malgré tout parmi les entités où doivent être organisées les élections du 26 août.

    C’est pourquoi Jean Claude Kazembe est retourné à la Cour constitutionnelle pour empêcher le scrutin destiné à le remplacer. Son avocat, Me Richard Bondo, estime en tout cas qu’il n’y a pas vacance à la tête de cette province, le gouverneur ayant été réhabilité.

    Aussi, pour ces élections des gouverneurs, les observateurs notent également l’absence quasi-totale de candidats de l’opposition radicale. La Majorité présidentielle est la seule force politique face à une multitude des candidats indépendants dans toutes les sept provinces concernées.

    rfi

  • Joseph Olenghankoy: une nomination contestée en RDC

    Joseph Olenghankoy: une nomination contestée en RDC

    Olenga Nkoy, membre du Rassemblement, lors de travaux du dialogue national inclusif à Kinshasa, le 14/12/2016. Radio Okapi/Ph. John Bompengo.

    -Celle de Joseph Olenghankoy, le président du Rassemblement Kasavubu, l’aile dissidente du Rassemblement, à la tête du CNSA, le Conseil national du suivi de l’accord. C’était samedi. Une « désignation controversée », donc, estime le site d’information congolais 7 sur 7. « Le MLC et l’UNC notamment la boudent. Déçus par la nouvelle, les délégués du Front pour le Respect de la Constitution ont quitté la salle avant la fin de la séance. (…) Le CNSA, rappelle 7 sur 7, aura pour principale tâche de proposer un calendrier électoral consensuel après concertation avec le gouvernement et la Centrale électorale (la CENI). Cette institution d’appui à la démocratie compte 28 membres. »

    « Dernière institution de la transition décidée par l’accord de la Saint Sylvestre, le CNSA se met ainsi en place sur fond de contestation, pointe également Cas-Info. Son président, frondeur en chef du Rassemblement, n’attire pas grand monde pour applaudir sa désignation. ‘Il s’agit pour la Majorité présidentielle d’essayer de mettre en difficulté l’opposition en faisant croire que c’est un de leur qui a été choisi’», analyse un journaliste d’un grand quotidien à Kinshasa.

    Jouer encore les prolongations ?

    En fait, précise Cas-Info, cette nomination « pourrait constituer un moyen pour le Pouvoir de sortir de la mauvaise passe qu’il traverse à 5 mois de l’échéance fixée par le compromis du Centre interdiocésain, mais aussi à plus d’un mois de l’arrivée cruciale d’une délégation du FMI. Elle pourrait justement lui donner des arguments pour suggérer l’idée d’un 3e round de pourparlers afin de tenter de jouer de nouveau les prolongations. Une perspective d’ores et déjà rejetée par le Rassemblement. La principale coalition de l’opposition qui clôturait samedi son 2e conclave a appelé le chef de l’État à libérer ‘sans délai’ le processus électoral tout en prévenant, au cas contraire, d’’entreprendre avec le Peuple congolais, toutes les actions nécessaires jusqu’au départ de Joseph Kabila du pouvoir’. Dès les 8 et 9 Août prochains, précise encore Cas-Info, le Rassemblement appelle à une double journée ville morte à travers tout le pays. » Et le site congolais de conclure, un brin railleur : « la Majorité présidentielle pourra toujours compter sur le président du CNSA pour apporter un son de cloche différent. »

    Le Potentiel à Kinshasa hausse le ton : cette nomination (de Joseph Olenghankoy) plombe les objectifs dévolus à cette institution chargée de veiller à la tenue d’élections dans le délai convenu dans l’Accord. « Cette nomination n’est ni plus ni moins, que le prix de la trahison accordé aux individus qui ont accepté d’accompagner la MP dans son plan machiavélique d’assassiner la démocratie en RDC. »

    Flibusterie…

    Les critiques sont acérées également dans la presse ouest-africaine… « La flibusterie de Kabila continue », s’exclame Aujourd’hui à Ouagadougou. « Mais pouvait-il en être autrement ? Depuis que l’opposant historique Etienne Tshisekedi est passé de vie à trépas, Joseph Kabila a multiplié les actes de défiance vis-à-vis de l’accord. Une convention qui n’en est plus et qui est devenu un parchemin gribouillé à l’image et à la mesure de ses ambitions qui ne font plus l’ombre d’un doute : rester au pouvoir. »

    « La machine du CNSA est loin d’être en marche, renchérit L’Observateur Paalga, toujours au Burkina. Mais quand bien même elle serait fonctionnelle, on se demande à quoi elle pourrait servir. Car comment peut-on suivre un Accord qui n’existe pas ? Nous sommes en plein paradoxe. L’arrangement concocté par la Conférence épiscopale nationale du Congo ayant été passé par pertes et profits, le CNSA devient ipso facto caduc du fait de Kabila qui en a méticuleusement déchiré le texte après avoir renvoyé les prélats à leurs chers paroissiens. Basta cette comédie qui ne fait pas rire grand monde et risque de se terminer par une tragédie ! »

    Et le quotidien ouagalais de s’interroger : « à quoi peut bien servir ce machin sans objet et son président, Olenghankoy, si ce n’est à faire le jeu d’un Kabila passé maître dans l’art de rouler ses vis-à-vis dans la farine ? »

    Avec RFI

  • la composition de la direction du Conseil de suivi de l’accord dévoilée

    la composition de la direction du Conseil de suivi de l’accord dévoilée

    -En République démocratique du Congo, après de longs mois de tractations, la répartition des postes au sommet du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA) du 31 décembre a été annoncée samedi soir, le 22 juillet. Pour les trois postes de vice-présidents, Adolphe Lumanu a été nommé pour représenter la Majorité présidentielle. Mais les deux autres posent problème. Celui destiné au Front pour le respect de la Constitution, piloté par le MLC, reste à pourvoir. Et Vital Kamerhe, désigné – en son absence – pour le 3e poste, le refuse. Enfin, c’est Joseph Olenghankoyi qui a été choisi pour présider le CNSA pour le compte du Rassemblement de l’opposition, dont il est un dissident.

    Dans le texte du 31 décembre, ce poste était réservé au président du conseil des sages du Rassemblement des forces acquises au changement, et Etienne Tshisekedi avait été choisi de par sa stature. Depuis la disparition de l’opposant historique en février, le pouvoir et ses alliés ont revu les critères de désignation à la tête du CNSA.

    La Cenco s’est retrouvée dans l’impossibilité de poursuivre son rôle de médiation. Et, selon la nouvelle formule, ce sont les présidents des deux chambres du Parlement qui ont supervisé la réunion des délégués appelés à désigner par consensus la direction du CNSA.

    Le Fonus Joseph Olenghankoyi a ainsi été porté à la présidence pour le compte du Rassemblement. Il sera secondé par trois vice-présidents dont l’un reste à désigner. Celui-ci devra sortir des rangs du FRC piloté par le MLC.

    Les deux autres vice-présidents sont déjà connus. Il s’agit d’Adolphe Lumanu qui vient de la Majorité et Vital Kamerhe, de l’UNC, qui, lui, était absent de la réunion. L’opposant Vital Kamerhe refuse de prendre le poste. Selon lui, les choses ont été faites en violation de l’accord de la Saint Sylvestre. L’ancien président de l’Assemblée nationale dit s’en tenir à l’organisation des élections avant fin décembre prochain.

    Avec RFI

  • Le Rassemblement de l’opposition trouve porte close et accuse le pouvoir de tenter de bloquer son conclave

    Le Rassemblement de l’opposition trouve porte close et accuse le pouvoir de tenter de bloquer son conclave

    Les membres du Rassemblement lors d’un point de presse le 24/04/2017 à Kinshasa au siège de ce parti UDPS. Radio Okapi/Ph. John Bompengo

    -L’ouverture vendredi 21 juillet du conclave du Rassemblement de l’opposition en RD Congo s’est déroulée dans une ambiance très particulière : les portes de la salle réservée par l’opposition sont restées fermées jusqu’à la fin de la journée.

    À la grande surprise des membres du Rassemblement, les portes du centre Béthanie, où devait se tenir le conclave étaient fermées ce vendredi matin. Selon Christophe Lutundula, cadre de la principale plateforme de l’opposition : « Les  responsables du Centre nous ont clairement dit que les services de sécurité ont donné l’instruction de ne pas ouvrir les portes puisque nous n’avions pas obtenu une autorisation. »

    Plusieurs heures de tractations

    Après plusieurs heures de tractations, le Rassemblement a finalement décidé d’ouvrir ses assises en début d’après-midi, dans la cours du centre où Félix Tshisekedi, président du Rassemblement a lu un discours. Pour Christophe Lutundula, « la démocratie ne représente rien pour Joseph Kabila et ses partisans ». Ce cadre du Rassemblement ajoute que « la loi a toujours autorisé les rencontres politiques, tant qu’elles sont organisées dans des lieux clos, comme le fait souvent le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie [PPRD], le parti de Joseph Kabila. »

    Le gouvernement évoque la « désorganisation » du Rassemblement

    Contacté par Jeune Afrique, le vice-ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, Basile Olongo réfute toute accusation contre le gouvernement, qui ne s’est pas prononcé officiellement sur cette rencontre : « Le Rassemblement cherche à nous impliquer dans les échecs qui ne nous concerne pas. L’échec de leur rencontre est sans doute dû au non paiement de la salle ou à une désorganisation de leur part. »

    Le Rassemblement de l’opposition va clôturer samedi 22 juillet le conclave au siège de l’UDPS, à l’issue duquel une « feuille de route des actions pacifiques » prévues avant la fin de l’année seront rendus public, comme l’expliquait à Jeune Afrique la semaine dernière Martin Fayulu, l’un des cadres du Rassemblement.

    Avec JA

  • Audience en appel du procès Moïse Katumbi mercredi à Lubumbashi

    Audience en appel du procès Moïse Katumbi mercredi à Lubumbashi

    -Une audience en appel a été fixée à mercredi à Lubumbashi, principale ville du sud-est de la RDC, dans l’affaire pour laquelle l’opposant congolais Moïse Katumbi, candidat déclaré pour la présidentielle, a été condamné à trois ans de prison.

    Il s’agit d’un procès en appel, a expliqué à VOA Afrique Me Jean-Jospeh Mukendi, l’avocat de l’opposant.

    ” Le tribunal de grandes instances a fixé à mercredi à Lubumbashi la cause en appel qui oppose M. Katumbi au ministre public “, a-t-il précisé.

    Moïse Katumbi avait été condamné par contumace à trois ans de prison en mai 2016 pour spoliation d’immeuble, dans un procès dont le plaignant était un sujet grec Alexandros Stoupis Emmanouil.

    La condamnation était prononcée alors que M. Katumbi venait de quitter le pays pour des soins à l’étranger sur autorisation du procureur général de la République.

    L’opposant souffrait des effets de violences physiques subies lors des altercations entre ces partisans et les forces de l’ordre alors qu’il se rendait au parquet, convoqué pour une affaire de recrutement des mercenaires dont il était accusé.

    L’affaire des mercenaires avait éclaté juste après la déclaration de la candidature de l’ancien gouverneur de l’ex-gouverneur de l’ancienne province du Katanga à la présidentielle. Ses proches ont été arrêtés et parmi eux, un de ses garde du corps américains, Daryl Lewis, qui a été relâché quelques mois plus tard. Mais les autres croupissent depuis en prison sans procès.

    Récemment, le procureur de la république a révoqué l’autorisation accordé à Katumbi pour des soins à l’étranger au motif qu’il aurait violé la consigne de garder le silence à laquelle il était assigné.

    Avec AFP

  • Martin Fayulu : « Élections ou pas, Joseph Kabila n’aura pas un an de plus »

    Martin Fayulu : « Élections ou pas, Joseph Kabila n’aura pas un an de plus »

    -Après l’annonce faite par Corneille Nangaa, président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de la probabilité d’un report des élections en RDC, l’opposition congolaise ne décolère pas. L’opposant Martin Fayulu, cadre du Rassemblement, revient pour Jeune Afrique sur ce que dit l’accord du 31 décembre.

    L’annonce faite vendredi 7 juillet, à Paris, par Corneille Nangaa, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de reporter les élections présidentielle et législatives en RD Congo au-delà de 2017 ne passe pas, pour Martin Fayulu. Celui-ci est également le coordonnateur de la Dynamique de l’opposition. Il ne jure que par l’accord du 31 décembre.

    Candidat déclaré à la présidentielle pour le compte du parti politique qu’il préside, l’Ecidé (Engagement pour la citoyenneté et le développement), le député revient sur ce que dit l’accord de la Saint-Sylvestre, dont il est l’un des signataires, sur la tenue de la présidentielle.

    L’homme d’affaires évoque également l’organisation du conclave du Rassemblement, initialement prévu le 8 juin dernier. Cette réunion devrait fixer la position de la principale plateforme de l’opposition congolaise sur le report des élections. Le leader de l’Ecidé a exprimé son souhait de voir le Rassemblement organiser des primaires pour se choisir un seul candidat à la prochaine présidentielle.

    Jeune Afrique : Corneille Nangaa, président de la Commission électorale nationale indépendante  a déclaré que la présidentielle ne sera « probablement pas possible en 2017 ». Quelle est la réaction du Rassemblement ? 

    Martin Fayulu : Face aux déclarations irresponsables de M. Nangaa, le Rassemblement pense que les élections doivent avoir lieu cette année. C’est impératif. Cela a été décidé lors du dialogue mené par la Cenco [Conférence épiscopale nationale du Congo, NDLR] et nous nous tenons à ça. M Nangaa a accepté une responsabilité, il maîtrise bien la loi portant organisation et fonctionnement de la Céni et il connait bien notre Constitution.

    Il était appelé au dialogue, et nous nous étions convenu que le 31 juillet, nous pourrions avoir le fichier électoral et que les élections pouvaient avoir lieu fin décembre [2017, NDLR]. Les spécialistes nous avaient dit que, dès que nous avions le fichier électoral, nous n’aurons droit qu’à 110 jours pour organiser les élections. Aujourd’hui, nous pensons que Joseph Kabila essaie de nous distraire. Et il utilise Corneille Nangaa pour faire ses ballons d’essais, pour déstabiliser la population.

    Joseph Kabila continue avec des manœuvres dilatoires pour demeurer au pouvoir

    Quel scénario envisagez-vous pour les mois à venir ?

    Le rassemblement a déjà réfléchi à une position claire qui vous sera communiquée le 22 juillet. Le Rassemblement va donner exactement toutes les résolutions de son conclave et donner sa position sur le report des élections.

    L’accord de la Saint-Sylvestre, que vous avez signé, n’avait-il pas prévu l’éventualité du report des élections, en insistant sur l’évaluation du processus électoral entre le Conseil national de suivi de l’accord (CNSA), le gouvernement et la Céni ?

    L’accord de la Saint-Sylvestre ne parle pas de l’éventualité de reporter les élections. L’accord parle de l’évaluation régulière du travail fait par le gouvernement, le Parlement, la Céni et tout ce qui entoure l’organisation matérielle des élections.

    Pourtant, la composition du bureau de la CNSA tarde à être connue… 

    Il n’y a pas application de l’accord. Joseph Kabila continue avec des manœuvres dilatoires pour demeurer au pouvoir. Il utilise Corneille Naanga pour l’aider dans cette stratégie de repousser sans cesses aux calendes grecques. Élections ou pas, Joseph Kabila n’aura pas un an de plus. L’accord lui a donné un sursis d’un an, il n’en aura pas plus. Il doit partir le 31 décembre 2017.

     L’accord dit que Joseph Kabila ne pourra plus jamais se représenter dans une élection présidentielle en RD Congo

    En 2016, le Rassemblement avait déjà donné un ultimatum à Joseph Kabila. Cette fois, comment comptez-vous vous y prendre pour obtenir son départ ?

    L’année dernière, l’ultimatum avait été lancé au regard de l’Article 70 de la Constitution [qui stipule que le président est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans, NDLR]. La loi dit que trois mois avant l’organisation des élections, il faut que la Céni présente un calendrier électoral.

    Ensuite, il y a eu la proposition du dialogue par la communauté internationale, par le biais de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC), avec l’accompagnement des présidents José Eduardo dos Santos [président de l’Angola, NDLR] et de Denis Sassou Nguesso [président du Congo] sous l’égide des évêques. Mais aujourd’hui, l’accord de la Saint-Sylvestre stipule que Monsieur Kabila ne pourra plus jamais se représenter à une élection présidentielle en RD Congo. C’est acté et écrit dans l’accord. L’accord confirme qu’il n’y aura ni changement de la Constitution, ni révision de celle-ci, quelle que soit la voie empruntée.

    Moïse Katumbi et vous-même vous êtes déjà déclarés candidats pour la prochaine présidentielle. L’UDPS fait également pression sur Félix Tshisekedi pour qu’il présente sa candidature. Comment voyez-vous l’avenir du Rassemblement ?

    Le problème, ce n’est pas de se déclarer candidat à la présidentielle. Au contraire, cela montre la vivacité et la démocratie au sein du Rassemblement. L’essentiel, c’est comment nous allons y arriver, en bout de course.

    Le problème, c’est aussi que du coté des kabilistes, personne n’ose se présenter pour être candidat à la présidentielle, parce qu’ils pensent que ce serait un crime de lèse-majesté.

    La RDC a besoin d’un enfant du pays capable de comprendre sa complexité

    Êtes-vous toujours favorable à l’organisation d’une primaire au sein du Rassemblement, pour désigner un candidat à la présidentielle ?

    Je suis toujours favorable à ce que nous trouvions un mécanisme cohérent, transparent et correct pour la désignation d’un candidat commun et qui soit approuvé par tous. Il ne faut pas avoir peur de la vérité, tout en mettant en avant des critères clairs pour que la personne la plus compétente puisse être désignée. La RDC a besoin d’un enfant du pays, capable de comprendre la complexité du monde et du Congo pour aller de l’avant.

    Un possible retour de Vital Kamerhe au sein du Rassemblement est-il envisageable ?

    Le Rassemblement a besoin des gens de conviction, intègres, responsables, disciplinés et prêts à se sacrifier pour le pays. Le Rassemblement n’a pas besoin de démagogues.

    La tenue du conclave du Rassemblement, initialement prévu les 8 et 9 juin dernier a été reporté sine die. Quand aura-t-il finalement lieu ?

    Nous travaillons déjà en commission. Nous livrerons nos conclusions le 22 juillet prochain, lors d’une cérémonie.

    Avec Jeune Afrique

  • Le Parquet retire à Moïse Katumbi son autorisation de séjourner à l’étranger, son camp dénonce un « acharnement »

    Le Parquet retire à Moïse Katumbi son autorisation de séjourner à l’étranger, son camp dénonce un « acharnement »

    -Dans une correspondance adressée à l’un des avocats de Moïse Katumbi à Kinshasa et dont Jeune Afrique a pu consulter une copie, le parquet général de la République indique avoir retiré à l’ancien gouverneur du Katanga l’autorisation de séjourner à l’étranger pour des soins et lui demande de se présenter devant la justice congolaise. Un “acharnement”, dénonce l’entourage de l’opposant.

    Pas d’apaisement en vue entre le régime de Kinshasa et l’opposant Moïse Katumbi. Les deux camps se rendent désormais coup pour coup. Et c’est de nouveau au tour de Flory Kabange Numbi, procureur général de la République, de contre-attaquer. Dans un courrier datant du 20 juin, envoyé à la défense du dernier gouverneur de l’ex-Katanga et dont Jeune Afrique a pu consulter une copie, ce haut-magistrat annonce qu’il « retire à [Moïse Katumbi] l’autorisation qui lui avait été accordée le 20 mai 2016 » à la suite de sa « requête en expatriation pour des raisons de soins médicaux en Afrique du Sud ».

    « J’ai le regret de porter à votre connaissance que votre client [Moïse Katumbi] n’a pas observé le devoir de réserve qui lui était imposé en ce qui concerne les faits ayant donné lieu à l’instruction du dossier judiciaire en cours [celle relative au recrutement présumé de mercenaires étrangers, NDRL] », écrit le procureur à l’un des avocats de l’opposant en exil. Par conséquent, Katumbi est « tenu dès réception de la présente de se présenter devant le magistrat instructeur », conclut-il.

    Alexis Thambwe-Mwamba, le trouble-fête

    Cette décision du parquet général de la République intervient quatre jours seulement après la publication de la lettre du Haut-commissariat aux droits de l’homme des Nations unies demandant à Kinshasa de prendre les « mesures nécessaires » afin de permettre à Moïse Katumbi de rentrer au pays en homme libre et de participer à la présidentielle à venir en RDC.

    Quelques jours après cette publication, Alexis Thambwe-Mwamba jouait au trouble-fête. En séjour à Paris, le garde de Sceaux congolais avait déclaré en effet, le 21 juin, que Moïse Katumbi avait selon lui une double nationalité. Ce qui, à croire le ministre d’État, empêcherait Katumbi de se présenter au scrutin présidentiel en RDC, la nationalité congolaise étant « une et exclusive », selon les termes de la Constitution congolaise en vigueur. Un « montage grotesque », dit-on dans l’entourage de l’ancien gouverneur, qui reproche au ministre de vouloir « se substituer à la Cour constitutionnelle et à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ».

    Un « acharnement » de Kinshasa

    Le camp Katumbi dénonce un « acharnement » du régime en place à Kinshasa. « Dans son champ régalien de protéger les Congolais, l’État est absent. Nous avons l’impression qu’il ne s’occupe que de Moïse Katumbi. Y aura-il bientôt un ministre chargé de Moïse Katumbi ? » ironise Olivier Kamitatu, porte-parole du candidat déclaré à la présidentielle. « Tout ceci est cousu de fil blanc et participe à l’instrumentalisation de la justice », déplore-t-il.

    De fait, « nous considérons que c’est le ministre de la Justice et le parquet général de la République qui n’ont pas respecté leur devoir de réserve dans cette machination judiciaire relative à un prétendu recrutement de mercenaires : on a vu Alexis Thambwe-Mwamba se débattre sur des chaînes de télévision étrangères pour tenter de démentir les 500 mercenaires qu’il avait pourtant annoncé, violant ainsi le secret d’instruction », poursuit Kamitatu.

    Y aura-il bientôt un ministre chargé de Moïse Katumbi ?

    Le vice-président du G7 ne comprend pas non plus pourquoi cette autorisation de sortie accordée en mai à Katumbi n’avait pas suspendu toutes les procédures judiciaires engagées contre son bénéficiaire. Au contraire, « Katumbi a été condamné dans un autre affaire de spoliation immobilière montée de toutes pièces. La juge a avoué avoir prononcé son jugement, revolver sur la tempe », rappelle-t-il.

    Qu’à cela ne tienne, « Moïse Katumbi se prépare à rentrer au pays et demande aux Congolais de lui réserver un accueil triomphal, mouchoirs blancs à la main », indique Olivier Kamitatu, rappelant que le rapport des évêques avait déjà qualifié de « mascarades » toutes ces affaires judiciaires collées à son champion.

    J.A

  • Alexis Thambwe Mwamba: en cas de convocation, «je me rendrai» chez le juge

    Alexis Thambwe Mwamba: en cas de convocation, «je me rendrai» chez le juge

    -Coup de tonnerre sur les relations entre Bruxelles et Kinshasa. Il y a une semaine, on a appris que la justice belge poursuivait le ministre congolais de la Justice pour crime contre l’humanité. Comment réagit l’accusé—? De passage à Paris, le garde des Sceaux congolais Alexis Thambwe Mwamba répond aux questions de Christophe Boisbouvier et s’exprime aussi, à cette occasion, sur la procédure engagée contre l’opposant congolais Moïse Katumbi.

    Vous êtes visé par une plainte en Belgique pour « crime contre l’humanité ». Quelle est votre réaction ?

    Alexis Thambwe Mwamba : Je l’ai appris par la presse. Nous avons convenu, mon avocat et moi-même, que tant que je ne me serai pas encore présenté devant le juge, on devait s’en tenir au communiqué que vous avez certainement vu.

    A l’origine de cette plainte, il y a un attentat contre un avion civil sur l’aéroport de Kindu. C’était le 10 octobre 1998, en pleine guerre civile. A l’époque, vous étiez l’un des dirigeants du mouvement rebelle RCD-Goma [Rassemblement congolais pour la démocratie-Goma] et vous avez reconnu que c’est votre rébellion qui a abattu l’avion. Est-ce que vous assumez tout cela ?

    J’étais le porte-parole du mouvement. L’avion a été abattu par nos forces militaires. Donc j’ai communiqué pour le compte du mouvement.

    Donc vous assumez ?

    Oui, pour le compte du mouvement, oui tout à fait.

    Ce que dit votre avocat, c’est qu’en tant que porte-parole, vous ne disposiez ni d’une autorité, ni d’une compétence militaire au sein du RCD-Goma ?

    Exact.

    Qu’est-ce que vous voulez dire par là ?

    Je m’en tiens au communiqué qui a été fait par mon avocat.

    Ce que dit votre avocat, c’est que vous n’auriez pas été à l’origine de cet attentat ?

    Certainement pas. Les militaires nous ont informés de ce qui s’était passé. Mais je préfère pouvoir m’étendre sur cette question lorsque nous serons devant le juge.

    Alors concrètement, est-ce que vous pouvez aller aujourd’hui en Belgique sans risquer de vous retrouver devant un juge, devant des policiers. Comment ça se passe ?

    Je viens de la Belgique. Je suis allé en Suisse. J’attendrai la convocation du juge.

    Et vous avez une idée de la date ?

    Je ne sais pas. J’ai élu domicile chez mon avocat, donc il sera informé et me tiendra informé.

    Et si le juge vous convoque, que ferez-vous ?

    Je me rendrai.

    Au risque peut-être de ne pas ressortir libre du bureau du juge ?

    Je me rendrai, vous pouvez me faire confiance. Je me rendrai.

    Vous êtes couvert par une immunité ou pas ?

    Oui, je suis couvert par l’immunité diplomatique, mais je ne la ferai pas valoir.

    C’est-à-dire que si demain, le juge décide de vous entendre et qui sait de vous inculper, et qui sait peut-être de vous mettre en prison, vous assumerez tout ça ?

    On avisera cela au moment opportun.

    Il y a plus d’un an, l’opposant  Moïse Katumbi a été condamné à trois ans de prison pour spoliation d’un bien immobilier. Et depuis, il est en exil en Europe. S’il rentre demain à Kinshasa, est-ce qu’il risque la prison ?

    Monsieur Moïse Katumbi peut rentrer à Kinshasa ce soir, il  peut rentrer à Kinshasa demain. Il va se retrouver dans la situation qui était la sienne au moment où il a quitté le territoire.

    C’est-à-dire ?

    Il va se représenter devant ses magistrats parce qu’il faisait l’objet de deux procédures judiciaires et le magistrat l’attend pour poursuivre cette procédure. En ce qui concerne la condamnation, ça sera au juge d’appel de décider ce qu’il doit faire.

    Voulez-vous dire que tant que la décision d’appel n’est pas prise, il peut rester en liberté, il peut circuler librement sur le territoire congolais ?

    Dans le code qui est le nôtre, si le premier juge décide que vous serez arrêté, on vous arrête. C’est le juge d’appel qui décide de votre mise en liberté ou pas.

    Donc a priori, s’il rentre, il est arrêté.

    D’après le code, logiquement oui.

    Est-ce que, comme le demandent les évêques de la Cenco [Conférence épiscopale nationale du Congo], une mesure de décrispation n’est pas envisageable afin que Moïse Katumbi puisse rentrer librement ?

    Mais la mesure ne peut pas se prendre sans avoir vidé la procédure sur le plan judiciaire. Il ne faut pas individualiser. Je pense que vous êtes fixé sur une personne, sur un individu. Pourquoi vous ne demandez pas qu’on puisse arrêter en fait [la procédure] pour tous les autres ?

    Si je m’intéresse à ce cas, c’est parce que tout le monde s’y intéresse, à commencer par les évêques de la Cenco. Ils vous le demandent.

    Mais je sais, les évêques de la Cenco ont fait une démarche. Peut-être qu’ils ont contribué eux-mêmes à ne pas la faire aboutir. Ils ont envoyé un courrier qui était censé être confidentiel au président de la République et, au moment où le président de la République entame l’examen de ce dossier et demande de vérifier ce que les évêques disent, les évêques ont distribué le courrier un peu partout, notamment à monsieur Katumbi, qui l’a utilisé auprès de certaines chancelleries, de certains ministres à gauche et à droite. C’est cela le problème. C’est-à-dire qu’à partir du moment où vous vous présentez comme médiateur et que vous êtes évêque par-dessus le marché, gardez l’église au milieu du village. C’est difficile d’être médiateur. On peut très bien être un évêque, on n’a pas nécessairement le doigté nécessaire. Tous les évêques ne sont pas le cardinal Monsengwo [Laurent Monsengwo Pasinya, archevêque de Kinshasa, œuvre depuis longtemps pour le dialogue intercongolais et le respect des droits de l’homme au Congo, ndlr].

    Donc il faudrait une nouvelle médiation ?

    Ça, je ne sais pas.

    La justice congolaise officiellement est indépendante. Mais la magistrate qui a condamné Moïse Katumbi en 2016, la présidente des juges de paix de Lubumbashi, Chantale Ramazani Wazuri, affirme aujourd’hui qu’on l’a forcée à condamner Moïse Katumbi sans même délibérer.

    Ça, ça m’étonnerait quand même.

    C’est ce qu’elle dit !

    D’abord ça n’est pas une décision individuelle. La décision n’était pas une décision à juge unique. C’est une décision qui est prise par un collège de magistrats. Cela veut dire qu’ils sont au moins trois juges, plus un magistrat du parquet. C’est une décision collégiale.

    Elle était présidente des juges de paix de Lubumbashi…

    Mais une fois que les débats sont terminés, la décision de la présidente peut être mise à mal par les autres.

    Aujourd’hui cette magistrate vient d’obtenir le statut de réfugiée en France, ce qui prouve que son témoignage est pris au sérieux par les autorités françaises. Est-ce que vous ne craignez pas que cette affaire ternisse l’image de votre justice ?

    Mais je pense que le juge d’appel de monsieur Katumbi verra quand il va rentrer, il va devoir aussi examiner les déclarations de cette magistrate. Ça, c’est clair.

    Le 2 juin, Moïse Katumbi a porté plainte auprès du Comité des droits de l’homme de l’ONU, à Genève, pour discrimination à son égard de votre part. Et le 13 juin, ce Comité des Nations unies lui a répondu qu’il allait vous demander de prendre toutes les mesures nécessaires pour que l’opposant puisse rentrer au Congo et puisse « participer librement et en toute sécurité à l’élection présidentielle en tant que candidat » ?

    Nous avons reçu la note verbale du haut-commissaire. Mais là où le bât blesse, c’est que monsieur Moïse Katumbi est dans une procédure nationale qu’il n’a pas épuisée. Parmi les moyens d’irrecevabilité que le Congo va présenter au haut-commissaire, on va lui opposer les principes, à savoir que le Conseil [de l’ONU] ne peut recevoir les dossiers que pour autant que les moyens nationaux ont été épuisés. Donc ce ne sont pas les dossiers judiciaires qui empêcheraient monsieur Moïse Katumbi de se présenter à l’élection présidentielle. Il y a une lecture sélective en fait de la Constitution. Si on dit aujourd’hui que Joseph Kabila ne peut pas se présenter pour un troisième mandat, c’est parce que la Constitution l’interdit. C’est l’article 70, alinéa 1er. Mais monsieur Moïse Katumbi a un empêchement qui est d’ordre constitutionnel. Et l’article 10 de la Constitution, qui dit que quiconque a pris une nationalité étrangère a perdu la nationalité congolaise. Et aujourd’hui, d’après les données que nous avons, il a pris la nationalité étrangère. C’est ça le problème qu’il a.

    Pour cela, j’imagine que ce seront les tribunaux congolais qui trancheront. Mais je reviens à ce que vous demande le Comité des droits de l’homme de l’ONU de Genève. Est-ce que demain monsieur Katumbi pourra rentrer en République démocratique du Congo et « participer librement et en toute sécurité à l’élection présidentielle » ?

    Il y a deux aspects. Que monsieur Katumbi rentre au Congo, il peut le faire. Il n’y a personne qui va porter atteinte à son intégrité physique, mais j’ai dit qu’il va se retrouver, sur le plan judiciaire, dans la situation qui était la sienne au moment où il a quitté le territoire national. Mais le problème de fond est de savoir si oui ou non il est éligible. Au stade actuel, les données qui sont en possession de l’administration congolaise établissent qu’il a une nationalité italienne. Et aujourd’hui, il ne peut pas se présenter. A lui de prendre les mesures nécessaires pour recouvrer alors totalement sa nationalité congolaise.

    Selon les Nations unies, il y a actuellement plusieurs dizaines de prisonniers politiques en République démocratique du Congo. Est-ce que des mesures de décrispation sont envisagées ?

    Entre juillet 2016, quand j’ai fait signer au président de la République les lois portant mesures collectives de grâce, et les différentes sorties de prison à la suite de demandes soit des évêques, soit de l’Union européenne, soit des ambassades, nous avons fait sortir de nos prisons plus de 2 000 personnes avant qu’on nous parle des évadés.

    Depuis les manifestations du 19 décembre 2016, 12 membres du Rassemblement sont en prison à Goma. Est-ce qu’il ne serait pas temps de faire un geste à leur égard ?

    Je pense que nous avons fait tout ce qui était possible en fait. Les jeunes gens qui étaient à Goma ou ailleurs, dans la plupart des cas, on les a libérés. Donnez-nous la liste de ceux que vous considérez comme étant encore en prison. Ceux qui ont été arrêtés à la suite des manifestations, il n’y a pas de raisons pour qu’ils puissent continuer à croupir en prison. Mais il faut envoyer les listes. Moi, j’apprends par vous que 12 manifestants de Goma se trouveraient encore dans les prisons congolaises.

    Dix ans après l’assassinat de notre confrère Serge Maheshe qui était le directeur de radio Okapi à Bukavu, [la radio de la mission de l’ONU en République démocratique du Congo. Il a été abattu le 13 juin 2007], l’ONG Reporters sans frontières (RSF) affirme que les véritables coupables et commanditaires du crime n’ont toujours pas été arrêtés. Ils demandent la réouverture du procès de cet assassinat.

    Qu’ils fassent la demande. S’il y a des éléments nouveaux qui font que l’éclatement de la justice peut se faire, je pense qu’il n’y a personne qui va s’opposer.

    Vous-même, vous pensez que le procès des assassins a été bâclé à l’époque ?

    Je n’ai pas suivi le dossier, mais, si vos collègues estiment qu’ils ont des éléments qui permettent de rouvrir le dossier, moi je vais appuyer en tout cas cette démarche. Ça, c’est clair.

    Depuis dix mois, les violences dans le Grand Kasaï ont fait au moins 400 morts. Certaines vidéos sont accablantes pour les forces de sécurité. Et aujourd’hui, neuf militaires comparaissent devant un tribunal à Mbuji-Mayi. Mais est-ce que ce procès n’est pas une goutte d’eau dans un océan d’impunités ?

    Aujourd’hui, avec ce qui s’est passé au Kasaï, le procès de Mbuji-Mayi, comme le procès de Kananga, ne sont que les premiers de toute une série de procès qui vont pouvoir s’ouvrir. Le procès des militaires à Mbuji-Mayi, c’est ce qui s’est passé à Mwanza Lomba [en décembre 2016] où on voit les militaires de l’armée tirer sur des gens qui les attaquaient. Ceux-là ont été identifiés. Les faits ont été établis. Et on a également ouvert à Kananga le procès [des assassins] de deux experts des Nations unies, parce que, là aussi, le parquet militaire a pu réunir les preuves contre les personnes qui ont assassiné les deux experts des Nations unies. La douzaine de personnes qui avaient participé à cet assassinat ont été toutes identifiées. Certaines sont en fuite, mais les éléments que le parquet militaire détient étaient suffisants pour ouvrir un procès. Et dans l’Etat du Kasaï, il y a eu plusieurs centaines de victimes. Et nous sommes nous-mêmes conscients, au niveau du gouvernement, que la gestion calamiteuse de la succession du chef Kamuina Nsapu a donné lieu à des violences inouïes.

    Il n’est pas question de ne pas poursuivre ce qui s’est passé au Kasaï. Donc il y a aujourd’hui deux procès qui sont en cours. Il y aura peut-être dix, quinze, vingt ou trente procès en ce qui concerne la situation du Kasaï. C’est ainsi que, depuis plusieurs mois, nos services de renseignement avaient mis notamment sur écoute un certain nombre de personnalités de premier plan qui étaient originaires du Kasaï, parce qu’il était question de savoir qui a fait quoi, qui a joué un rôle positif, qui a joué un rôle négatif. Le document que le New York Times avait publié n’était pas venu du ciel. C’est un document de nos services qui a fuité, je ne sais pas comment, mais c’est un document authentique de nos services. Et ces écoutes ont démontré qu’il y a des gens qui, d’une façon ou d’une autre, peut-être pour des raisons de leadership local, ont attisé le feu, et d’autres qui ont joué un rôle extrêmement positif pour que les choses puissent se calmer. L’enregistrement est authentique.

    Avec le député Clément Kanku ?

    Oui, avec le député Kanku. Mais il y en a d’autres, il n’est pas le seul à avoir été mis sur écoutes.

    Est-ce que l’ancien gouverneur Alex Kande a joué un rôle positif ou négatif ?

    Pour le moment, nous avons ordonné une enquête administrative. Cette enquête administrative est en cours.

    Et est-ce que l’ancien vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur Evariste Boshab Evariste Boshab a joué un rôle positif ou négatif ?

    Je ne sais pas vous dire. Je dis qu’il y a une enquête administrative qui est en cours, et qui est ordonnée par le président de la République en personne. Les instructions que j’avais reçues étaient de dire que les enquêtes doivent être menées. Toutes les personnes qui ont joué un rôle négatif doivent passer devant le tribunal.

    Le 12 mars ont été assassinés deux experts de l’ONU, l’Américain Michael J. Sharp et la Suédoise Zaida Catalan. Beaucoup dans le monde demandent une commission d’enquête indépendante. Que répondez-vous ?

    Les Nations unies nous ont dit qu’ils veulent mettre en place une commission d’enquête indépendante. A la suite de cette formulation, nous avons avancé dans ce qui était notre position de départ qui était de dire : l’enquête sera congolaise, rien que congolaise. Nous avons avancé et nous avons dit que nous sommes d’accord pour conduire l’enquête, mais que les experts internationaux viennent se joindre à nous. Telle est notre position aujourd’hui. Les Nations unies disent : « il n’est pas question que leurs enquêteurs puissent travailler avec les Congolais. Nous voulons une enquête totalement indépendante ». Et j’expliquais hier à Genève l’impossibilité d’organiser une enquête sans tenir compte des autorités nationales. Nous sommes ouverts à une collaboration la plus étroite possible avec les enquêteurs internationaux. Et nous disons qu’il est impossible qu’on puisse faire cette enquête en excluant les magistrats congolais.

    Mais pourquoi pas deux enquêtes parallèles. Est-ce que ce n’est pas la meilleure façon de montrer que vous n’avez rien à cacher ?
    Mais, on n’a rien à cacher ! C’est pour cette raison qu’on a dit qu’il ne peut pas y avoir deux enquêtes parallèles. Nous voulons une enquête qui se fasse en équipe. La meilleure formule pour qu’il y ait manifestation de la vérité, c’est que les équipes travaillent ensemble, avec le même objectif. La meilleure formule possible dans ce dossier du Kasaï, c’est la task force administrative que nous avons mise en place, une force pour pouvoir assurer le suivi, une force dans laquelle siègent les Nations unies. Nous disons que ça, c’est la position du gouvernement congolais. Nous sommes ouverts pour une enquête commune et ils vont travailler ensemble.

    Depuis quelques semaines, les sanctions de la part des Etats-Unis et de l’Union européenne se multiplient contre des responsables de votre pays, non seulement contre des chefs militaires et policiers de la répression, mais aussi contre des hommes politiques comme le chef de l’Agence nationale de renseignements, Kalev Mutond, comme le ministre de la Communication et des médias Lambert Mendé, comme l’ancien vice-Premier ministre Evariste Boshab. Est-ce que vous ne craignez pas d’être un jour mis en quarantaine par la communauté internationale ?

    Mais je pense que la communauté internationale a intérêt à discuter avec nous. Nous avons réagi avec beaucoup de responsabilité. On n’a pas eu de réaction épidermique de la part du Congo pour dire que nous allons ignorer et que nous allons aussi prendre des mesures de réciprocité, parce que, dans les relations internationales, c’est une question de réciprocité. Nous avons dit, ok nous allons voir ce qui va continuer à se faire. Mais je ne pensais pas que ce soit la bonne méthode pour arriver à des résultats. Au contraire, on a braqué un certain nombre de personnalités [congolaises] de premier plan et, au contraire, on risque de ne plus avoir des interlocuteurs dans une démarche qui nécessite qu’on puisse parler de part et d’autre.

    rfi