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  • « Filmer le chaos » : les tranchées, personnages de films

    Télévisions & Radio Le documentaire de Marius Doïcov explore intelligemment un siècle de cinéma sur la Grande Guerre. Par Antoine Flandrin Publié hier à 12h30, mis à jour hier à 12h30 Lecture 3 min. Le cinéaste Bertrand Tavernier dans le documentaire de Marius Doïcov, « Filmer le chaos ». EMPREINTE DIGITALE Canal+ Cinéma, lundi 5 novembre à 23 heures, documentaire Au cours des trente dernières années, de nombreux cinéastes français, britanniques et américains se sont emparés de la guerre de 14-18. Steven Spielberg, pour n’en citer qu’un, signait avec Cheval de guerre, en 2011, l’un des films de guerre les plus spectaculaires et les plus émouvants de la dernière décennie. Qu’est-ce qui pousse à faire un film sur la Grande Guerre ? Comment a-t-on filmé les tranchées et les assauts depuis un siècle ? Comment incarne-t-on un guerrier ? Voici quelques-unes des questions que Marius Doïcov a posées à des cinéastes, des producteurs, des scénaristes, des acteurs, des écrivains et des historiens. Saluons l’audace de sa démarche : pour parler de cette guerre à l’occasion du centenaire, les réalisateurs ont moins proposé des films réflexifs que des documentaires à base d’images d’archives, privilégiant une mise en forme classique. Ce qui fait surtout la force de ce documentaire, c’est la qualité des interventions Saluons ensuite le montage intelligent et subtil : les souvenirs que Marc Dugain rapporte de son grand-père, gueule cassée qui ne put plus jamais embrasser sa grand-mère, sont illustrés, non par des extraits de La Chambre des officiers (2001), film adapté de son roman (JC Lattès, 1998), mais par des passages d’un autre film, Au ­revoir là-haut (2017), autre adaptation d’un roman, portant lui aussi sur un mutilé de guerre. Ce qui fait surtout la force de ce documentaire, c’est la qualité des interventions. Celles d’un Bertrand Tavernier, qui, pour « reconstituer le chaos complet » des scènes de bataille de Capitaine Conan (1996), n’a pas adopté le point de vue des généraux, mais celui « des fantassins qui dégustent ». Celles d’un Jean-Pierre Jeunet, qui, pour filmer de haut les assauts des poilus dans Un long dimanche de fiançailles (2004), a dû mettre au point une « organisation quasi militaire ». Ou encore celles d’un Tony Bill, réalisateur de Flyboys (2006), décrivant les reconstitutions de scènes de batailles aériennes. « Ivresse guerrière » Les acteurs ne sont pas en reste. Philippe Torreton parle de « l’ivresse guerrière » qui est en nous, montrant sa parfaite compréhension du personnage qu’il a incarné dans Capitaine Conan. Acteur et auteur d’Au revoir là-haut, Albert Dupontel avoue le « plaisir ludique, un peu pervers, de jouer à la mort ». Iris Bry explique, pour sa part, comment les costumes qu’elle a portés dans Les Gardiennes (2017) l’ont aidée à entrer dans la peau des femmes qui, à l’arrière, s’occupaient des champs. Les éclairages historiques d’Annette Becker sont précieux. Analysant le rôle de la tranchée qui fit, dès les années 1920, l’objet de différents usages idéologiques – les films patriotiques en firent le lieu de l’héroïsme des combattants, tandis que les pacifistes s’en servirent pour dénoncer les conditions dans lesquelles ils étaient morts –, elle explique comment les cinéastes, après la seconde guerre mondiale, ont cherché à traversla première guerre mondiale à parler de leur temps : dans Les Sentiers de la gloire (1957), Kubrick dénonçait la guerre du Vietnam. Joyeux Noël (2005), de Christian Caron, reflétait le besoin d’une mémoire transnationale de la guerre. Insistant sur le rôle de transmission de l’histoire que peut avoir le cinéma, le film se veut un encouragement aux futures générations de cinéastes à se saisir de ce réservoir inépuisable d’idées qu’est la première guerre mondiale. Filmer le chaos, de Marius Doïcov (France, 2018, 55 min). www.mycanal.fr
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  • « Victor Hugo, ennemi d’Etat » : de l’homme du monde au champion du peuple

    « Victor Hugo, ennemi d’Etat » : de l’homme du monde au champion du peuple

    France 2, lundi 5 novembre à 21 h 10, téléfilm

    Février 1848, la République renaît dans la faillite de la monarchie de Juillet, renversée par la rue. Décembre 1851, elle est mise à mort par le coup d’Etat orchestré par Louis Napoléon Bonaparte, soucieux de confisquer le pouvoir qu’une élection démocratique ne lui accordait que pour quatre ans. Comment en vient-on en aussi peu de temps à basculer du statut d’écrivain unanimement salué, pair de France et soutien du parti de l’ordre, à celui d’« ennemi d’Etat » dont la tête est mise à prix avant que la proscription ne vous contraigne à l’exil ?

    C’est ce qu’entend faire comprendre cette évocation, précise et strictement menée par Sophie Hiet et Jean-Marc Moutout, du moment charnière où Victor Hugo abandonne les nostalgies monarchiques pour incarner une opposition frontale au régime despotique qui prépare le rétablissement de l’empire. Savamment, les auteurs tissent avec finesse les liens entre vie familiale, vie sentimentale et vie politique de Hugo. Les fils de l’écrivain, Charles et François-Victor, s’engagent eux-mêmes dans le combat républicain, sans les atermoiements du « pèrissime », tandis que leur sœur Adèle tente d’échapper au spectre de son aînée Léopoldine.

    Désordres amoureux

    Les désordres amoureux d’un homme qui aime plaire et ne sait pas choisir – en marge d’une épouse qu’il respecte mais néglige, Hugo (Yannick Choirat) se partage entre ses deux maîtresses, Juliette Drouet (Isabelle Carré), devenue depuis des lustres une confidente et une collaboratrice dans la mise au net du grand roman social qu’il projette, ces Misères qui deviendront Les Misérables, et la jeune Léonie d’Aunet (Erika Sainte) qu’il a lâchement laissé incarcérer pour adultère – n’en font pas un champion du rétablissement du divorce, s’il reste celui de l’abolition de la peine de mort.

    C’est du reste à l’Assemblée, où il défend une politique sociale qui reclasse ce conservateur modéré toujours plus à gauche, et dans les locaux de L’Evénement, le journal qu’il lance pour diffuser ses idées auprès du plus grand nombre, que s’opère la métamorphose de l’homme du monde en champion du peuple. Passé le 2 décembre 1851, ne reste que la voie de l’exil, d’où le nouvel Hugo tonne contre « Napoléon le Petit » avant de devenir une icône républicaine.

    Victor Hugo, ennemi d’Etat, de Jean-Marc Montout (Fr., 2018, épisodes 1 et 2 (sur 4), 2 × 50 min). www.francetelevisions.fr

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  • Théâtre : « LOVE », dans l’intimité de la souffrance sociale

    Théâtre : « LOVE », dans l’intimité de la souffrance sociale

    Une claque. Et, on en prend le pari, une découverte majeure : c’est LOVE, qui ne joue malheureusement que quelques soirs aux Ateliers Berthier, à Paris, dans le cadre du Festival d’automne, puis, à la mi-novembre, à la Comédie de Valence. On n’avait jamais vu la souffrance sociale de cette manière-là, au théâtre. On en sort ébranlé comme rarement.

    LOVE convie les spectateurs, de manière très proche, dans l’intimité de plusieurs êtres réunis par hasard, à la veille de Noël, dans un foyer d’urgence de l’aide sociale britannique. Il y a là un homme d’âge moyen, qui vit avec sa mère malade ; une famille composée d’un jeune père de deux préados et de sa nouvelle compagne, métisse et enceinte ; une exilée soudanaise et un réfugié syrien. Aucun d’eux n’a un travail, sauf, peut-être, le réfugié syrien, qui passe comme une ombre furtive et occupe sans doute un emploi clandestin. Tous attendent, certains depuis des mois, leur installation dans le logement définitif qu’on leur a promis.

    C’est le travail sur le réalisme qui est passionnant ici : un réalisme qui ne décalque pas la réalité mais la condense, l’intensifie

    Pendant une heure et demie d’une densité presque insoutenable, la pièce ausculte la tragédie de l’exclusion de manière on ne peut plus concrète et sensible, dans cet espace de promiscuité où chacun vit sous le regard des autres, où tous se voudraient un peu plus chanceux, un peu plus « inclus » que les autres. C’est le travail sur le réalisme qui est passionnant ici : un réalisme qui ne décalque pas la réalité mais la condense, l’intensifie et la donne à éprouver de manière quasi charnelle.

    On doit cette pièce d’une force peu commune, qui triomphe un peu partout en Angleterre depuis sa création, en 2016, à un jeune auteur et metteur en scène britannique de 33 ans, qui vient pour la première fois en France, mais dont le patronyme est loin d’être inconnu de ce côté-ci de la Manche : Alexander Zeldin. Il n’est pas le fils…

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  • Exposition : le cabinet de curiosités baroque de Philippe Favier

    Exposition : le cabinet de curiosités baroque de Philippe Favier

    La Chine est un continent si riche que Philippe Favier la met au pluriel. Un fou du mandarin ? Non, pour ses pérégrinations, le plasticien de 61 ans se contente des puces et autres vide-greniers. C’est là qu’il puise la matière première de ses mises en scène. Comme il le fait depuis près de quarante ans, il a donc écumé tout ce que la France compte de brocantes à trois sous à l’occasion de Chine.s, son exposition au centre d’art Campredon de l’Isle-sur-la-Sorgue, dans le Vaucluse. Il en a rapporté boîtes à bijoux burinées et valises d’antan, jouets abandonnés et instruments bizarres, antiques feuilles de notaires et gravures d’inventaire du château de Versailles.

    A partir de ce matériel, cet artiste rare, dont il est exceptionnel de voir un ensemble d’une telle ampleur, produit une œuvre hors d’âge. Tous ces objets trouvés, il les recombine, les repeint, les retaille ; il les émaille, les entaille d’une foule de personnages, leur dessine des microcosmes fourmillant de détails. A mille lieues des modes actuelles, son esthétique précieuse est l’héritière des cabinets de curiosités comme des divagations surréalistes.

    Bestiaire fantastique

    Flirtant avec les limites du rocaille, elle exige souvent de bonnes lunettes, tant elle relève de l’enluminure. Ainsi de cet antiphonaire du XVIIIe siècle, recueil des chants entonnés durant une messe : Favier en envahit les partitions d’un bestiaire fantastique et d’une danse macabre pleine d’allégresse. Car la mort est bien sûr une figure omniprésente dans ces vanités contemporaines. Pas une salle sans crâne ou squelette : qu’elles envahissent de vieux échiquiers passés au noir, des relevés cadastraux ou un catalogue d’ameublement, les inquiétantes silhouettes surgissent sans crier gare.

    Avec ses assemblages de puzzle, Philippe Favier nous rappelle que « l’on est enfant trop tôt » et que le jeu est la plus sérieuse des occupations

    Mais il y a aussi beaucoup de légèreté dans le projet de celui…

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  • Photographie : de nouveaux quartiers pour Cartier-Bresson

    Photographie : de nouveaux quartiers pour Cartier-Bresson

    Henri Cartier-Bresson (1908-2004) a signé d’inoubliables portraits de ses contemporains, mais lui-même refusait d’être photographié, et il sortait un couteau de sa poche pour décourager toute tentative de voler son image. Le fondateur de l’agence Magnum, qui a marqué l’histoire de la photographie avec ses images fulgurantes, n’a pas non plus fait beaucoup d’autoportraits. Celui qui est accroché à la Fondation Cartier-Bresson, à Paris, confirme à la fois son rejet de l’exercice et son humour facétieux : en 1933, en voyage en Italie avec ses amis l’écrivain André Pieyre de Mandiargues et l’artiste Leonor Fini, il s’allonge sur un mur et photographie… ses pieds, avec le paysage en contrebas.

    C’est ce drôle de « selfeet » (« selfie de pieds ») avant l’heure, reproduit sur une grande affiche, accompagné d’autres images commentées, qui accueille les visiteurs dans la toute nouvelle Fondation Henri Cartier-Bresson (HCB) : celle-ci vient de quitter sa tranquille impasse près de Montparnasse pour s’installer dans un immeuble tout neuf au cœur du quartier animé du Marais, à Paris. « Les visiteurs de passage, surtout ceux venant de l’étranger et de la province, venaient pour voir du Cartier-Bresson et ils étaient souvent déçus qu’il n’y ait pas plus d’images de lui, souligne le directeur, François Hébel. Ici, il y aura toujours cet espace à l’entrée, intitulé “perles des archives”, qui revisite quelques-unes de ses images et revient sur leur lecture qui évolue. L’espace d’exposition, qui peut être coupé en deux, nous permettra aussi de faire des focus sur Cartier-Bresson en plus de l’exposition du moment. »

    D’énormes travaux ont transformé un ancien garage de voitures en un lieu d’exposition et de conservation climatisé et dernier cri de 900 mètres carrés

    D’énormes travaux ont transformé un ancien garage de voitures sur plusieurs étages dotés d’une rampe massive, au fond d’une cour, en un lieu d’exposition et de conservation climatisé…

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  • Exposition : Martine Franck, portrait d’une photographe empathique

    Exposition : Martine Franck, portrait d’une photographe empathique

    Pour inaugurer les nouveaux locaux de la Fondation Henri Cartier-Bresson, Agnès Sire, directrice artistique du lieu, ne pouvait imaginer autre chose qu’une exposition de Martine Franck. La photographe, épouse de Henri Cartier-Bresson, a été en effet l’instigatrice et la cheville ouvrière de l’institution, dont elle fut présidente jusqu’à sa mort, en 2012. « Martine Franck s’est épanouie dans ce projet. Elle qui s’est toujours intéressée aux sujets sociaux avait un peu un complexe de fille de riches, explique Agnès Sire. La fondation lui a permis de consacrer sa fortune familiale à un projet qu’elle destinait à la communauté, d’acheter un lieu qui préserve l’œuvre de Cartier-Bresson, mais aussi celle d’autres photographes. »

    Dès le début, les deux femmes ont travailléen tandem : « Elle ne m’a jamais rien imposé, ni refusé », souligne Agnès Sire. En 2012, les archives de Martine Franck ont rejoint celles d’Henri Cartier-Bresson, mais la photographe, fidèle à sa discrétion habituelle, a refusé que le nom de la fondation change.

    Rencontres et engagements

    L’exposition et le livre, élaborés avec Martine Franck alors qu’elle se savait malade, se lisent comme un hommage et un portrait en creux d’une artiste au regard doux et à la volonté tenace. Accrochées en constellation sur le mur vert céladon, de façon chronologique, les images en noir et blanc à l’élégance classique racontent aussi bien l’époque dans laquelle Martine Franck a baigné que ses rencontres et ses engagements : les mouvements sociaux des années 1960, les femmes, l’enfance et la vieillesse, les artistes, les îles Britanniques, l’Asie…

    En 1970, lorsque Martine Franck épouse Henri Cartier-Bresson, de trente ans son aîné, lui a déjà abandonné la photographie. De son côté, elle a tracé son chemin : après un voyage initiatique en Extrême-Orient avec son amie Ariane Mnouchkine, dont elle suivra l’aventure au Théâtre du Soleil, elle…

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  • Danse : l’essaim de Christos Papadopoulos

    Danse : l’essaim de Christos Papadopoulos

    Un clic et des dizaines de Christos Papadopoulos surgissent sur l’écran. Un seul est danseur et chorégraphe. « J’ai un nom tellement banal en Grèce que c’est presque une blague, glisse ce trentenaire souriant. Chez nous, au lieu de dire : Il était une fois un homme, on dit : Il était une fois un Papadopoulos. » Et donc, trois ans seulement après la création de sa compagnie Leon & the Wolf, basée à Athènes, avec trois pièces à son tableau d’honneur, ce Papadopoulos-là se hisse pour la seconde fois à l’affiche du Théâtre de la Ville-Les Abbesses, à Paris, avec Ion.

    Tout file vite pour Papadopoulos ? Oui et non. Ses bagages pèsent déjà lourd. Il appartient au cercle des interprètes et amis du chorégraphe et plasticien vedette Dimitris Papaioannou. Il a joué dans sa mise en scène des cérémonies des Jeux olympiques d’Athènes en 2004. « J’interprétais le lanceur de javelot qui fait surgir de la mer la statue d’une tête cycladique », rappelle-t-il en mimant le geste athlétique.

    Christos Papadopoulos, chorégraphe : « Avec Dimitris [Papaioannou], on formait une famille avec beaucoup de liberté dans les échanges au travail. Nous avions le luxe du temps »

    Il collabore ensuite avec Papaioannou de 2005 à 2009 : « Nous avons été à l’affiche en 2006 avec son spectacle “2” pendant quatre mois au Théâtre Pallas, dont la jauge est de 1 900 spectateurs, et avons fait salle comble chaque soir. Avec Dimitris, on formait une famille avec beaucoup de liberté dans les échanges au travail. Nous avions le luxe du temps. Sa méthode de création m’a illuminé. Je continue à lui parler régulièrement et répète parfois dans ses studios. En revanche, je ne suis pas inspiré comme lui par la mythologie grecque. »

    Nature d’abord, au premier plan. Christos Papadopoulos est né et a grandi dans le petit village de Némée, dans le Péloponnèse. Son grand-père était viticulteur…

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  • Florence Malraux, assistante-réalisatrice, est morte

    Florence Malraux, assistante-réalisatrice, est morte

    Fille de Clara et André Malraux, figure parisienne des années 1950, assistante-réalisatrice, entre autres, d’Alain Resnais dont elle fut l’épouse, membre de plusieurs institutions cinématographiques, Florence Malraux est morte mercredi 31 octobre à Paris. Elle avait 85 ans.

    Elle naît le 28 mars 1933 à Paris. La même année, son père devient célèbre avec la publication de La Condition humaine. Lorsque ses parents se séparent, au début de la seconde guerre mondiale, la petite Florence accompagne sa mère dans le sud de la France, à Toulouse, puis à Montauban. Elle est le témoin de l’engagement de Clara Malraux dans la résistance. A cette époque, elle rencontre Edgar Morin, alors étudiant et bientôt lui aussi résistant, qui restera son ami.

    A la Libération, elle revient à Paris, où elle se lie d’amitié avec Françoise Quoirez, qui n’est pas encore Sagan, et compte parmi les premiers lecteurs du manuscrit de Bonjour tristesse. Le nom de Florence Malraux revient, avec celui de Bernard Frank ou Claude Perdriel, dans la chronique des nuits parisiennes que traversait la jeune romancière.

    « Faire rayonner l’œuvre de son père »

    En 1961, la fille du désormais ministre de la culture du général de Gaulle signe le Manifeste des 121 qui soutient l’insoumission et la solidarité avec les insurgés en Algérie. C’est le début d’une longue brouille avec André Malraux. En même temps, elle se tourne vers le cinéma. Elle assiste François Truffaut sur le tournage de Jules et Jim (1962), sans que son nom soit mentionné au générique. L’année précédente, elle a occupé le même poste – seconde assistante – sur le plateau de L’Année dernière à Marienbad, d’Alain Resnais (l’autre second assistant du film a pour nom Volker Schlöndorff). C’est le début d’une collaboration, puis d’un mariage, qui dureront jusqu’à I Want to Go Home, en 1989, en passant par Muriel, Providence, Mon Oncle d’Amérique ou Mélo.

    Florence…

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  • Jacques-Henri Eyraud : « Dans les faits, la ligue fermée est déjà à l’œuvre dans le football européen »

    Jacques-Henri Eyraud : « Dans les faits, la ligue fermée est déjà à l’œuvre dans le football européen »

    C’est un discours qui a fait parler : mardi 30 octobre, le président de l’OM, Jacques-Henri Eyraud, était invité au Sport Innovation Summit (SIS), un colloque sur les innovations dans le sport qui se tenait dans les salons feutrés du Medef, à Paris. Il y exposait sa vision du football du futur, sur laquelle il revient pour Le Monde.

    Lire aussi :   Le nouveau président de l’Olympique de Marseille, Jacques-Henri Eyraud, l’ami des Américains

    Vous avez évoqué dans votre discours un projet de ligue fermée avec 36 clubs, 18 au nord de l’Europe, 18 au sud. C’est un projet qui rencontre une forte opposition, notamment en France, mais dont les « Football Leaks » ont révélé qu’il était plus concret qu’on ne l’imaginait.

    Nous n’avons jusqu’à présent pris part à aucune discussion ou groupe de travail visant à mettre en place un tel projet. Pour éviter la ligue fermée, le football professionnel français doit impérativement accélérer sa mutation, soutenir davantage ses meilleurs représentants pour qu’ils soient plus compétitifs encore sur la scène européenne, pérenniser un modèle économique favorable à l’ensemble des acteurs, regarder les nouvelles technologies dans les yeux et cultiver son exceptionnelle capacité à former et développer des jeunes joueurs de grand talent.

    Lire aussi :   « Football Leaks » : la faiblesse de l’UEFA face aux grands clubs européens

    Mais arrêtons l’hypocrisie. Dans les instances européennes, la ligue fermée, c’est l’éléphant dans la pièce. Tout le monde y pense et personne n’en parle… La réalité, c’est qu’elle est déjà à l’œuvre. Les 80 % des clubs participant aux phases éliminatoires de la Ligue des champions sont les mêmes depuis vingt ans et la réforme qui a limité l’accès à la compétition a figé un peu plus le statu quo. Avec deux places qualificatives pour les phases de groupe, il est clair que la France s’est fait plumer.

    « Le football ne peut qu’attirer des investisseurs capables de mettre beaucoup d’argent afin de rendre pérenne une ligue fermée »

    Il y a donc déjà un football à deux vitesses où une élite se dégage et génère des moyens exorbitants, quand ces élites ne sont pas dans les mains d’Etats, comme les Emirats arabes unis ou le Qatar. Quand vous voyez que le top 10 européen est constitué d’un groupe de clubs dont le budget annuel est supérieur à 400 millions d’euros, vous vous dites que le football ne peut qu’attirer des investisseurs capables de mettre beaucoup d’argent afin de rendre pérenne une ligue fermée, réunissant les clubs les plus populaires au monde.

    Joueurs « augmentés », changements de règles, ligue fermée… votre intervention lors du SIS a fait beaucoup réagir, souvent négativement. Comprenez-vous la défiance de plusieurs acteurs du monde du football sur ces questions ?

    Le monde du football est très conservateur. Ces réactions ne font que le confirmer. Dans ce secteur, l’horizon est le dimanche suivant. D’ailleurs, j’ai eu beaucoup de réflexions après cette conférence pour me dire « OK, mais il est où le grand attaquant ? » [que réclament les supporteurs de l’Olympique de Marseille depuis deux saisons]. C’est absurde. On est là justement pour bâtir quelque chose de solide, un club qui sera compétitif pendant des années et qui va comprendre et anticiper les évolutions technologiques pour essayer de les utiliser de façon positive, y compris socialement. Le résultat de l’OM le week-end prochain a évidemment son importance, mais il faut surtout continuer à penser au long terme.

    J’étais invité à cette conférence qui traite d’innovation et qui consistait à imaginer ce que pourrait être le football dans dix-quinze ans. Je n’ai pas parlé de ce que je souhaitais. J’ai évoqué ce que je voyais arriver. J’ai pu voir dans mon parcours professionnel l’impact des technologies sur des pans entiers d’industries et la société dans son ensemble. Sous prétexte que le football est le sport universel qui a tiré son succès de son accessibilité, sous prétexte qu’il est au sommet de la chaîne alimentaire du sport, est-il immunisé contre ces vagues technologiques ? Pour moi, la réponse est évidemment non.

    Quel sera l’impact de ces nouvelles technologies sur le football ?

    Deux événements m’ont toujours fasciné : la victoire de Deep Blue sur Kasparov en 1997 qui marque les débuts concrets de l’IA [intelligence artificielle], et le séquençage du génome au tout début des années 2000. Ces deux événements marqueront durablement le XXIe siècle. L’IA va bouleverser tous les secteurs économiques et la biotechnologie et les neurosciences vont modifier complètement les notions de performance, de santé, de bien-être et de longévité.

    Le football se trouvera forcément bouleversé par ces deux plaques tectoniques. L’évolution qui se profile est celle d’un sport qui va rester très populaire au niveau amateur mais qui, au sommet de la pyramide, va faire que ceux qui pourront supporter le coût de la recherche et de l’adoption des technologies prendront de l’avance sur les autres.

    « On est capable de faire évoluer l’homme. Le sport n’échappera pas à cette tendance et la difficulté va consister à en définir les limites »

    Le foot professionnel français doit donc conduire sa révolution copernicienne. Dans le plan stratégique de la LFP [Ligue de football professionnelle] d’ici à 2022, il n’est prévu que 3 millions d’investissements dans le numérique et le recrutement de seulement 4 personnes. Tout est dit…

    Vous avez également évoqué les progrès de la science sur le corps humain et ses applications au football. Pensez-vous que nous verrons des « joueurs augmentés » à l’avenir ?

    Des clubs travaillent déjà sur ces questions avec des laboratoires de recherche. Le sujet est extraordinairement compliqué et en même temps assez simple : quand on réussit à séquencer le génome, on est capable de faire évoluer l’homme. Le sport n’échappera pas à cette tendance et la difficulté va consister à en définir les limites.

    Il y a plusieurs champs d’expérimentation qui existent aujourd’hui, comme la prévention des blessures. Une rupture des ligaments qui immobilise un joueur six mois est un drame pour le joueur mais aussi pour le club. Tout ce qui sera capable de limiter ces blessures ou d’accélérer la guérison sont des enjeux extrêmement importants. Idem pour la pose d’implants ou de prothèses, qui permettraient de limiter les blessures mais aussi d’avoir une performance accrue.

    Au-delà des questions éthiques que cela pose, n’y a-t-il pas un risque d’accentuer ce football à deux vitesses ?

    C’est un risque immense qu’il va falloir surveiller de très près et il y aura besoin de régulation, de transparence et d’informations. Ce qui est important dans le sport, c’est l’aléa du résultat. Si cet aléa est balayé, alors on sera arrivé à une situation contre-productive qui signera la fin du sport. Il faut donc être capable de l’empêcher à tout prix.

    Comment se regardera le football à la télévision ?

    Il y a plus d’un an déjà, j’ai expérimenté un système de réalité mixte, avec des lunettes qui ne vous isolent pas du monde extérieur. Elles projettent un écran avec un niveau de résolution d’images exceptionnelle et qui permet d’avoir accès à des données, de revoir le ralenti des images selon ses besoins, etc. La technologie va pouvoir ouvrir des champs d’expérimentation incroyables dans le spectacle de diffusion d’un match de football.

    Va-t-on vers une exploitation plus grande des données statistiques, pendant un match par exemple ?

    Je ne dis pas que ça remplacera le jugement humain et la perception visuelle, mais c’est un complément qui arrivera, c’est inéluctable. Je ne vois pas en quoi on dénature le sport en ayant accès à des informations en temps réel sur les joueurs adverses, ses propres joueurs, et être capable de les utiliser pour adapter son schéma de jeu, affiner ses choix, etc.

    Vous estimez que le football perd de sa popularité. Ces mesures sont-elles pertinentes pour remédier à cette tendance ?

    C’est une évolution problématique, notamment chez les plus jeunes, liée à la montée en puissance de l’e-sport et des jeux vidéo. Comment faire pour que le foot leur parle davantage ? Comment fidéliser ou attirer vers soi les jeunes qui font souvent autre chose quand ils regardent les matchs de football à la télévision ? Un des grands problèmes des sports américains aujourd’hui est le vieillissement des téléspectateurs, dont l’âge moyen est largement supérieur à 50 ans.

    « Les évolutions des règles trouveront peut-être leur inspiration chez les éditeurs de jeux vidéo »

    D’où certaines idées que j’ai évoquées par rapport à l’évolution des règles. Après ma conférence, quelqu’un m’a appris que l’idée du but qui compte double lorsqu’il est marqué au-delà de la surface avait déjà été intégrée dans un mode du jeu FIFA 2019. La fiction peut influer sur la réalité, et demain, les évolutions des règles trouveront peut-être leur inspiration chez les grands éditeurs de jeux vidéo. Il faut se poser les bonnes questions sur le format, les règles du jeu et la façon dont il est produit sur les médias traditionnels et numériques.

    Que va-t-il rester du spectacle vivant dans les stades, consubstantiel au football ?

    Assister à un match de l’OM au milieu d’un virage est une expérience absolument extraordinaire, qui peut même vous changer. Pour moi, c’est d’ailleurs l’une des dernières expériences sociales ultimes. A l’OM, nous sommes très sensibles à notre responsabilité sociale et à l’environnement dans lequel on évolue. Tout ce qu’on fait est passé au tamis de notre ville, de ce qu’elle peut accepter et de ce qu’elle peut moins accepter.

    Le défi est de continuer à proposer des places en virage à des prix extrêmement bas. Face au PSG, près de 40 % du public avaient payé l’équivalent d’un peu plus de 9 euros [en raison du prix des abonnements]. Nous proposons une gamme de prix extrêmement large qui part des virages et va jusqu’aux zones hospitalités, où les prix peuvent être très élevés. On va continuer à pratiquer une segmentation très fine.

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  • Soul : les mille nuances de Macy Gray

    Soul : les mille nuances de Macy Gray

    Macy Gray arrive en chaussons à la réception d’un hôtel de Bruxelles, où elle joue le soir même, avant son concert parisien du 7 novembre, à la Salle Pleyel. A peine descendue du bus de sa tournée européenne, elle s’est mise à l’aise, avant une série d’entretiens, pour défendre son dixième album, Ruby, certainement un des plus réussis de sa carrière, car il marie à merveille sa voix doucement éraillée à des compositions jazz concoctées par des producteurs plutôt habitués jusque-là à la pop.

    Si, à 51 ans, la chanteuse a pourtant l’air fatigué en ce début d’après-midi, ce n’est ni à cause de ses concerts – il n’en paraîtra rien dans la soirée – ni à cause de ses rencontres avec les médias : « Mes trois enfants sont en tournée avec moi, explique-t-elle, ils me rendent folle. Ils ont 21, 22, 23 ans, et on dirait qu’ils en ont 4 ou 8. Je pensais que ça allait être drôle de les emmener mais, en fait, ils m’embêtent tout le temps. »

    Une voix « de dessin animé »

    Quand sa carrière décolle, en 1999, grâce à son tube international, I Try, Natalie Renee ­McIntyre est déjà une jeune mère de famille, fraîchement divorcée, avec trois chérubins sur les bras. Partie vivre dans l’Ohio auprès de sa mère, professeure de mathématiques, elle a déjà renoncé à son rêve de devenir scripte dans le cinéma, de chanter les classiques de Nina Simone et de Frank Sinatra dans son groupe de jazz et d’écrire pour les autres. L’éditeur phonographique Jeff Blue va la convaincre de revenir à Los Angeles et d’utiliser cette voix si particulière – une voix « de dessin animé » comme elle s’en amuse encore – pour ­chanter ses propres textes. Bien lui en prend : son premier album, On How Life Is, se vend à plus de 7 millions d’exemplaires dans le monde.

    Depuis, Macy Gray a appris à maîtriser les aléas de sa carrière, et surtout sa voix : « Ça fait tellement longtemps que je chante, résume-t-elle,

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